Publications par Camille de Salis

L’indication d’un faux motif à l’appui d’un licenciement et l’art. 251 CP

TF, 26.11.2024, 6B_1315/2023

Faute pour ces documents de revêtir une valeur probante accrue, indiquer des motifs erronés dans une lettre de licenciement ou de motivation d’un congé ne constitue pas un faux dans les titres au sens de l’art. 251 CP.

Faits

Une commune engage un employé en qualité d’agent de commerce du service « sécurité civile ». En février 2016, sur fond de conflits internes, la commune résilie le contrat de travail de l’employé avec effet au 30 avril 2016. La lettre de résiliation ne contient pas de motif de licenciement, mais indique que la décision a été prise en séance du conseil communal le 22 février 2016.

À la suite de l’opposition de l’employé, qui demande également à connaître le motif de son licenciement, la commune lui répond par courrier que son congé est dû à une réorganisation interne de l’administration ayant entraîné la suppression de son poste.

L’employé dépose plainte pénale contre les deux signataires des lettres, en particulier pour faux dans les titres. Il reproche aux prévenus d’avoir menti quant aux véritables motifs de son licenciement et quant à la date à laquelle la décision avait été prise.

Par la voie de l’ordonnance pénale, le Ministère public valaisan condamne les prévenus pour faux dans les titres à des peines pécuniaires avec sursis, ainsi qu’à des amendes.… Lire la suite

La violation de l’art. 29 LLCA

TF, 06.11.2024, 2C_144/2024*

Avant d’ouvrir une procédure disciplinaire contre un·e avocat·e ressortissant·e d’un État membre de l’UE ou de l’AELE exerçant de manière permanente en Suisse sous son titre d’origine, l’autorité de surveillance doit informer l’autorité compétente de l’État de provenance en application de l’art. 29 LLCA. La violation de cette disposition n’entraîne toutefois pas la nullité de la décision en cause, mais son annulation.

Faits

Un avocat est inscrit au registre des avocats du Brésil, à celui du Portugal ainsi qu’au tableau genevois des avocats membres de l’UE/AELE.

Suite à une dénonciation, la Commission du barreau prononce un avertissement à l’encontre de l’avocat pour violation de son devoir de diligence. Il ressort de l’instruction que, lors de plusieurs audiences où l’intéressé œuvrait comme défenseur d’office, des magistrats avaient constaté qu’il ne maîtrisait pas suffisamment bien le français.

La Chambre administrative de la Cour de justice genevoise rejette le recours de l’avocat contre la décision de la Commission du barreau.

Par la voie d’un recours en matière de droit public, l’avocat saisit le Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si l’absence d’information de l’autorité compétente de l’État de provenance de l’intéressé avant l’ouverture d’une procédure disciplinaire à son encontre doit conduire à l’annulabilité ou à la constatation de la nullité de la décision en cause.… Lire la suite

La demande d’autorisation d’une manifestation dans le cadre du WEF 2023

TF, 08.10.2024, 1C_28/2024*

En refusant totalement le passage par une route cantonale d’une manifestation contre le WEF 2023, les autorités grisonnes ont violé la liberté d’opinion (art. 16 Cst) et la liberté de réunion (art. 22 Cst) du recourant.

Faits

Le 10 novembre 2022, pour le compte du « Strike WEF Kollektiv », une personne demande l’autorisation d’organiser une manifestation, intitulée « Winterwanderung für Klimagerechtigkeit » (marche hivernale pour la justice climatique). La manifestation doit prendre la forme d’une randonnée de deux jours (14 et 15 janvier 2023) à l’occasion du Forum économique mondial de Davos (le « WEF »). Les organisateurs annoncent un maximum de 300 participants.

Mi-décembre 2022, une rencontre a lieu entre le requérant et des représentants des services cantonaux et communaux concernés. Est notamment discutée la question de l’itinéraire de la marche, en particulier le fait que le passage par la route cantonale ne sera pas autorisé.

Début janvier 2023, les communes de Küblis, Klosters et Davos accordent l’autorisation demandée, sous réserve de certaines charges et conditions. Parallèlement, par décision du 10 janvier 2023, l’Office cantonal compétent refuse de permettre l’utilisation de la route cantonale entre Küblis et Klosters. L’itinéraire autorisé contraint les manifestant·es à emprunter des routes secondaires et des chemins pédestres sur ce tronçon.… Lire la suite

Les voies de recours lors de la fixation du traitement d’un·e juge cantonal·e

TF, 22.08.2024, 1C_668/2023*

S’agissant de la fixation de son traitement, un·e juge cantonal·e doit bénéficier d’une voie de recours auprès d’une autorité judiciaire sur le plan cantonal (cf. art. 29a Cst.).

Faits

Le secrétaire général (Generalsekretär) du Tribunal cantonal zurichois rend une décision par laquelle il augmente provisoirement le taux d’occupation d’un juge. Ce dernier est dès lors intégré dans une nouvelle classe salariale.

Estimant devoir être intégré dans une classe salariale supérieure, le juge saisit la Verwaltungskommission du Tribunal cantonal, sans succès. Il exerce ensuite un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si les voies de recours cantonales en la matière sont conformes au droit supérieur.

Droit

Selon l’art. 86 al. 2 LTF, les cantons instituent des tribunaux supérieurs qui statuent comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral, sauf dans les cas où une autre loi fédérale prévoit qu’une décision d’une autre autorité judiciaire peut faire l’objet d’un recours devant le Tribunal fédéral. Cette disposition concrétise en particulier l’art. 191b Cst. (autorités judiciaires des cantons) ainsi que la garantie de l’accès au juge prévue par l’art. 29a Cst.

L’art.Lire la suite

Le licenciement abusif du travailleur âgé

TF, 08.10.2024, 4A_617/2023

Le Tribunal fédéral rappelle que le caractère abusif d’un licenciement peut résider dans la manière dont il est donné, en particulier lorsqu’il est effectué sans les égards appropriés dans le cas d’un travailleur proche de l’âge de la retraite et au service de son employeur depuis de nombreuses années.

Faits

Un boulanger travaille au service d’une société pendant 19 ans, en particulier au sein de l’un des laboratoires. Hormis trois avertissements espacés dans le temps, l’employé donne entière satisfaction à son employeur, comme le relève son certificat de travail final.

En mai 2020, dès la réouverture du laboratoire après les restrictions liées à la crise sanitaire du COVID-19, la société met fin aux rapports de travail du boulanger, sans que sa lettre de licenciement ne contienne de motivation. Le boulanger fait opposition à son licenciement, qu’il estime abusif. La société évoque alors des motifs économiques à l’appui du licenciement.

Suite à une tentative infructueuse de conciliation, le boulanger ouvre action par-devant le Tribunal des prud’hommes genevois. Ce dernier retient l’existence d’un congé abusif et condamne la société au paiement dune indemnité équivalent à trois mois de salaire.

La Chambre des prud’hommes de la Cour de justice ayant confirmé cette décision, la société saisit le Tribunal fédéral, qui doit se déterminer sur l’existence d’un congé abusif.… Lire la suite