Le demandeur débiteur de frais d’une procédure antérieure dont le paiement n’a jamais été réclamé

ATF 148 III 42TF, 09.09.2021, 4A_647/2020*

L’hypothèse de l’art. 99 al. 1 let. c CPC est réalisée lorsque le demandeur est débiteur de frais relatifs à un jugement entré en force de chose jugée et exécutoire. Une mise en demeure ultérieure du débiteur n’est pas exigée.

Faits

Une société suisse conclut un contrat de distribution exclusive avec une société britannique. Les parties conviennent d’une élection de for à Genève.

En 2019, la société suisse attrait la société britannique en paiement devant le Tribunal de première instance de Genève. Dans sa réponse, la société britannique prend des conclusions reconventionnelles. La société suisse requiert alors le versement par la société britannique de sûretés en garantie des dépens, en raison du siège à l’étranger de cette dernière (cf. art. 99 al. 1 let. a CPC). Appelée à se déterminer sur cette requête, la société britannique conclut à son rejet et formule à son tour une requête de sûretés en garantie des dépens, au motif que la société suisse est débitrice de frais d’une procédure antérieure (cf. art. 99 al. 1 let. c CPC).

Par ordonnances, le Tribunal de première instance fait droit à la requête en constitution de sûretés formée par la société britannique et rejette celle de la société suisse.… Lire la suite

Le tribunal de première instance n’est pas compétent pour trancher une demande de récusation visant le ministère public

ATF 148 IV 17 | TF, 05.11.2021, 1B_333/2021*

Lorsqu’une demande de récusation est introduite contre un·e procureur·e après que le ministère public a engagé l’accusation, c’est l’autorité de recours et non le tribunal de première instance qui est compétent pour examiner cette question, conformément au texte clair de l’art. 59 al. 1 let b CPP

Faits

Le Ministère public zurichois engage l’accusation contre un prévenu devant le tribunal d’arrondissement de Horgen. Deux jours plus tard, le prévenu demande la récusation du procureur en charge, laquelle est refusée par le tribunal d’arrondissement de Horgen.

Le prévenu introduit un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si l’instance précédente, en sa qualité de tribunal de première instance, était compétente pour examiner la demande de récusation.

Droit

Le Tribunal fédéral procède à l’interprétation de l’art. 59 al. 1 let. b CPP, qui prévoit notamment que lorsqu’un motif de récusation au sens de l’art. 56 let. a CPP concernant le ministère public est invoqué, le litige est tranché sans administration supplémentaire de preuves et définitivement par l’autorité de recours.

Le texte de la loi est clair. Il n’est donc possible de s’en écarter que s’il existe une raison sérieuse de penser que le texte ne vise pas le sens véritable de la réglementation.… Lire la suite

L’intervention accessoire d’un héritier dans une procédure pour carence d’organisation d’une société (art. 731b CO)

TF, 27.10.2021, 4A_147/2021*

Un héritier, membre d’une communauté héréditaire détenant collectivement une société anonyme, peut intervenir à titre individuel dans un procès intenté par l’exécuteur testamentaire à l’encontre de cette société pour carence d’organisation (art. 731b CO).

Faits

Deux héritiers, membres d’une communauté héréditaire, possèdent collectivement la totalité des actions d’une société détenant un immeuble à Genève. Ils sont en conflit depuis de nombreuses années.

Lors d’une assemblée générale, un des héritiers s’oppose à la vente de l’immeuble propriété de la société. Suite à ce refus, l’unique membre du conseil d’administration de la société démissionne. L’exécuteur testamentaire demande alors au Tribunal de première instance du canton de Genève de nommer un nouvel administrateur afin de pallier la carence d’organisation de la société (art. 731b al. 1 CO).

Dans ce contexte, un des héritiers dépose une demande d’intervention accessoire à la procédure (art. 74 CPC). En sa qualité d’actionnaire, il souhaite s’assurer que le conseil d’administration désigné soit impartial.

Le Tribunal de première instance déclare la requête en intervention accessoire de l’héritier irrecevable. Il estime que son intervention n’est ni destinée à défendre les intérêts de l’exécuteur testamentaire, ni ceux de la société et serait ainsi contraire à l’art.Lire la suite

Les données clients remises aux autorités américaines : un contournement de l’entraide pénale ?

ATF 148 IV 66 | TF, 01.11.2021, 6B_216/2020*

L’art. 271 al. 1 ch. 1 CP (actes exécutés sans droit pour un État étranger) trouve application lorsqu’une personne remet à une autorité étrangère des données non librement accessibles, alors que la remise de ces données devait avoir lieu par la voie de l’entraide ou de l’assistance internationale.

Droit

Dans le cadre du conflit fiscal entre la Suisse et les États-Unis, une société suisse de gestion de fortune constate qu’un certain nombre de ses clients ne sont pas déclarés auprès du fisc américain. Le président du conseil d’administration de la société se dénonce auprès du Department of Justice américain (DoJ) en vue d’un Non-Prosecution Agreement. Cette autorité refuse de déposer une demande d’assistance administrative ou judiciaire afin d’obtenir les dossiers des clients non déclarés.

Le président du conseil d’administration de la société se rend alors aux États-Unis. Il transmet une clé USB qui contient les noms de 109 clients au DoJ, sans avoir préalablement obtenu une autorisation au sens de l’art. 271 ch. 1 CP.

La FINMA dénonce l’administrateur au Ministère public de la Confédération (MPC). L’autorité pénale ouvre une procédure à son encontre pour violation de l’art.Lire la suite

Le sort des sûretés en garantie des dépens en cas de consorité simple

ATF 147 III 529 | TF, 19.10.2021, 4A_497/2020*

Les demandeurs agissant en consorité simple (art. 71 CPC) – dont chacun remplit au moins l’une des conditions prévues à l’art. 99 al. 1 CPC – ne peuvent être astreints solidairement à fournir des sûretés en garantie des dépens. Le juge doit fixer le montant des sûretés individuellement pour chaque consort en fonction de la part des dépens qu’il pourrait être amené à supporter à l’issue du procès.

Faits

En 2018, sept consorts déposent devant le Tribunal de première instance du canton de Genève une action en constatation de droit négative (art. 88 CPC) à l’encontre de deux personnes physiques et cinq sociétés affiliées. L’action tend à ce qu’il soit constaté que les demandeurs n’ont aucune dette de quelque sorte envers les défendeurs en lien avec la vente de tableaux d’artistes renommés.

Par ordonnance du 12 mars 2020, rendue sur requête des défendeurs, le Tribunal de première instance astreint les demandeurs, chacun individuellement, à fournir des sûretés en garantie des dépens d’un montant de CHF 120’500 .

Statuant sur le recours interjeté par les demandeurs à l’encontre de cette décision, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève réforme la décision de première instance.… Lire la suite