Publications par Arnaud Lambelet

L’indemnité équitable en cas de versement anticipé d’un avoir de prévoyance professionnelle (art. 124e al. 1 CC)

ATF 150 III 353 | TF, 17.07.2024, 5A_336/2023*

Lorsqu’un cas de prévoyance survient, par exemple si un époux a déjà atteint l’âge de la retraite, l’avoir d’un versement anticipé quitte le domaine de la prévoyance professionnelle. Il ne peut donc plus être partagé par moitié selon l’art. 123 CC. En cas de divorce sous le régime de la séparation des biens, cet avoir ne peut pas non plus être pris en compte lors de la dissolution du régime matrimonial ; il donne alors droit à une indemnité équitable au sens de l’art. 124e al. 1 CC.

Faits

Un couple se marie en 1998 sous le régime de la séparation des biens. Le mari atteint l’âge de la retraite en 2018. En 2020, il dépose une demande de divorce auprès du Zivilgericht du district de la Singine ; en 2022, le Zivilgericht prononce le divorce. Le jugement intime au mari de verser une contribution d’entretien de CHF 1’300 ; de plus, son ex-épouse a droit à une partie de la rente LPP qu’il touche, à hauteur de CHF 392.80.

L’ex-épouse forme appel contre le jugement auprès du Tribunal cantonal de Fribourg. Elle réclame en particulier que son ex-mari lui verse CHF 112’801.10 à titre de prévoyance professionnelle à partager ; ce montant correspond à la moitié d’un versement anticipé pour l’encouragement à la propriété du logement que son mari a touché en 2003.… Lire la suite

L’existence d’un cas de préemption en cas d’amitié entre le vendeur et l’acheteur

ATF 150 III 310 | TF, 19.08.2024, 5A_927/2023*

Certaines ventes d’immeubles ne constituent pas des cas de préemption en raison des relations personnelles qui existent entre vendeur et acheteur. Toutefois, tel est uniquement le cas lorsque les relations personnelles ont exercé une influence déterminante sur la vente ; la simple existence d’une amitié entre le vendeur et l’acheteur ne suffit pas à elle seule pour écarter le cas de préemption.

Faits

Deux fermiers exploitent chacun la moitié d’une parcelle reconnue en tant qu’immeuble agricole au sens de la LDFR. Le propriétaire de l’immeuble agricole décide de le vendre en totalité à l’un des deux fermiers et un tiers. Les nouveaux propriétaires résilient le contrat de location en faveur de l’autre fermier, qui demande alors à consulter le contrat de vente puis exerce son droit de préemption sur la parcelle qu’il louait jusqu’alors.

Suite au refus des nouveaux propriétaires d’accepter le droit de préemption et l’échec d’une procédure de conciliation, le fermier dépose alors une action auprès du Kantonsgericht de Zoug afin de faire valoir son droit de préemption. Le Kantonsgericht donne raison au fermier. Les nouveaux propriétaires forment alors recours en matière civile au Tribunal fédéral, lequel est amené à se prononcer sur l’existence d’un droit de préemption en cas de relation particulière entre le vendeur et l’acheteur.… Lire la suite

L’infection au COVID-19 lors du travail en milieu hospitalier et le risque professionnel spécifique à l’activité (art. 9 al. 1 LAA)

ATF 150 V 460 | TF, 12.07.2024, 8C_582/2022*

Une maladie infectieuse – le COVID-19 – contractée lors du travail en milieu hospitalier n’est pas nécessairement une maladie professionnelle au sens de l’art. 9 al. 1 LAA ; il faut en plus que le travailleur ait contracté la maladie infectieuse alors qu’il exerçait un travail avec un risque professionnel spécifique à l’activité.

Faits

Une psychologue travaille au sein d’une clinique médicale durant la pandémie de COVID-19 en 2020. La psychologue n’entre pas directement en contact avec les patients que l’on suspecte d’être atteints du COVID-19. En revanche, les collègues qui s’occupent des patients suspects – dont la supérieure de la psychologue – se déplacent librement dans le service de psychologie. En octobre 2020, la psychologue contracte le COVID-19 ; par la suite, sa maladie évolue en COVID-19 long.

L’employeur de la psychologue annonce le cas auprès de son assurance obligatoire contre les accidents professionnels et non professionnels ainsi que les maladies professionnelles. L’assurance refuse de prendre en charge la patiente, car il n’a pas été prouvé avec suffisance que la psychologue avait contracté le COVID-19 sur son lieu de travail. Le Versicherungsgericht du canton d’Argovie rejette le recours de la psychologue.… Lire la suite

La demande de révision en raison de motifs de récusation découverts après le rendu de la sentence arbitrale

ATF 151 III 62 | TF, 11.06.2024, 4A_572/2023*

Les motifs de récusation découverts après la clôture de la procédure arbitrale ne peuvent fonder une demande de révision de la sentence arbitrale (art. 190a al. 1 let. c LDIP) que si ces motifs existent déjà au moment du rendu de la sentence.

Faits

Une société des Émirats arabes unis conclut un contrat avec une société iranienne. Cette dernière s’engage à lui livrer et lui fournir du gaz. Cependant, la société iranienne faillit à ses obligations contractuelles et ne livre jamais le gaz escompté ; un premier tribunal arbitral constate cette violation en 2014.

La société émiratie introduit une seconde procédure arbitrale en 2018 ; la procédure vise à obtenir des dommages-intérêts pour compenser le préjudice causé par la violation contractuelle de la société iranienne. Ce second tribunal arbitral se compose de trois membres, dont l’un est l’arbitre Charles Poncet. En mai 2020, le tribunal arbitral rend une sentence incidente : il y constate qu’une résiliation valable du contrat a eu lieu en 2018.

Charles Poncet anime une émission sur une télévision genevoise depuis 2022. Dans une émission de 2023, il présente sous la forme d’un one man show un monologue qui réprime le comportement de certaines personnes de confession musulmane.… Lire la suite

Le paiement des frais de procédure pour requête téméraire ou qui témoigne de légèreté

ATF 150 I 195 | TF, 19.04.2024, 2C_313/2023*

La notion de requête téméraire ou qui témoigne de légèreté (art. 10 al. 2 LHand) suppose un élément objectif et subjectif. Le premier nécessite que la demande soit vouée à l’échec ; le second suppose que l’administré savait ou aurait dû se rendre compte que sa demande n’avait pas de chance d’aboutir.

Faits

En 2019, un étudiant débute un cursus de master en sciences de l’environnement à l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ). L’étudiant souffre de troubles cognitifs depuis un accident.

En 2020, il formule une demande afin d’obtenir une carte de stationnement automobile sur la base de la loi fédérale sur l’égalité des inégalités frappant les personnes handicapées (LHand). Il souhaite éviter les trains bondés en raison de la pandémie COVID-19. Tant l’EPFZ que la Commission de recours de l’EPFZ rejettent le demande. Ces dernières estiment qu’il n’existe pas de lien entre le handicap de l’étudiant et la volonté de se protéger du virus.

En 2021, l’étudiant demande à nouveau une carte de stationnement. Il avance cette fois qu’il doit se rendre à un cours-bloc sur le campus de l’EPFZ ; d’habitude, il loge dans un hôtel qui a depuis fermé.… Lire la suite