Entrées par André Lopes Vilar de Ouro

Le contrôle de vitesse par véhicule-suiveur en tant que moyen de preuve

TF, 17.05.2024, 6B_1065/2023*

En cas de contrôle de vitesse réalisé au moyen d’un véhicule-suiveur par simple comparaison avec son propre compteur, l’autorité dispose dun libre pouvoir d’appréciation des preuves afin de déterminer si la distance de mesure est suffisante. Un dépassement de vitesse de plus de 50 % doit être qualifié de « massif » au sens de lart. 7 al. 3 OOCCR-OFROU.

Faits

Un conducteur circule au volant de son véhicule. Une patrouille de police en voiture banalisée le suit et mesure sa vitesse par comparaison avec son propre compteur. Le véhicule suivi atteint une vitesse de 135 km/h, puis une vitesse de 145 km/h (vitesses constatées sur le compteur du véhicule de police) alors que la vitesse autorisée était de 80 km/h sur le tronçon concerné. Les agents de police mesurent cette vitesse constante sur une distance d’environ 200 mètres. Après déduction de la marge de sécurité, l’autorité retient une vitesse finale de 122 km/h, soit un dépassement de vitesse de 42 km/h sur un tronçon de 200 mètres.

Par jugement rendu sur opposition à l’ordonnance pénale, le Tribunal régional Jura bernois-Seeland reconnait le conducteur coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art.Lire la suite

La levée anticipée du secret professionnel de l’avocat en vue du recouvrement d’honoraires

TF, 05.04.2024, 2C_257/2023*

La levée du secret professionnel de l’avocat par le client en vue du recouvrement d’honoraires avant la survenance du litige est en principe inadmissible. L’avocat peut s’exposer à des sanctions disciplinaires.

Faits

Un avocat conclut un contrat de mandat avec son client. Le contrat contient une clause de levée anticipée du secret professionnel, dont la teneur est la suivante :

«  Für die Geltendmachung oder die Abwehr von Ansprüchen aus diesem Auftragsverhältnis ist der Beauftragte vom Berufsgeheimnis befreit, soweit dies zur Durchsetzung seiner Ansprüche notwendig ist. »

(Traduction libre : «  Le mandataire est délié du secret professionnel pour faire valoir ou se défendre à l’encontre de prétentions issues du présent mandat, dans la mesure où cela est nécessaire pour la mise en oeuvre de ses droits.  »)

L’avocat dépose une demande de conciliation contre son client afin de recouvrir une créance d’honoraires résultant de son activité. L’Ordre des avocats du canton de Saint-Gall ouvre alors une procédure disciplinaire contre l’avocat au motif d’une potentielle violation du secret professionnel.

A la suite de la procédure disciplinaire, l’Ordre des avocats du canton de Saint-Gall constate une violation de l’art. 13 al. 1 LLCA et prononce une amende de CHF 1’000.-.… Lire la suite

La discrimination et incitation à la haine (art. 261bis al. 1 CP)

TF, 11.03.2023, 6B_1323/2023*

L’acception du terme “queer” comprend aussi bien l’orientation sexuelle que l’identité sexuelle de telle sorte que la communauté queer doit être comprise comme un groupe protégé par l’art. 261bis al. 1 CP.

Faits

En septembre 2021, le polémiste Alain Soral tient les propos suivants en réaction à la publication d’un article :

« Je crois que cet article à charge est relativement malhonnête et mensonger et aussi signé par une militante communautaire, qui est une militante queer qui se bat aussi pour les migrants. Donc voilà face à quoi on est. Moi je suis un Suisse dans mon pays, qui défend l’âme suisse et l’esprit suisse, dans la grande tradition, je dirais, de Jean-Jacques Rousseau, et je suis face à des gens qui à mon avis sont ultraminoritaires. Et je rappelle que queer en anglais ça veut dire, je crois, désaxé. Donc je pense qu’entre ma vision du monde et celle d’une grosse lesbienne militante pour les migrants, je pense que je suis plus, moi, un combattant pour la paix, la fraternité et l’âme suisse que ceux qui aujourd’hui me font face et qui me harcèlent, alors que je ne leur ai rien demandé ».

Le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne acquitte le polémiste du chef d’accusation de discrimination et incitation à la haine (art.Lire la suite

La personnalisation d’un produit de marque sans l’accord du titulaire de la marque concernée est-elle licite ?

TF, 19.01.2023, 4A_171/2023*

La personnalisation d’une montre de marque, effectuée à la demande et pour le compte de son propriétaire en vue de son usage personnel, ne porte en principe pas atteinte à la fonction distinctive de la marque car l’objet modifié est destiné à un usage privé et n’est pas remis sur le marché. En revanche, le fait de commercialiser des montres modifiées sur lesquelles apparaît toujours la marque contrevient en principe à la LPM, faute d’autorisation du titulaire de la marque.

Faits

Une société active dans la transformation de montres propose un service de personnalisation de montres de luxe, essentiellement produites par Rolex, en changeant certaines pièces et en leur donnant une nouvelle apparence conformément aux souhaits exprimés par ses clients. La marque de la société figure ainsi à côté de la marque Rolex sur le produit personnalisé. De plus, afin de promouvoir ses services, la société affiche sur son site internet les montres fabriquées par Rolex ainsi que ses marques. En juin 2020, Rolex met en demeure la société de cesser toutes ses activités en lien avec des montres de sa marque.

En qualité d’instance cantonale unique, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève interdit à la société tout usage par apposition ou réapposition, dans le commerce, de marques appartenant à Rolex et à l’interdiction de tout usage, dans le commerce, de marques appartenant à Rolex en vue d’offrir et de promouvoir, y compris sur internet, des services de personnalisation de montres.… Lire la suite

Le calcul du délai de trois ans pour l’inscription d’une hypothèque légale de la communauté des propriétaires par étages selon l’art. 712i al. 1 CC

TF, 8.11.2023, 5A_357/2022*

Le délai de trois ans prévu à l’art. 712i al. 1 CC doit être calculé rétroactivement à partir du jour du dépôt de la requête d’inscription de l’hypothèque légale de la communauté des propriétaires par étages.

Faits

Après avoir déposé une requête d’inscription provisoire le 16 novembre 2017 et obtenu son inscription le 28 février 2019, une communauté de copropriétaires par étages intente une action en vue notamment de l’inscription définitive de l’hypothèque sur l’immeuble de l’un des copropriétaires pour la somme de CHF 24’438.49 due en raison d’un défaut de paiement des contributions aux charges depuis août 2014.

Le 4 mai 2020, le tribunal d’arrondissement compétent condamne notamment le copropriétaire par étages à payer à la communauté le montant de CHF 24’438.49 avec intérêts et ordonne l’inscription définitive de l’hypothèque légale.

Débouté en deuxième instance, le propriétaire intéressé interjette un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral et demande, entre autres, le rejet de la demande d’inscription définitive de l’hypothèque légale. Le Tribunal fédéral doit déterminer si le calcul du délai de trois ans prévu à l’art. 712i al. 1 CC est correct.

Droit

Conformément à l’art. 712i al. 1 CC, la communauté peut requérir l’inscription d’une hypothèque sur la part de chaque copropriétaire actuel pour garantir son droit aux contributions des trois dernières années.… Lire la suite