Une autorisation de séjour accordée sur la base de l’art. 8 CEDH à une écolière syrienne

ATF 151 I 62 | TF, 23.07.2024, 2C_157/2023*

Le statut d’admis provisoire peut, dans certaines situations, porter atteinte au droit à la vie privée protégée par l’art. 8 CEDH, en particulier lorsque ce statut engendre des désavantages concrets en raison du jeune âge ou de la situation personnelle de l’individu. Si la personne concernée est par ailleurs bien intégrée et qu’un renvoi ne peut être envisagé dans un avenir proche, elle a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour.

Faits

Une ressortissante syrienne âgée de cinq ans arrive en Suisse avec sa famille en 2014. Le Secrétariat d’État aux migrations rejette leur demande d’asile et prononce leur admission provisoire.

Sept ans plus tard, l’intéressée dépose une demande d’autorisation de séjour. Le Service de la population et des migrants du canton de Fribourg refuse la demande. Sur recours, le Tribunal cantonal confirme la décision.

L’intéressée interjette alors un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si la recourante peut bénéficier d’une autorisation de séjour en lieu et place de son admission provisoire.

Droit

La recourante invoque une violation de son droit au respect de la vie privée protégé par l’art. 8 CEDH ainsi que par l’art.Lire la suite

Le contrôle judiciaire de la planification des transports publics (art. 86 al. 3 LTF)

TF, 11.10.2024, 2C_302/2023*, 2C_309/2023*

La décision en matière de planification des transports publics ne revêt pas un caractère politique prépondérant au sens de l’art. 86 al. 3 LTF. Elle doit ainsi pouvoir faire l’objet d’un contrôle judicaire au niveau cantonal.

Faits

Par décision, le Zürcher Verkehrsverbund adopte une nouvelle planification en matière de transports publics. Contre cette décision, les villes de Zurich (2C_302/2023*) et de Winterthour (2C_309/2023*) forment un recours au Regierungsrat du canton de Zurich (Conseil d’Etat). Elles demandent en substance que l’offre en matière de transports publics soit maintenue conformément à l’ancienne planification. Le Regierungsrat rejette les recours.

Dès lors que la loi cantonale zurichoise sur la procédure administrative prévoit que la décision sur la planification des transports publics n’est pas susceptible d’un recours au tribunal administratif zurichois (art. 44 al. 1 let. e VRG-ZH), les villes de Zurich et de Winterthour forment directement un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit trancher si le droit cantonal peut en l’espèce instituer comme autorité précédente une autorité autre qu’un tribunal au regard du caractère politique de la décision (art. 86 al. 3 LTF).

Droit

Le recours est dirigé contre une décision du Regierungsrat zurichois, lequel ne constitue pas une autorité précédente au sens de l’art.Lire la suite

La FINMA peut faire du naming and shaming « indirect »

TF, 29.08.2024, 2C_682/2023* 

La FINMA peut publier un communiqué de presse relatif à la clôture d’une procédure d’enforcement contre un assujetti nommément désigné, en particulier afin de montrer au public qu’elle n’est pas inactive face aux violations du droit des marchés financiers.

Faits

La FINMA clôt une procédure d’enforcement à l’encontre d’une banque qui a gravement violé les prescriptions relatives au blanchiment d’argent. Quelques semaines après, le régulateur informe la banque de son intention de publier six jours plus tard un communiqué de presse portant sur cette procédure. Le projet de communiqué nomme expressément la banque et résume la décision d’enforcement. Sur opposition de la banque, la FINMA confirme formellement sa décision. Le Tribunal administratif fédéral interdit provisoirement à la FINMA toute publication. Il rejette ensuite le recours de la banque, retenant un intérêt public prépondérant par rapport à l’intérêt privé de l’établissement financier (B-4779/2023).

Dans son recours au Tribunal fédéral, la banque soutient que si la FINMA n’a pas ordonné de publication dans sa décision de clôture (art. 34 LFINMA), elle ne peut plus l’ordonner ultérieurement sur la base de l’art. 22 al. 2 LFINMA (information du public). Le Tribunal fédéral est ainsi amené, dans un premier temps, à préciser la relation entre ces deux dispositions et, dans un second temps, à examiner la licéité in casu du projet de publication litigieux.… Lire la suite

Le point de départ du délai pour intenter une action en libération de dette

ATF 150 III 400 | TF, 25.06.2024, 4A_61/2023*

Le délai de 20 jours pour intenter une action en libération de dette commence dès la notification du dispositif de mainlevée provisoire au débiteur, et non à partir de la notification de la décision motivée.

Faits

Une société prêteuse octroie plusieurs financements à une société emprunteuse. L’actionnaire unique de l’emprunteuse signe une reconnaissance de dette de USD 1 million en faveur de la prêteuse. De plus, le père de l’actionnaire se porte garant pour un montant de USD 715’000. Par la suite, la prêteuse cède ses créances à une société cessionnaire. Après avoir obtenu un acte de défaut de biens confirmant l’insolvabilité de l’actionnaire unique de l’emprunteuse, la cessionnaire introduit une poursuite à l’encontre du garant. Celui-ci s’oppose au commandement de payer, ce qui amène la cessionnaire à requérir la mainlevée provisoire de l’opposition. La Justice de paix du district d’Aigle prononce la mainlevée provisoire par décision du 15 octobre 2020, avec notification du dispositif de cette décision au garant le 16 octobre 2020. Ce dernier requiert alors une motivation de la décision, qui lui est notifiée le 17 décembre 2020.

Le garant introduit une action en libération de dette devant le Tribunal de première instance du canton de Genève le 6 janvier 2021.… Lire la suite

L’inexploitabilité des déclarations violant le droit de participation du prévenu (art. 147 al. 1 CPP)

ATF 150 IV 345 | TF, 05.06.2024, 6B_92/2022*

Lorsque le droit de participation du prévenu (art. 147 al. 1 CPP) a été violé lors d’une première audition, une audition postérieure respectant son droit de participation ne rend pas les précédentes déclarations exploitables (art. 147 al. 4 CPP).

Faits

Deux conducteurs se livrent à un concours d’accélération avec leurs véhicules respectifs. Un troisième conducteur situé dans une voiture derrière eux filme la scène avec son téléphone portable. Tous trois sont poursuivis pénalement.

L’un des conducteurs est acquitté par le Bezirksgericht de Dietikon. Suite au recours du Ministère public, l’Obergericht du canton de Zurich le condamne à une peine privative de liberté de 12 mois avec sursis pour violation grave des règles de la circulation routière. Cette décision se fonde essentiellement sur la vidéo enregistrée par le troisième conducteur.

Le conducteur condamné recourt auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci est amené à déterminer si l’instance précédente pouvait admettre l’exploitabilité de la vidéo de la scène sur la seule base d’auditions de coprévenus auxquelles le conducteur n’a pas eu la possibilité de participer.

Droit

Pour fonder l’exploitabilité de la vidéo comme principal moyen de preuve, l’instance précédente a admis le consentement du conducteur condamné à son enregistrement au sens de l’art.Lire la suite