Le salaire minimum genevois et l’exception applicable aux stagiaires

TF, 21.03.2025, 2C_431/2024

Il n’est pas arbitraire de considérer qu’un employeur ne peut pas se contenter de se prévaloir de sa « longue tradition » à encadrer des stagiaires, sans fournir d’autres éléments en lien avec les prétendus stages, pour prouver que les employés concernés échappent à l’exception au salaire minimum genevois prévue par l’art. 39J lit. b LIRT/GE.

Faits

En juin 2022, l’Office cantonal de l’inspection et des relations du travail du canton de Genève s’adresse à une société anonyme dans le cadre d’un contrôle systématique du respect du salaire minimum. Il lui demande notamment la transmission des contrats de l’ensemble du personnel depuis le 1er janvier 2020 et tout autre renseignement utile en lien avec le système de rémunération et d’enregistrement de la durée du travail.

En janvier 2023, l’Office informe la société que, sur la base des documents remis, elle ne respectait pas le salaire minimum institué par la Loi genevoise sur l’inspection et les relations de travail (LIRT) à l’égard de plusieurs employés, en particulier ceux qui étaient engagés avec des contrats intitulés « stage formation » ou « temporaires ». En effet, les informations fournies dans le cadre du contrôle ne permettent pas à l’Office de constater que l’exception au salaire minimum applicable aux stagiaires serait remplie dans ces cas.… Lire la suite

La validité des restrictions cantonales à la location de personnel en matière de marchés publics

TF, 30.01.2025, 2C_587/2023*

Les cantons peuvent édicter des normes visant à restreindre l’usage de la location de personnel en matière de marchés publics, pour autant qu’elles se limitent à concrétiser les critères d’aptitude prévus par l’art. 63 al. 4 AIMP. Ces restrictions ne doivent pas s’appliquer de manière systématique, mais être justifiées en fonction des exigences spécifiques de chaque marché public.

Faits

Le 5 septembre 2023, le Grand Conseil neuchâtelois adopte un décret formalisant l’adhésion du canton à l’accord intercantonal sur les marchés publics (AIMP) ainsi qu’une nouvelle loi cantonale sur les marchés publics (LCMP/NE).

Cette loi prévoit la possibilité pour l’autorité adjudicatrice de limiter ou d’exclure le recours à la location de personnel (art. 9 al. 1 LCMP/NE). De plus, elle fixe une proportion maximale de travailleurs temporaires admissible pour la réalisation d’un marché de construction (art. 10 LCMP/NE). Cette proportion est de deux travailleurs intérimaires pour 1 à 3 employés fixes, 3 travailleurs temporaires pour  4 à 6 employés fixes, et ainsi de suite jusqu’à un maximum de 20% de travailleurs intérimaires à partir de 21 employés fixes.

Une association faîtière et plusieurs sociétés actives dans le domaine de la location de personnel forment un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral.… Lire la suite

La non-conformité à la Constitution d’une école secondaire pour filles

TF, 17.01.2025, 2C_405/2022*

i. L’art. 15 al. 4 Cst. exclut tout enseignement religieux obligatoire. En outre, le contenu et l’organisation de l’enseignement ne doit pas être systématiquement orienté vers une croyance.

ii. Les écoles publiques doivent en principe être mixtes (art. 8 al. 3 Cst.).

Faits 

En 1996, la commune de Wil (SG) et le couvent de Sainte-Catherine concluent un accord relatif à la gestion d’une école secondaire pour filles par le couvent. L’accord prévoit que l’école, dénommée « Kathi », est gérée conformément au mandat légal d’éducation et de formation.

En 2016, le Parlement communal de Wil approuve un avenant à l’accord, qui prévoit que la Fondation École Sainte-Catherine, entité de droit privé, reprend la gestion de l’école.

Plusieurs citoyens et un parti politique forment un recours contre la décision du Parlement. Après plusieurs recours successifs et un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral relatif à l’existence d’une base légale suffisante, le Tribunal administratif cantonal saint-gallois rejette le recours.

Les intéressés interjettent alors un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si l’accord conclu avec l’école tel qu’approuvé par le Parlement de la commune de Wil viole la liberté de croyance et de conscience (art.Lire la suite

L’avocat·e qui s’en rapporte à justice

TF, 02.06.2025, 2C_611/2024*

En fonction des circonstances, l’avocat·e ne viole pas son devoir de diligence en s’en rapportant à justice plutôt que de plaider que l’appel est réputé retiré lorsqu’un·e autre appelant·e fait défaut (art. 407 al. 1 lit. a CPP). En l’espèce, cette faute technique n’atteint pas le seuil de gravité nécessaire pour tomber sous le coup de l’art. 12 lit. a LLCA.

Faits

Précédemment inscrit au registre des avocat·es membres de l’UE/AELE, un avocat est inscrit au registre du canton de Genève depuis 2013.

L’avocat est nommé d’office dans un cas de défense obligatoire. Le Tribunal de police genevois condamne son mandant, le reconnaissant coupable notamment de lésions corporelles simples. Il l’acquitte toutefois de tentative de viol et de contrainte sexuelle.

En appel, la personne qui accuse le mandant de tentative de viol et de contrainte sexuelle ne se présente pas. L’avocat de l’absente, sans nouvelles récentes de sa part, demande à pouvoir représenter sa cliente sur la base de la procuration conférée plusieurs années plus tôt. Invité à se prononcer sur le défaut, le défenseur s’en rapporte à justice, tandis que le Ministère public conclut au retrait de l’appel.

Après délibération, la Chambre pénale déclare prendre acte du retrait de l’appel et révoque, faute de défense obligatoire, le mandat d’office du défenseur.… Lire la suite

Le droit au mariage en l’absence de titre de séjour des deux fiancés

TF, 01.05.2025, 2C_480/2024*

Un refus général de délivrer des autorisations de séjour de courte durée en vue du mariage lorsque les fiancés sont tous deux dépourvus de titres de séjour porte atteinte à la substance du droit au mariage (art. 14 Cst. ; art. 12 CEDH). Dans certaines circonstances exceptionnelles, il convient d’octroyer les autorisations, même si les mariés n’auront pas le droit de demeurer en Suisse par la suite.

Faits

Deux ressortissants du Sénégal, nés en 1984 et 1986, indiquent être arrivés en Suisse en 2007 et 2012 respectivement. Ils ont quatre enfants, nés entre 2014 et 2023, les trois premiers étant scolarisés en Suisse.

En janvier 2019, la mère dépose auprès de l’Office cantonal de la population et des migrations de Genève une demande d’autorisation de séjour pour raisons humanitaires pour elle et ses deux premiers enfants, les deux plus jeunes n’étant pas encore nés. En mars 2022, le père dépose également une demande d’autorisation de séjour.

Un an plus tard, l’Office cantonal refuse les demandes et prononce le renvoi de Suisse des parents et des enfants, sur la base de condamnations pénales, en particulier pour entrée illégale et exercice d’une activité lucrative sans autorisation.… Lire la suite