La voie de droit à l’encontre d’une décision de radiation du rôle (art. 242 CPC)

ATF 148 III 186TF, 18.01.2021, 4A_169/2021*

La décision de radiation du rôle rendue après que la cause est devenue sans objet (art. 242 CPC) est sujette à appel ou recours, en fonction de la valeur litigieuse.

Faits

Un employé travaille depuis 2016 auprès d’une société. Il perçoit un salaire annuel de CHF 130’000 bruts, auquel s’ajoute une composante variable pay.

La relation de travail se termine le 31 janvier 2018. Invoquant un résultat d’exercice négatif, la société ne verse aucun bonus pour l’année 2017 et pour janvier 2018.

L’employé saisit la justice et réclame le paiement de CHF 26’400.45 à titre de salaire variable pour l’année 2017, ainsi que CHF 2’220 pour l’année 2018. Les instances cantonales qualifient la rémunération réclamée de gratification convenue (unechte Gratifikation) et admettent la demande. La demande relative à l’année 2018 est rayée du rôle après que la société a payé à l’employé un montant à ce titre en cours de procédure. Sur ce point, l’appel de la société est déclaré irrecevable.

La société porte l’affaire devant le Tribunal fédéral qui est amené à préciser, s’agissant du bonus relatif à l’année 2018, quel est le moyen de droit pour attaquer la décision rayant la demande du rôle.… Lire la suite

Changement d’étude : pas de conflit d’intérêts sans connaissance effective du dossier

TF, 06.05.2022, 5A_407/2021

Il n’existe pas de conflit d’intérêts justifiant une interdiction de postuler du seul fait qu’un·e avocat·e ayant effectué son stage au sein d’une étude devient collaborat·eur·rice d’une autre étude qui représente une partie adverse de la première.

Faits

Le Tribunal de première instance du canton de Genève prononce le divorce de deux époux. Contre ce jugement, l’ex-mari introduit un appel devant la Chambre civile de la Cour de justice, puis un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.

Au stade de la procédure devant le Tribunal fédéral, l’ex-épouse intimée requiert qu’il soit constaté que le recourant n’est pas valablement représenté. En effet, l’acte de recours a été signé par une collaboratrice ayant effectué son stage d’avocate au sein de l’étude de l’avocate de l’intimée. Selon l’intimée, il ne peut pas être exclu que la collaboratrice concernée ait pris connaissance du dossier durant son stage.

Droit  

Le Tribunal fédéral rappelle que, dans le cadre d’une procédure pendante, l’autorité qui doit statuer sur la capacité de postuler de l’avocat·e d’une partie est le tribunal compétent au fond ou un·e membre de ce tribunal (ATF 147 III 351, résumé in : LawInside.ch/1058). Le Tribunal fédéral est donc compétent en l’espèce.… Lire la suite

Gestation pour autrui à l’étranger et filiation (2/2) : l’établissement de la filiation face au principe ‘mater semper certa est’

ATF 148 III 245 | TF, 07.02.22, 5A_545/2020*

Lorsque, en cas de gestation pour autrui (GPA) à l’étranger, la filiation de l’enfant avec les parents d’intention est analysée sous l’angle du droit suissele principe ‘mater semper certa est’ (art. 252 al. 1 CC) est applicable nonobstant la présence d’un lien génétique entre la mère d’intention et l’enfant né par GPA. Par conséquent, la mère porteuse est la mère juridique de l’enfant né par GPA de par la loi. Alors que le contrat de GPA peut constituer une reconnaissance d’enfant valable du père d’intention génétiquement lié à l’enfant, ce n’est pas le cas en ce qui concerne la mère d’intention génétiquement liée à l’enfant. La voie de l’adoption des enfants de son conjoint (art. 264c ss CC) en vue de l’établissement d’un lien de filiation lui est toutefois en principe ouverte.

Faits 

Un couple marié composé d’une ressortissante suisse et turque et d’un ressortissant turc conclut un contrat de gestation pour autrui (GPA) avec une femme géorgienne. En 2019, la mère porteuse donne naissance à des jumeaux issus d’un don de sperme de l’époux ainsi que d’un don d’ovule de l’épouse. En d’autres termes, chaque parent d’intention a un lien génétique avec les jumeaux.… Lire la suite

Piscine naturelle non admise en zone agricole

TC FR, 24.05.2022, 602 2022 104

La construction d’une piscine naturelle en zone agricole n’est pas admissible au regard du droit fédéral (art. 24c et 24d LAT). Il ne convient pas de traiter différemment la construction d’une piscine naturelle d’une piscine ordinaire. Le fait qu’une piscine naturelle contribue à la biodiversité n’y change rien.

Faits

Les propriétaires d’une parcelle située en zone agricole demandent l’octroi d’un permis de construire pour une piscine naturelle. La piscine est composée de plusieurs bassins. Elle se filtre et se régénère d’elle-même, son équilibre biologique étant assuré par le biotope. Elle ne requiert aucun produit chimique pour son entretien.

La Direction du développement territorial, des infrastructures, de la mobilité et de l’environnement (DIME) délivre l’autorisation spéciale requise (cf. art. 25 al. 2 LAT). La DIME se fonde sur sa directive relative aux transformations de bâtiments selon l’art. 24c LAT qui prévoit l’admissibilité de telles piscines en zone agricole. La DIME estime notamment qu’une piscine naturelle favorise la biodiversité dans le milieu agricole.

La commune délivre le permis de construire.

L’Office fédéral du développement territorial (ARE) forme un recours au Tribunal cantonal fribourgeois. Celui-ci doit se prononcer sur l’admissibilité d’une piscine naturelle en zone agricole au regard des art.Lire la suite

Suspension d’une procédure d’assistance administrative en matière fiscale avec la Russie

TF, 31.05.2022, 2C_219/2022

En raison du contexte actuel de la guerre en Ukraine, il se justifie de suspendre une procédure d’assistance administrative internationale en matière fiscale initiée par une demande russe. Après quatre mois, la situation devra néanmoins être réexaminée.

Faits

En 2018, la Russie adresse une demande d’assistance administrative en matière fiscale à l’Administration fédérale des contributions (AFC) sur la base de l’art. 25a de la Convention de double imposition entre la Suisse et la Russie (CDI CH-RU).

La Russie souhaite obtenir des renseignements sur les comptes bancaires suisses de plusieurs sociétés chypriotes afin d’identifier les véritables bénéficiaires économiques de ces sociétés et le cas échéant de réévaluer l’impôt à la source prélevé par les autorités fiscales russes, suite au versement de dividendes par une société russe à ces sociétés.

En 2019, l’AFC accorde l’assistance administrative à l’autorité compétente russe. Les sociétés chypriotes forment un recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral, qui le rejette et confirme l’octroi de l’assistance administrative.

Les sociétés chypriotes recourent contre l’arrêt du TAF auprès du Tribunal fédéral et exigent la suspension de la procédure. Le Tribunal fédéral doit déterminer si une suspension de la procédure d’assistance administrative en matière fiscale avec la Russie s’avère nécessaire compte tenu de la guerre actuelle en Ukraine.Lire la suite