Publications par André Lopes Vilar de Ouro

L’effet rétroactif du droit d’action directe du tiers lésé envers l’entreprise d’assurance (art. 60 al. 1bis LCA)

TF, 27.01.2025, 4A_189/2024*

L’art. 103a LCA prévoit une règlementation exhaustive du droit transitoire. Partant, le droit d’action directe de l’art. 60 al. 1bis LCA n’est pas ouvert aux contrats conclus avant la révision partielle de la Loi sur le contrat d’assurance entrée en vigueur le 1er janvier 2022.

Faits 

Le 26 février 2014, un médecin opère la main droite de sa patiente. Quelques jours plus tard, la patiente quitte la clinique. Le rapport de sortie indique que l’évolution postopératoire a été marquée par des douleurs extrêmement fortes. 

Par requête du 27 avril 2023, la patiente fait valoir auprès du Tribunal de commerce du canton de Berne des prétentions contre l’assurance responsabilité civile du médecin fondées sur l’art. 60 al. 1bis LCA, entré en vigueur le 1er janvier 2022. Elle demande que l’assurance soit condamnée à lui verser CHF 35’000 à titre de réparation du tort moral résultant de l’opération du 26 février 2014. Par décision du 6 mars 2024, le Tribunal de commerce du canton de Berne rejette la demande faute de légitimation passive de la défenderesse.

La patiente exerce un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’art.Lire la suite

La sauvegarde du délai de péremption suite au retrait de la requête de conciliation

TF, 06.11.2024, 5A_441/2024*

Un délai de péremption est sauvegardé si le demandeur dépose une requête de conciliation avant l’échéance du délai, la retire suite à un accord sur la renonciation à la procédure de conciliation et dépose dans les 30 jours une nouvelle requête de conciliation accompagnée d’une demande. 

Faits 

Le 10 décembre 2019, des héritiers déposent une requête en conciliation auprès du Tribunal de première instance de Genève. Cette requête vise à déterminer si les testaments du de cujus sont nuls ou réductibles en ce qu’ils contreviennent au pacte successoral rédigé quelques années auparavant (cf. art. 494 al. 3 CC).  

Les parties à la procédure renoncent à la conciliation. Les héritiers demandeurs requièrent la délivrance de l’autorisation de procéder alors que le défendeur observe qu’il n’y a pas lieu de délivrer une autorisation de procéder, car les demandeurs peuvent introduire une demande directement auprès de l’instance compétente. Par la suite, les demandeurs confirment qu’ils retirent leur requête de conciliation et prient le tribunal de leur faire parvenir un jugement de retrait indiquant que les parties ont renoncé à la procédure de conciliation et qu’une action peut être directement déposée auprès du Tribunal de première instance.

Par jugement du 24 mars 2021, vu notamment le dépôt de la requête de conciliation, l’accord des parties pour renoncer à la procédure de conciliation et le retrait de la requête de conciliation, le tribunal donne acte aux parties de ce qu’elles ont renoncé à la procédure de conciliation, constate que la procédure devient sans objet et raye la cause du rôle.… Lire la suite

La compétence du tribunal pour la provisio ad litem

TF, 21.11.2024, 5A_435/2023*

Dans une procédure de divorce, une fois qu’il est saisi de la cause, le tribunal de deuxième instance est compétent pour statuer sur les mesures provisionnelles et en particulier sur la provisio ad litem (art. 276 CPC). Le droit cantonal ne peut pas prévoir un système différent.

Faits 

Le Bezirksgericht de Laufenburg prononce le divorce de deux époux. Ceux-ci font appel du jugement devant l’Obergericht du canton d’Argovie. Dans le cadre de la procédure d’appel, l’un des époux demande au Bezirksgericht de Laufenburg l’octroi d’une provisio ad litem d’un montant total de CHF 80’000. Le Bezirksgericht n’entre pas en matière. Il estime qu’il n’est pas compétent pour statuer sur les demandes de provisio ad litem dans le cadre d’une procédure d’appel pendante selon le droit cantonal applicable.

L’Obergericht admet l’appel du demandeur et renvoie l’affaire au Bezirksgericht. Il met à la charge du défenseur les frais de jugement de CHF 1’500 et l’oblige à verser une indemnité de partie de CHF 1’050 au représentant juridique du demandeur.

Le défendeur recourt au Tribunal fédéral qui doit se déterminer pour la première fois sur la question de savoir quelle instance est compétente pour juger d’une demande de provisio ad litem lorsque la procédure de divorce est pendante en deuxième instance.… Lire la suite

La compétence du juge unique pour le prononcé d’une expulsion et d’une peine pécuniaire (art. 19 al. 2 let. b CPP)

ATF 150 IV 447 | TF, 04.09.2024, 6B_1377/2023*

L’examen du respect de la limite maximale de deux ans de peine privative de liberté s’agissant de la compétence du juge unique (art. 19 al. 2 let. b CPP) ne doit pas se fonder sur l’ensemble des sanctions. La compétence du juge unique dépend uniquement de la durée de la peine privative de liberté requise ou prononcée. Elle s’étend donc également au prononcé d’une expulsion.

Faits

Le juge unique du Tribunal régional de l’Emmental-Haute Argovie condamne une personne à une peine privative de liberté de 23 mois et à une peine pécuniaire de 100 jours-amende à 30 francs, dans les deux cas avec un sursis de deux ans, ainsi qu’à une amende de 700 francs. Il prononce également une expulsion pour une durée de six ans avec inscription dans le Système d’information Schengen. Sur appel du condamné, la Cour suprême du canton de Berne confirme la décision attaquée.

Le condamné forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit se déterminer pour la première fois sur la question de savoir si une peine pécuniaire requise ou prononcée en même temps qu’une peine privative de liberté ainsi qu’une expulsion doivent être prises en compte dans le cadre de la limite supérieure de deux ans prévue à l’art.Lire la suite

Le consentement à une clause d’arbitrage et la sentence incompatible avec l’ordre public matériel

ATF 151 III 53 | TF, 05.09.2024, 4A_136/2024*

Lorsqu’elle n’a pas signé de document renvoyant directement ou indirectement à une clause d’arbitrage, une athlète peut, suivant les circonstances, manifester son acceptation de la compétence du TAS par son comportement en procédure. En outre, le fait de ne pas opérer de distinction entre les jeunes athlètes et les autres athlètes en matière de sanctions antidopage n’est pas incompatible avec l’ordre public matériel.

Faits

En décembre 2021, une patineuse remporte le programme libre lors des championnats russes de patinage artistique. A l’issue de sa prestation, elle fait l’objet d’un contrôle antidopage. Elle est alors âgée de 15 ans et 8 mois.

En février 2022, l’agence russe antidopage (Russian Anti-Doping Center Agency) informe la patineuse que le contrôle révèle la présence de trimétazidine, une substance proscrite par l’agence russe. Celle-ci suspend provisoirement la patineuse sur la base du Règlement antidopage russe (All Russian Anti-Doping Rules). Il s’ensuit une première procédure devant le Chambre ad hoc du Tribunal Arbitral du Sport (TAS), qui conduit au refus de suspendre provisoirement la patineuse. Cette dernière peut donc participer aux Jeux Olympiques de Pékin 2022.

Après la fin des Jeux Olympiques, le laboratoire désigné pour le contrôle antidopage confirme la présence de trimétazidine dans l’échantillon prélevé en décembre 2021.… Lire la suite