CourEDH, 11.12.2018, Mehmedovic c. Suisse (Décision n° 17311/11)
Une surveillance menée par une assurance privée ne constitue pas une ingérence non justifiée dans l’exercice du droit à la vie privée du requérant si ce dernier dispose de voies de recours sur le plan pénal et civil pour se plaindre des atteintes à la personnalité et si les tribunaux procèdent à une analyse des intérêts concurrents en présence. La récente jurisprudence développée dans l’affaire Vukota-Bojić c. Suisse ne s’applique pas aux assurances privées.
Faits
En octobre 2001, Elvir Mehmedovic est victime d’un accident de la route. Suite à cet évènement, il actionne, dans deux demandes séparées, les conducteurs responsables de l’accident ainsi que leurs assurances responsabilité civile chiffrant son dommage à deux millions de francs. Une des assurances mandate une agence de détectives privés afin d’observer le demandeur. Durant cette surveillance, M. Mehmedovic est exclusivement observé dans des lieux accessibles au public. Le rapport de l’agence constate que celui-ci peut, sans grandes difficultés, porter des charges, faire ses achats, passer l’aspirateur et nettoyer sa voiture.
Le demandeur se voit débouté des demandes portant sur un prétendu dommage ménager dans le cadre des deux procès contre les assurances. Il décide d’actionner l’agence de détectives privés pour atteinte à sa personnalité.… Lire la suite
Le conflit de compétence entre le Ministère public et le Tribunal des mineurs
/dans Procédure pénale/par Marie-Hélène Peter-SpiessATF 145 IV 228 | TF, 04.03.19, 1B_517/2018*
Les règles relatives à la compétence et au déroulement de la procédure de contestation d’un for s’appliquent également en cas de conflit de compétence matérielle. Puisqu’un Procureur général est institué dans le canton de Vaud, il lui appartient de statuer sur un recours formé contre le refus du Ministère public vaudois de se dessaisir en faveur de la juridiction des mineurs (cf. art. 40 al. 1 CPP). La Chambre des recours pénale n’est pas compétente dans cette hypothèse et doit, le cas échéant, transmettre le recours à l’autorité compétente (art. 91 al. 4 CPP).
Faits
En juin 2016, le Tribunal des mineurs vaudois débute l’instruction d’une enquête contre un mineur né en octobre 1998 pour notamment vol et violation de domicile. Le mineur est renvoyé en jugement devant le Tribunal des mineurs.
En mai 2018, le Ministère public vaudois ouvre deux instructions à l’encontre du même prévenu – entre autres – à la suite de brigandages commis durant le même mois et de cambriolages en 2018, les deux causes étant ensuite jointes. Le défenseur d’office nommé par le Ministère public demande le déssaisissement du Ministère public en faveur de la juridiction des mineurs dans l’une des deux causes, au vu de la procédure susmentionnée, encore pendante devant cette juridiction.… Lire la suite
La mutilation d’organes génitaux féminins commise à l’étranger
/dans Droit pénal/par Arnaud Nussbaumer-LaghzaouiATF 145 IV 17 | TF, 11.02.2019, 6B_77/2019*
Le législateur n’a aucunement voulu limiter les poursuites pénales fondées sur l’art. 124 CP aux auteurs qui séjournaient en Suisse au moment des faits. L’art. 124 CP doit viser la répression la plus large possible des mutilations d’organes génitaux féminins, notamment dans un but de prévention générale.
Faits
Un couple de ressortissants somaliens (nés en Somalie) est parent de quatre enfants dont deux filles nées respectivement en 2006 et 2007 en Somalie. Le mari quitte la Somalie pour venir seul en Suisse en 2008. Avant de venir le rejoindre en 2013, son épouse a demandé à un tiers de pratiquer en Somalie une excision totale ou quasi totale sur l’une de ses filles et une ablation clitoridienne sur l’autre.
Sur la base de ces faits, le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers a reconnu l’épouse coupable de mutilation d’organes génitaux féminins. La Cour cantonale neuchâteloise a rejeté l’appel que l’épouse a interjeté contre cette décision. L’épouse recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à examiner si un Tribunal peut poursuivre en Suisse un auteur ayant mutilé des organes génitaux féminins alors qu’il n’avait aucun lien avec la Suisse.… Lire la suite
L’art. 8 CEDH et la surveillance des justiciables effectuée par les assurances privées
/dans Droit public/par Célian HirschCourEDH, 11.12.2018, Mehmedovic c. Suisse (Décision n° 17311/11)
Une surveillance menée par une assurance privée ne constitue pas une ingérence non justifiée dans l’exercice du droit à la vie privée du requérant si ce dernier dispose de voies de recours sur le plan pénal et civil pour se plaindre des atteintes à la personnalité et si les tribunaux procèdent à une analyse des intérêts concurrents en présence. La récente jurisprudence développée dans l’affaire Vukota-Bojić c. Suisse ne s’applique pas aux assurances privées.
