La fouille de téléphones portables

TF, 23.02.2021, 1B_602/2020

Dans le cadre d’une mise sous scellés, le propriétaire identifie de manière suffisante les données bénéficiant de la protection du secret qui se trouvent sur des appareils électroniques saisis en indiquant le nom des applications qui contiennent ces données. Si l’intérêt au maintien de la sphère privée prime l’intérêt à la poursuite pénale, le Tribunal des mesures de contrainte doit trier ces informations avant d’autoriser le Ministère public à fouiller les appareils.

Faits

Le Ministère public Zürich-Limmat mène une enquête pénale à l’encontre d’un prévenu soupçonné d’infraction qualifiée à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup). Lors d’une perquisition de son domicile, le Ministère public saisit deux téléphones portables et une tablette. Les appareils sont mis sous scellés suite à la demande du prévenu. Ce dernier se prévaut d’un intérêt au maintien du secret, invoquant que les appareils contiennent des photos intimes, des conversations personnelles et des correspondances avec ses avocats.

Estimant que le prévenu n’a pas rempli son devoir de motivation, le Tribunal des mesures de contrainte admet la demande de levée des scellés du Ministère public et l’autorise à fouiller les appareils sans procéder à un tri des données.… Lire la suite

Les limites au prononcé d’une peine privative de liberté en cas de rupture de ban (art. 291 CP)

ATF 147 IV 232 | TF, 10.03.2021, 6B_1398/2020*

L’infraction de rupture de ban (art. 291 CP) ne peut donner lieu à une condamnation pour peine privative de liberté à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers qui est demeuré en Suisse malgré son expulsion que si les autorités ont suivi la procédure de renvoi prévue par la Directive sur le retour (cf. ég. RO 2010 5925) ou en ont été empêchées en raison du comportement de l’intéressé.

Faits

Le 23 mai 2018, le Tribunal de police du canton de Genève condamne un ressortissant algérien pour plusieurs infractions, dont celle d’entrée illégale et de séjour illégal en Suisse. Il ordonne son expulsion pour une durée de cinq ans.

Le ressortissant algérien demeure néanmoins en Suisse et se fait derechef condamner à une peine privative de liberté pour rupture de ban en décembre 2018.

Après sa libération en janvier 2020, il demeure en Suisse et est interpellé quelques mois plus tard. Par jugement du 6 juillet 2020, confirmé en appel, le Tribunal de police le déclare coupable de rupture de ban et le condamne à une peine privative de liberté de neuf mois.

Le prévenu recourt alors au Tribunal fédéral. Il ne remet pas en cause sa condamnation, mais reproche aux tribunaux genevois d’avoir violé le droit fédéral et international en lui infligeant une peine privative de liberté alors qu’aucune mesure n’a été prise en vue de son renvoi effectif.… Lire la suite

Contributions d’entretien : précisions sur l’art. 125 CC

ATF 147 III 249 | TF, 03.11.2020, 5A_907/2018*

Lorsque des époux divorcent, une contribution d’entretien (art. 125 CC) n’est due que si le mariage a influencé, de manière concrète, la situation financière de l’époux·se créancier·e. Ce n’est pas le cas lorsque les époux n’ont pas cohabité, l’un vivant à l’étranger, et qu’ils n’ont pas eu d’enfants communs, même si l’un a cessé toute activité lucrative, sans nécessité conjugale, pour dépendre financièrement de l’autre.

Faits

Après huit ans d’un mariage sans enfants, des époux se séparent. L’époux verse une contribution d’entretien mensuelle à son épouse durant une année. Il arrête ensuite de payer. L’épouse requiert alors des mesures protectrices de l’union conjugale. L’époux est condamné à lui verser une contribution d’entretien mensuelle.

Une année plus tard, l’époux dépose une demande de divorce. Le Tribunal compétent prononce le divorce, en maintenant l’obligation de l’époux de verser une contribution d’entretien à l’épouse jusqu’à l’âge de la retraite et en le condamnant au versement d’une somme au titre de la liquidation du régime matrimonial. L’époux fait recours auprès du Tribunal cantonal des Grisons qui le rejette.

L’époux recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer si en l’espèce le mariage a influencé de manière concrète la situation de l’épouse, ce qui le conduit à préciser sa jurisprudence concernant l’octroi d’une contribution d’entretien au sens de l’art.Lire la suite

Le droit d’accès à l’origine des données

ATF 147 III 139 | TF, 10.12.2020, 4A_125/2020*

Une ordonnance de preuve ne doit pas avoir pour effet de procurer au requérant les informations visées par la demande au fond.

Les informations qui se trouvent dans la mémoire humaine ne tombent pas sous le coup du droit d’accès selon l’art. 8 LPD.

Faits

Un associé d’une étude d’avocats zurichoise est inculpé par les autorités pénales américaines de complicité à des délits fiscaux.

Quelques années plus tard, après avoir été exclu de son étude, l’ancien associé apprend que sa banque veut mettre un terme à sa relation contractuelle avec lui. L’avocat soupçonne qu’un associé de son ancienne étude a informé le General Counsel de la banque du fait qu’il avait été inculpé aux États-Unis. Il dépose alors une demande de droit d’accès fondée sur la protection de données.

Le Bezirksgericht de Zurich rend une ordonnance de preuve afin d’entendre l’associé de l’étude, un autre avocat, ainsi que le General Counsel de la banque au sujet d’une potentielle conversation téléphonique entre l’associé et le General Counsel.

L’Obergericht confirme l’ordonnance de preuve. Il considère en particulier que le droit de connaître l’origine des données (art. 8 al. 2 let.Lire la suite

Le trafic de stupéfiants par métier en cas de commission en bande (art. 19 al. 2 let. b et c LStup)

ATF 147 IV 176 | TF, 03.02.21, 6B_1302/2020*

En cas de trafic illicite de stupéfiants en bande (art. 19 al. 2 let. b LStup), le chiffre d’affaires réalisé par la bande est entièrement imputable à chaque membre afin de déterminer s’il y a commission par métier selon l’art. 19 al. 2 let. c LStup.

Faits

Un individu est condamné à une peine privative de liberté de six ans pour infraction grave à la LStup selon l’art. 19 al. 1 let. b, c, d et g cum art. 19 al. 2 let. a (mise en danger de la santé de nombreuses personnes) et let. b (trafic en bande) LStup par le Bezirksgericht de Kulm en Argovie.

Le prévenu forme appel auprès de la cour cantonale compétente. Celle-ci le condamne à une peine privative de liberté de sept ans et demi, retenant une infraction grave à la LStup selon les dispositions précitées et selon la circonstance aggravante supplémentaire de l’art. 19 al. 2 let. c LStup (trafic par métier). Selon la cour, l’individu se serait associé à quatre autres personnes pour former une bande afin de vendre de la cocaïne à grande échelle.… Lire la suite