La reconnaissance des mesures provisionnelles ordonnées ex parte

TF, 12.08.2024, 5A_94/2024*

Les mesures provisionnelles ordonnées ex parte sont susceptibles d’être reconnues et exécutées selon les art. 32 ss CL lorsque leur reconnaissance est requise au terme d’une procédure d’opposition contradictoire respectant le droit d’être entendue de la partie contre laquelle elles sont prononcées.

Faits 

En 2018, le Tribunal de Bologne prononce un decreto ingiuntivo telematico provvisoriamente esecutivo immédiatement exécutoire, ordonnant à un débiteur de payer un montant de plus de € 16 millions. À la suite de l’opposition de celui-ci, le tribunal italien confirme ce decreto en 2021. Le débiteur interjette appel de cette décision. Cette procédure est pendante. À la teneur des attestations délivrées conformément à l’art. 54 CL, le decreto ainsi que la décision sur opposition sont exécutoires en Italie. 

En 2023, le créancier requiert le séquestre d’avoirs du débiteur détenus en Suisse, ainsi que la reconnaissance et l’exequatur du decreto auprès du Tribunal de première instance de Genève. Par deux ordonnances séparées, ce dernier ordonne le séquestre et déclare le decreto exécutoire en Suisse. 

Le débiteur forme alors recours auprès de la Cour de justice genevoise contre l’ordonnance déclarant le decreto exécutoire en Suisse. À la suite du rejet du recours par la Cour de justice, le débiteur porte l’affaire devant Tribunal fédéral.Lire la suite

La fixation de la sûreté pour les frais non couverts par la masse en faillite (art. 230 al. 2 LP)

TF, 06.11.2024, 5A_376/2024*

Les frais de réalisation des objets mis en gage ne doivent pas être couverts par la masse en faillite. Ils ne font pas partie des frais non couverts par la masse au sens de l’art. 230 al. 2 LP et ne doivent donc pas être pris en compte lors de la fixation du montant de la sûreté.

Faits

Le Kantonsgericht du canton de Zoug refuse le sursis concordataire définitif à une entreprise et ouvre une procédure de faillite à son encontre. L’Obergericht rejette le recours formé par l’entreprise. L’Office des faillites du canton de Zoug dresse l’inventaire des biens faisant partie de la masse en faillite. Dans cet inventaire figurent entre autres des immeubles en Allemagne. L’Office des faillites publie dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) la suspension de la procédure de faillite de l’entreprise, faute d’actifs, à moins qu’un créancier n’en exige l’exécution dans les dix jours et ne fournisse une sûreté de CHF 200’000 pour couvrir les frais.

Deux créanciers recourent contre cette décision auprès de l’Obergericht du canton de Zoug. Ils demandent que la décision de l’Office des faillites soit annulée et que la sûreté soit fixée à CHF 0, subsidiairement au maximum à CHF 12’000.… Lire la suite

La hausse de loyer admissible suite à la rénovation d’un appartement

TF, 30.07.2024, 4A_75/2022*

La nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral concernant le rendement net admissible des fonds propres s’applique au rendement admissible pour le calcul d’une hausse de loyer motivée par des investissements à plus-value. Partant, le calcul du rendement de l’investissement à plus-value se fonde sur un rendement de 2% en sus du taux hypothécaire de référence (si celui-ci est inférieur ou égal à 2%).

Faits

En 1983, les parties concluent un contrat de bail portant sur un appartement de 5 pièces à Genève. Quelques années plus tard, la bailleresse indexe le loyer en se réservant le droit d’augmenter le loyer en cours de bail en cas de prestations supplémentaires de sa part. Les locataires ne s’opposent pas.

En 2015, la bailleresse rénove entièrement l’appartement. En 2019, elle adresse un avis de majoration de loyer en raison des prestations supplémentaires qu’elle a fournies. Le loyer passe de CHF 905 à CHF 1’420 par mois.

Les locataires contestent l’augmentation de loyer en commission de conciliation et demandent simultanément une réduction de loyer en raison de la baisse du taux hypothécaire de référence. Non conciliée, la cause est portée devant le Tribunal des baux et loyers de Genève.

Le Tribunal des baux et loyers fixe le loyer mensuel à CHF 1’117.… Lire la suite

Les conditions de la détention avant jugement fondée sur un risque simple de récidive (art. 221 al. 1 let. c CPP)

TF, 19.11.2024, 7B_1035/2024*

Suite à l’entrée en vigueur de la révision du CPP, le Tribunal fédéral modifie sa jurisprudence relative à l’art. 221 al. 1 let. c CPP. Un prévenu ne peut être placé en détention avant jugement en raison d’un risque simple de récidive que s’il a été auparavant condamné pour au moins deux infractions du même genre dans des décisions passées en force.

Faits

Le ministère public du canton de Zurich condamne un prévenu par ordonnance pénale à une peine pécuniaire pour lésions corporelles simples et rixe.

Quelques mois plus tard, le ministère public ouvre une autre procédure pénale contre le même prévenu pour des faits d’agression. Le tribunal des mesures de contrainte du canton de Zurich place le prévenu en détention provisoire en raison d’un risque de collusion. Par la suite, le prévenu fait des aveux et forme une demande de mise en liberté. Le tribunal des mesures de contrainte rejette cette demande au motif qu’un risque de récidive simple existe (art. 221 al. 1 let. c CPP).

L’Obergericht du canton de Zurich ayant confirmé cette décision, le prévenu interjette recours au Tribunal fédéral, lequel est amené à revenir sur sa jurisprudence relative à l’exigence d’infractions préalables de l’art.Lire la suite

La renonciation au versement d’indemnités forfaitaires (art. 89b LAsi)

TF, 22.02.2024, 2C_692/2022*

Des impératifs médicaux entraînant l’inexécution d’un transfert Dublin par un canton doivent être dûment établis pour être admis comme motifs justificatifs au sens de l’art. 89b LAsi. A défaut, le SEM est fondé à suspendre le versement de subventions fédérales et à en demander le remboursement.

Faits

En août 2015, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) rejette la demande d’asile introduite par un ressortissant turc attribué au canton de Neuchâtel. Tant la demande de réexamen que le recours au TAF introduits par le requérant d’asile sont par la suite également rejetés.

Une première tentative de transfert du requérant vers la Bulgarie échoue en raison de sa disparition, suivie d’une tentative de suicide et d’une brève hospitalisation. Placé en détention administrative, le requérant est transféré dans une unité psychiatrique suite à une nouvelle tentative de suicide. Un vol accompagné est annulé, le SEM n’ayant pas pu obtenir l’assentiment du corps médical à l’exécution du transfert. Le requérant est libéré de détention administrative en juillet 2016.

Le 27 octobre 2017, le SEM constate que le délai pour exécuter le transfert vers la Bulgarie est échu. Au terme d’une nouvelle procédure, il reconnait la qualité de réfugié au demandeur et lui accorde l’asile en Suisse.… Lire la suite