Entrées par Célian Hirsch

Le respect d’une ordonnance de mesures superprovisionnelles sur les réseaux sociaux

ATF 142 III 587TF, 11.07.2016, 4A_406/2015*

Faits

Une société demande en mesures provisionnelles et superprovisionnelles qu’il soit fait interdiction à une seconde société d’utiliser un symbole quasiment identique à sa propre marque. Le Handelsgericht argovien accepte la demande et ordonne à la seconde société de ne plus utiliser ce symbole dans ses relations commerciales, notamment sous peine de devoir s’acquitter d’une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.

Trois mois plus tard, l’interdiction est confirmée par jugement sur mesures provisionnelles et la seconde société est condamnée à une amende d’ordre de 48’000 francs pour non-exécution pendant 48 jours de l’interdiction d’utiliser le symbole. Ce jugement repose sur le fait que le symbole était encore utilisé par la seconde société sur différents réseaux sociaux (Instagram, Facebook, Twitter, YouTube).

La seconde société exerce un recours en matière civile contre cette amende d’ordre auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit examiner si l’amende d’ordre, ainsi que son montant, était bel et bien justifiée.

Droit

L’art. 343 al. 1 let. c CPC prévoit que, lorsque la décision prescrit une obligation de faire, de s’abstenir ou de tolérer, le tribunal de l’exécution peut prévoir une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.… Lire la suite

Le droit de gage de la banque suite à la faillite de Madoff

ATF 142 III 746 | TF, 03.10.2016, 4A _81/2016*

Faits

Une société sise au Panama ouvre un compte auprès d’une banque vaudoise. La société confie à la banque un mandat de gestion discrétionnaire et signe un acte de gage et cession général qui prévoit que la société accorde à la banque un droit de gage et de nantissement en garantie de toutes les dettes et obligations présentes ou futures découlant de leurs relations d’affaires que la banque a ou pourrait avoir à l’avenir avec la société.

Suite à la découverte de la chaîne de Ponzi mise en œuvre par Bernard Madoff, le trustee de la masse en faillite d’une société de Madoff intente une action contre un fonds de placement dans lequel la banque avait investi pour le compte de la société panaméenne. Le trustee entend également actionner un second fonds de placement dans lequel la banque avait investi pour le compte de la société panaméenne. La banque, qui avait vendu les parts de ces deux fonds avant l’action du trustee, a été informée par le trustee que, si ce dernier ne pouvait pas obtenir le remboursement d’un certain montant par le premier fonds, il se retournerait contre la banque en sa qualité de subsequent transferee.… Lire la suite

La communication par la banque des noms d’avocats au DoJ et à l’IRS américains

TF, 22.09.2016, 4A_83/2016

Faits

Une banque tessinoise décide de participer au programme américain avec l’IRS (Internal Revenue Service) et le DoJ (Department of Justice) dans la catégorie 2 – ce qui signifie qu’elle considère avoir des raisons de présumer qu’elle a violé le droit américain – afin de signer un Non-Prosecution-Agreement (NPA).

Dans le cadre du transfert de données aux autorités américaines, le Conseil fédéral publie une Note explicative au sujet des demandes d’autorisation au sens de l’art. 271 CP. La Note précise au chiffre 1.4 que si la banque envisage de communiquer des données contre la volonté de la personne concernée par celles-ci, elle doit signaler à cette dernière son droit d’intenter action selon l’art. 15 LPD. La banque transmet les données concernant cette personne au plus tôt dix jours après la notification, si aucune plainte relative à une interdiction de divulguer les données n’a été déposée, ou après l’entrée en force du rejet de la plainte.

En juin 2014, la banque informe deux avocats ainsi qu’une SA d’avocats (ci-après “les avocats”) qu’elle compte transmettre leurs données aux Etats-Unis, compte tenu du fait qu’ils ont une procuration sur sept comptes et sept sous-comptes et sept fondations de droit panaméen dont l’ayant-droit économique est un citoyen américain domicilié aux Etats-Unis.… Lire la suite

La révision d’une sentence arbitrale

ATF 142 III 521 | TF, 07.09.2016, 4A_386/2015*

Faits

Une société italienne conclut un contrat avec une filiale allemande d’un grand groupe allemand. Le contrat contient une clause arbitrale. À la suite d’un litige entre les parties, un avocat zurichois est désigné comme arbitre unique par la CCI et condamne, dans sa sentence, la société italienne à payer des dommages-intérêts à la filiale allemande.

Presque quatre mois après le rendu de la sentence, la société italienne découvre que l‘arbitre exerce au sein d’une étude zurichoise qui fait partie d’un réseau international d’étude. Or, une étude allemande faisant partie de ce même réseau a conseillé une autre filiale du grand groupe allemand.

La société italienne forme alors une demande de révision auprès du Tribunal fédéral dans laquelle elle invite ce dernier à prononcer la récusation de l’arbitre. Le Tribunal fédéral doit se prononcer sur la possibilité de demander une révision d’une sentence lorsqu’un motif de récusation a été découvert après le délai légal de recours.

Droit

La LDIP ne contient aucune disposition relative à la révision des sentences arbitrales. Le Tribunal fédéral a comblé cette lacune par voie jurisprudentielle. Sous l’empire de l’ancienne OJ, le Tribunal fédéral avait considéré que la découverte, a posteriori, d’une violation des prescriptions concernant la composition du tribunal arbitral, telle la participation à la procédure d’un arbitre qui aurait dû se récuser, ne constituait pas un motif de révision d’une sentence rendue en matière d’arbitrage international, sous réserve de la mise au jour d’un cas de corruption touchant l’arbitre incriminé.… Lire la suite

La levée du secret médical

ATF 142 II 256TF, 16.06.2016, 2C_215/2016*

Faits

Pendant sa grossesse, une patiente découvre qu’elle est atteinte du sida et décède quelques jours plus tard. Les héritiers intentent une action en responsabilité à l’égard du médecin. Dans le cadre de ce procès, se pose la question de savoir si la patiente et son mari avaient indiqué au médecin qu’un test de séropositivité serait inutile. Afin de prouver ce fait, le médecin actionné propose d’entendre comme témoin un docteur qui avait été auparavant consulté par l’époux. Le docteur appelé à être entendu comme témoin demande à l’autorité compétente de lever son secret pour pouvoir témoigner, demande qui est admise.

L’époux exerce un recours auprès du Tribunal administratif de Saint-Gall contre cette décision de libération du secret. Le tribunal lui donne raison et annule la décision de l’autorité inférieure.

Le médecin actionné exerce alors un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur les conditions de la levée du secret médical dans le cadre d’un témoignage.

Droit

En premier lieu, le Tribunal fédéral se penche sur la question de la qualité pour recourir d’une partie au procès pour demander la levée du secret auquel est soumis un témoin potentiel.… Lire la suite