Publications par Arnaud Lambelet

L’existence d’un cas de préemption en cas d’amitié entre le vendeur et l’acheteur

TF, 19.08.2024, 5A_927/2023*

Certaines ventes d’immeubles ne constituent pas des cas de préemption en raison des relations personnelles qui existent entre vendeur et acheteur. Toutefois, tel est uniquement le cas lorsque les relations personnelles ont exercé une influence déterminante sur la vente ; la simple existence d’une amitié entre le vendeur et l’acheteur ne suffit pas à elle seule pour écarter le cas de préemption.

Faits

Deux fermiers exploitent chacun la moitié d’une parcelle reconnue en tant qu’immeuble agricole au sens de la LDFR. Le propriétaire de l’immeuble agricole décide de le vendre en totalité à l’un des deux fermiers et un tiers. Les nouveaux propriétaires résilient le contrat de location en faveur de l’autre fermier, qui demande alors à consulter le contrat de vente puis exerce son droit de préemption sur la parcelle qu’il louait jusqu’alors.

Suite au refus des nouveaux propriétaires d’accepter le droit de préemption et l’échec d’une procédure de conciliation, le fermier dépose alors une action auprès du Kantonsgericht de Zoug afin de faire valoir son droit de préemption. Le Kantonsgericht donne raison au fermier. Les nouveaux propriétaires forment alors recours en matière civile au Tribunal fédéral, lequel est amené à se prononcer sur l’existence d’un droit de préemption en cas de relation particulière entre le vendeur et l’acheteur.… Lire la suite

L’infection au COVID-19 lors du travail en milieu hospitalier et le risque professionnel spécifique à l’activité (art. 9 al. 1 LAA)

TF, 12.07.2024, 8C_582/2022*

Une maladie infectieuse – le COVID-19 – contractée lors du travail en milieu hospitalier n’est pas nécessairement une maladie professionnelle au sens de l’art. 9 al. 1 LAA ; il faut en plus que le travailleur ait contracté la maladie infectieuse alors qu’il exerçait un travail avec un risque professionnel spécifique à l’activité.

Faits

Une psychologue travaille au sein d’une clinique médicale durant la pandémie de COVID-19 en 2020. La psychologue n’entre pas directement en contact avec les patients que l’on suspecte d’être atteints du COVID-19. En revanche, les collègues qui s’occupent des patients suspects – dont la supérieure de la psychologue – se déplacent librement dans le service de psychologie. En octobre 2020, la psychologue contracte le COVID-19 ; par la suite, sa maladie évolue en COVID-19 long.

L’employeur de la psychologue annonce le cas auprès de son assurance obligatoire contre les accidents professionnels et non professionnels ainsi que les maladies professionnelles. L’assurance refuse de prendre en charge la patiente, car il n’a pas été prouvé avec suffisance que la psychologue avait contracté le COVID-19 sur son lieu de travail. Le Versicherungsgericht du canton d’Argovie rejette le recours de la psychologue. Cette dernière forme alors recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur l’infection au COVID-19 sur le lieu de travail comme maladie professionnelle.… Lire la suite

Le recours contre la décision de suspendre la procédure (art. 55a CP)

TF, 09.07.2024, 7B_851/2023*

Le recours est ouvert contre une décision de refus de suspendre la procédure (art. 55a CP). En revanche, le prévenu ne dispose pas d’un intérêt juridiquement protégé à s’opposer à la décision ; il ne dispose ainsi pas de la qualité pour recourir (art. 382 CPP).

Faits

Le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne ouvre une instruction à l’encontre d’un prévenu ; ce dernier est soupçonné d’avoir commis envers sa femme des lésions corporelles simples et qualifiées, des voies de fait ainsi que des menaces qualifiées.

Quelques mois plus tard, l’époux sollicite une suspension de la procédure au sens de l’art. 55a al. 1 let. c CP. Cette requête se fonde sur la volonté de l’épouse de ne pas déposer plainte pénale ; elle souhaite que la procédure ouverte contre son mari se termine, ce que l’épouse confirme par la suite.

Le Ministère public rejette la demande de suspension. Il estime qu’une suspension de six mois ne suffirait pas à stabiliser et améliorer la situation. Le mari forme recours contre cette décision auprès de la Chambre pénale du Tribunal cantonal vaudois, lequel admet le recours et renvoie l’affaire au Ministère public, afin qu’il statue à nouveau sur la requête en la motivant de manière accrue.… Lire la suite

Les autorisations de l’aménagement du territoire à obtenir pour les exploitants de réseau de télécommunication

ATF 150 II 489 | TF, 21.03.2024, 1C_416/2022*

L’art. 35 LTC garantit une procédure simple et rapide afin d’obtenir une autorisation d’usage accru du sol ; en revanche, la disposition n’exempte pas les exploitants de réseau de télécommunication de l’exigence d’une autorisation de construire conformément au droit de l’aménagement du territoire.

Faits

Une société exploite un réseau de télécommunication dans un village. Pour parer aux risques d’interruption de réseau, la société souhaite construire une ligne de raccordement supplémentaire. Le service de la construction de la commune en question invite alors la société à déposer une demande de permis de construire.

La société demande à la commune d’autoriser l’installation d’une ligne de raccordement souterraine, toutefois sans ouvrir de procédure formelle d’autorisation de construire ; elle se fonde sur l’art. 35 de la Loi fédérale sur les communications (LTC).

La commune rejette la demande. Sur appel, le Regierungsrat du canton d’Obwald rejette également la demande de la société. Cette dernière forme alors recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, qui est amené à interpréter la portée de l’art. 35 LTC en lien avec les exigences de l’aménagement du territoire.

Droit

L’art. 22 LAT pose le principe de l’autorisation de construire à l’égard des installations et constructions à créer ou transformer.… Lire la suite

La non-applicabilité de l’art. 124a LEI à l’infraction de rupture de ban (art. 291 CP)

TF, 05.06.2024, 6B_66/2024*

L’art. 124a LEI ne déploie pas son régime à l’égard de l’infraction de rupture de ban (art. 291 CP) ; la jurisprudence relative à la Directive sur le retour (2008/115/CE) s’applique à celle-ci.

Faits

En 2020, la Cour de Justice genevoise condamne un prévenu d’origine étrangère ; elle prononce une expulsion du territoire suisse pour une durée de huit ans. En 2023, le Tribunal de police de la République et canton de Genève condamne le même prévenu pour rupture de ban (art. 291 CP, c’est-à-dire la transgression de l’interdiction de séjourner sur le territoire suisse) ainsi que consommation de stupéfiants (art. 19a LStup) ; en effet, il a continué à séjourner en Suisse malgré la décision d’expulsion judiciaire à son encontre. Il écope de 180 jours-amende en lien avec la rupture de ban ainsi que CHF 300 d’amende pour la violation de l’art. 19a LStup.

Sur appel, la Cour de Justice genevoise réforme le jugement du Tribunal de police. Elle condamne le prévenu à six mois de peine privative de liberté à la place des jours-amende. Le prévenu forme alors un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, lequel est amené à se prononcer sur la portée de la Directive sur le retour (2008/115/CE) avec l’infraction de rupture de ban.… Lire la suite