Faits
En octobre 2001, Elvir Mehmedovic est victime d’un accident de la route. Suite à cet évènement, il actionne, dans deux demandes séparées, les conducteurs responsables de l’accident ainsi que leurs assurances responsabilité civile chiffrant son dommage à deux millions de francs. Une des assurances mandate une agence de détectives privés afin d’observer le demandeur. Durant cette surveillance, M. Mehmedovic est exclusivement observé dans des lieux accessibles au public. Le rapport de l’agence constate que celui-ci peut, sans grandes difficultés, porter des charges, faire ses achats, passer l’aspirateur et nettoyer sa voiture.
Le demandeur se voit débouté des demandes portant sur un prétendu dommage ménager dans le cadre des deux procès contre les assurances. Il décide d’actionner l’agence de détectives privés pour atteinte à sa personnalité.… Lire la suite
L’abus de droit en lien avec la loi sur les résidences secondaires
/dans Droit public/par Simone SchürchATF 145 II 99 | TF, 03.12.2018, 1C_69/2018*
Les autorités saisies d’une demande de permis de construire doivent analyser d’office s’il existe des indices concrets que la demande est constitutive d’une fraude à la loi. Tel est en particulier le cas lorsqu’il paraît vraisemblable qu’une résidence principale ne pourra pas être commercialisée en tant que telle et que le requérant pourra donc potentiellement demander la suspension de la charge imposant l’utilisation en tant que résidence principale (art. 14 al. 1 let. b LRS).
Faits
Deux requérants déposent une demande de permis pour démolir deux bâtiments et construire trois nouveaux chalets sur la même parcelle, à Saanen. Il est prévu que chacun des chalets comprenne deux appartements de trois pièces et deux appartements de quatre pièces. La construction d’un espace fitness et wellness est également planifiée.
La commune de Saanen octroie le permis et rejette les oppositions des voisins. Suite à l’admission d’un recours intenté par les opposants, l’affaire est renvoyée à la commune pour qu’elle vérifie la conformité avec l’art. 75b Cst. Les requérants déposent alors une version modifiée du projet en prévoyant explicitement que les habitations seront utilisées comme résidences principales. La commune octroie l’autorisation, cette fois sous réserve de l’inscription au registre foncier d’une servitude imposant l’utilisation des habitations en tant que résidences principales.… Lire la suite
La compétence pour refuser une cession des droits de la masse si le créancier cessionnaire est également le débiteur de la prétention cédée
/dans LP/par Julien FranceyATF 145 III 101 | TF, 21.12.18, 5A_445/2018*
Une cession des droits de la masse au sens de l’art. 260 LP n’est possible que si le cessionnaire n’est pas lui-même le débiteur de cette créance. L’administration de la faillite ne peut refuser la cession que si le créancier figure lui-même comme débiteur de la prétention litigieuse à l’inventaire. En revanche, il appartient au juge du fond de déterminer si, malgré l’existence de deux entités juridiques distinctes, l’identité du créancier cessionnaire se confond matériellement avec celle du débiteur de la prétention cédée.
Faits
Les sociétés A et B ont le même administrateur unique et font partie d’un groupe de sociétés gérées par une holding aux Pays-Bas. Cette holding est dirigée par l’administrateur des sociétés A et B. La société A est mise en faillite.
Différents créanciers, dont la société B, produisent leur créance dans la faillite et demandent la cession des droits de la masse s’agissant des prétentions en responsabilité contre les organes de la faillie (cf. art. 260 LP). L’office des faillites du canton de Genève cèdent ces droits aux créanciers qui en ont fait la demande, y compris à B. Deux créanciers déposent plainte contre cette décision en estimant que l’office ne pouvait pas céder à la société B les actions en responsabilité contre les organes de la société A étant donné les liens étroits entre les organes de ces deux sociétés : en particulier, l’administrateur de la société en faillite est également l’administrateur de la société B.… Lire la suite