Arrêt Gaba (2/2): L’affectation notable de la concurrence

ATF 143 II 297 – TF, 28.06.2016, 2C_180/2014*

Faits

La société suisse Gaba International AG (« Gaba« ) produit et commercialise des produits d’hygiène dentaire, en particulier les produits Elmex. Elle conclut avec la société autrichienne Gebro Pharma GmbH (« Gebro ») un contrat portant sur la fabrication et la distribution en Autriche de ces produits. A teneur de ce contrat, Gebro s’engage à ne déployer son activité qu’en Autriche et à n’exporter ni directement ni indirectement les produits Elmex hors d’Autriche. Gaba s’engage pour sa part à empêcher par tous les moyens à sa disposition l’exportation des produits Elmex vers l’Autriche et à n’y distribuer lesdits produits ni directement ni indirectement.

La COMCO sanctionne Gaba pour restriction illicite de la concurrence. Gaba forme recours auprès du Tribunal administratif fédéral, puis du Tribunal fédéral.

Droit

Aux termes de l’art. 5 al. 1 LCart, les accords qui affectent de manière notable la concurrence sur le marché de certains biens ou services et qui ne sont pas justifiés par des motifs d’efficacité économique, ainsi que tous ceux qui conduisent à la suppression d’une concurrence efficace, sont illicites.

La recourante fait valoir que la concurrence n’est pas affectée par le contrat litigieux, puisque celui-ci n’a eu aucun impact effectif sur la concurrence.… Lire la suite

Un message publicitaire UDC constitutif d’une discrimination raciale

ATF 143 IV 193 | TF, 13.04.2017, 6B_610/2016*

Faits

Dans le contexte de la campagne de l’UDC pour «stopper l’immigration de masse», le parti politique publie sur son site internet et dans certains journaux une annonce publicitaire intitulée « voici les conséquences d’une immigration de masse incontrôlée ». En dessous du titre, en grandes lettres blanches sur fond noir, le message principal indique que «des Kosovars poignardent un Suisse» et que « quiconque ne le souhaite pas signe l’initiative populaire contre l’immigration de masse ». L’affiche décrit en outre un incident saurvenu avec des Kosovars : « Deux compagnons de lutte suisse, Roland (38) et Kari (45), sont assis le lundi 15 août sur une terrasse à Interlaken. Soudain, un taxi s’arrête devant eux et deux Kosovars (33 et 31 ans) en sortent. « Suisses de merde ! Salauds » disent-ils. Kari, douze fois titré en lutte suisse, répond alors « à quoi cela mène-t-il ? ». Un des deux Kosovars sort un couteau et le plante dans la gorge de Kari ».

Le Tribunal régional de Berne-Mittelland a reconnu le secrétaire général de l’UDC au moment de la publication de l’annonce, ainsi que sa suppléante, coupables de discrimination raciale (art.Lire la suite

La garantie de citation régulière (art. 27 al. 2 let. a LDIP)

ATF 143 III 225 | TF, 30.03.2017, 5A_889/2016*

Faits

Une société sise en Arabie saoudite forme devant le Tribunal de première instance de Dubaï une demande en paiement de CHF 150’000.- contre une société dont le siège est à Zoug en Suisse.

Le Tribunal dubaïote notifie les pièces du dossier à la défenderesse en Suisse et requiert de cette dernière qu’elle en accuse réception, ce à quoi la société ne donne pas suite. Un jugement par défaut est rendu par le Tribunal dubaïote, qui condamne la défenderesse à verser à la demanderesse le montant réclamé.

Sur requête de la demanderesse, le Tribunal de première instance de Zoug déclare le jugement dubaïote exécutoire en Suisse. Sur recours de la défenderesse, le Tribunal cantonal zougois refuse la reconnaissance du jugement dubaïote. Le Tribunal cantonal considère que la défenderesse n’a pas été citée régulièrement, car elle ne se serait pas vue communiquer par le Tribunal dubaïote une citation à comparaître ou un délai pour répondre à la demande en paiement (art. 27 al. 2 let. a LDIP).

La demanderesse forme un recours en matière civil au Tribunal fédéral qui doit déterminer si la défenderesse a été citée régulièrement dans la procédure judiciaire à Dubaï, respectivement si le jugement dubaïote doit être reconnu en Suisse (art.Lire la suite

La suspension des délais au recours contre un refus de séquestre

ATF 143 IV 357TF, 09.05.2017, 1B_35/2017*

Faits

Dans le contexte d’une enquête contre un contribuable, l’AFC perquisitionne des documents se trouvant dans une Etude d’avocat et notaire. Ces documents, dont trois enveloppes fermées, sont ensuite séquestrés. Suite à une opposition du contribuable, la Cour des plaintes lève les séquestres portant sur les enveloppes et ordonne leur restitution au plaignant le 12 décembre 2016.

Le 30 janvier 2016, l’AFC forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l’arrêt de la Cour des plaintes. Le Tribunal fédéral doit trancher la question de la recevabilité du recours, à savoir si la suspension des délais s’applique au recours contre un refus de séquestre.

Droit

L’art. 100 LTF prévoit que le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. Selon l’art. 46 al. 1 let. c LTF, les délais fixés en jours par la loi ou par le juge ne courent pas du 18 décembre au 2 janvier inclus. Toutefois, l’art. 46 al. 2 LTF précise que cette règle ne s’applique pas aux procédures concernant l’octroi de l’effet suspensif ou d’autres mesures provisionnelles.… Lire la suite

La modification de la contribution d’entretien en cas de diminution malveillante du revenu

ATF 143 III 233 | TF, 02.05.2016, 5A_297/2016*

Faits

Un époux est condamné à verser à son épouse une contribution d’entretien durant la procédure de divorce à titre de mesures provisionnelles. Environ deux ans plus tard, il requiert une réduction du montant de la contribution au motif qu’il n’a plus d’emploi. Les instances cantonales bâloises font suite à la demande de l’époux et réduisent partiellement le montant de la contribution.

L’épouse agit devant le Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’époux qui diminue de façon malveillante son revenu est en droit de demander une modification de la contribution d’entretien.

Droit

Selon la jurisprudence, les mesures de protection de l’union conjugale (art. 172 ss CC) respectivement les mesures provisionnelles en vigueur pendant la durée de la procédure de divorce (art. 276 al. 1 CPC) peuvent être modifiées lorsque (i) après l’entrée en force du jugement une modification importante et durable est survenue (art. 179 CC), (ii) les circonstances factuelles sur lesquelles le jugement reposait se sont révélées être erronées ou (iii) le jugement apparaît injustifié dans son résultat puisque le juge n’avait pas connaissance de certains faits. Dès lors que la procédure sommaire est applicable à ces mesures, il suffit de rendre vraisemblables les faits pertinents.… Lire la suite