Publications par André Lopes Vilar de Ouro

Le consentement et la traite d’êtres humains (art. 182 CP)

TF, 07.04.2025, 6B_296/2024*

Le consentement de la victime n’exclut la commission de l’infraction que s’il a été donné en toute liberté et en toute connaissance de ses effets. L’examen de la validité du consentement de la victime doit porter sur le moment où la victime a été enrôlée. Partant, les éléments de fait intervenus postérieurement ne sont pas déterminants.

Faits

Une personne se rend en Suisse en août 2011 et vit dans l’appartement familial d’un couple entre 2011 et 2017, période durant laquelle elle participe aux tâches ménagères du logement et s’occupe de leurs enfants. En juin 2018, elle dépose plainte contre le couple pour traite d’êtres humains, voies de fait, menaces et injures.

Le Tribunal criminel des Montagnes et du Val-de-Ruz reconnaît le couple coupable d’infraction à la Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration, respectivement de complicité. La Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel rejette les appels formés par la victime ainsi que par le Ministère public.

La victime forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral.

Droit

En substance, la recourante fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir retenu l’infraction de traite d’êtres humains à l’encontre du couple.… Lire la suite

L’irrecevabilité d’un appel joint sur un appel joint

TF, 24.02.2025, 6B_37/2024*

Le fait que l’appel joint permette à la partie intimée à l’appel principal d’y réagir et d’en élargir l’objet ne permet pas d’admettre un droit pour l’auteur de l’appel principal d’y réagir à son tour par un appel joint à l’appel joint.

Faits

Le Tribunal d’arrondissement de l’Est vaudois reconnaît un prévenu coupable de diverses infractions. Le prévenu dépose une annonce d’appel suivie d’une déclaration d’appel. Deux victimes, agissant conjointement, déposent un appel joint. Le prévenu dépose ensuite un acte intitulé « appel joint à un appel joint ». La Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal vaudois déclare cet acte irrecevable.

Le prévenu forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit se déterminer pour la première fois sur la question de la recevabilité d’un appel joint sur un appel joint.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que, conformément à l’art. 399 al. 3 CPP, la partie qui annonce l’appel adresse une déclaration d’appel écrite à la juridiction d’appel dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé. Dans sa déclaration, elle indique si elle entend attaquer le jugement dans son ensemble ou seulement sur certaines parties (let.… Lire la suite

La location de services à Uber

TF, 05.02.2025, 2C_46/2024*

En raison de la cession de l’essentiel des pouvoirs de direction en faveur de Uber, l’activité de Chaskis SA relève de la location de services au sens de la Loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services (LSE) et, partant, est soumise à autorisation.

Faits

L’Office cantonal de l’emploi du canton de Genève retient que la société Chaskis SA met à la disposition de Uber son personnel pour réaliser des livraisons de repas commandés sur l’application Uber Eats, en contrepartie du paiement par Uber d’un montant par livraison effectuée, et l’assujettit à la Loi fédérale du 6 octobre 1989 sur le service de l’emploi et la location de services (LSE). Sur cette base, elle prononce une interdiction de pratiquer toute activité jusqu’à l’obtention de l’autorisation selon la LSE.

La Cour de justice du canton de Genève rejette le recours de Chaskis SA.

Chaskis SA exerce un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’activité de mise à disposition des livreurs de Chaskis SA en faveur de Uber relève du régime de la location de services, soumis à autorisation.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que selon l’art.Lire la suite

La voie de recours ouverte à un Etat pour faire valoir son immunité juridictionnelle en procédure arbitrale internationale

TF, 16.01.2025, 4A_163/2023*

La décision par laquelle le juge d’appui refuse de nommer un arbitre en matière d’arbitrage international est directement attaquable devant le Tribunal fédéral, y compris lorsque le juge d’appui qui rend cette décision n’est pas un tribunal supérieur au sens de l’art. 75 al. 2 LTF. De plus, pour que l’on puisse admettre une renonciation de la part d’un État à se prévaloir de son immunité, il doit avoir conclu par écrit un accord d’arbitrage au sens de l’art. 17 CNUIJE.

Faits

Une société de droit suisse engage une procédure d’arbitrage contre une société étrangère. Cette dernière appelle en cause un État et prend des conclusions reconventionnelles à son encontre. La société étrangère saisit le Tribunal de première instance genevois d’une requête en nomination d’arbitres dirigée contre la société de droit suisse et l’État en invoquant l’existence d’un for de nécessité en Suisse.

Par ordonnance du 31 octobre 2022, le Tribunal de première instance rejette la requête de l’État tendant à la limitation de la procédure à l’examen de son immunité juridictionnelle.

La Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève déclare irrecevable l’appel interjeté par l’État à l’encontre de l’ordonnance du 31 octobre 2022.… Lire la suite

L’effet rétroactif du droit d’action directe du tiers lésé envers l’entreprise d’assurance (art. 60 al. 1bis LCA)

TF, 27.01.2025, 4A_189/2024*

L’art. 103a LCA prévoit une règlementation exhaustive du droit transitoire. Partant, le droit d’action directe de l’art. 60 al. 1bis LCA n’est pas ouvert aux contrats conclus avant la révision partielle de la Loi sur le contrat d’assurance entrée en vigueur le 1er janvier 2022.

Faits 

Le 26 février 2014, un médecin opère la main droite de sa patiente. Quelques jours plus tard, la patiente quitte la clinique. Le rapport de sortie indique que l’évolution postopératoire a été marquée par des douleurs extrêmement fortes. 

Par requête du 27 avril 2023, la patiente fait valoir auprès du Tribunal de commerce du canton de Berne des prétentions contre l’assurance responsabilité civile du médecin fondées sur l’art. 60 al. 1bis LCA, entré en vigueur le 1er janvier 2022. Elle demande que l’assurance soit condamnée à lui verser CHF 35’000 à titre de réparation du tort moral résultant de l’opération du 26 février 2014. Par décision du 6 mars 2024, le Tribunal de commerce du canton de Berne rejette la demande faute de légitimation passive de la défenderesse.

La patiente exerce un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’art.Lire la suite