L’évaluation des revenus d’un époux lors de sa retraite

ATF 141 III 193 | TF, 24.06.2015, 5A_296/2014*

Faits

Un époux dépose une action en divorce contre son épouse. Le Tribunal d’arrondissement prononce le divorce et règle les effets accessoires encore litigieux. Il fixe notamment une contribution d’entretien en faveur de l’épouse qui devait être payée jusqu’à l’âge ordinaire de l’époux, soit 65 ans.

L’époux recourt ensuite jusqu’au Tribunal fédéral qui lui donne partiellement raison et renvoie l’affaire à la Cour cantonale, celle-ci devant recalculer la contribution d’entretien de l’épouse (TF, 5A_474/2013). A la suite de ce jugement, le Tribunal cantonal fixe la contribution d’entretien mensuelle en faveur de l’épouse à 2’900 francs jusqu’au 30 juin 2014, puis à 1’119 francs jusqu’à ce que l’épouse atteigne l’âge ordinaire de la retraite, et finalement à 860 francs jusqu’à la retraite de l’époux.

L’époux dépose un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Il s’oppose à ce que la contribution d’entretien soit versée au-delà de l’âge ordinaire de la retraite de son épouse. Il soutient principalement que le Tribunal cantonal n’aurait pas calculé les revenus de l’épouse dès l’âge de sa retraite et ne les aurait pas mis en relation avec ses besoins. Il se serait contenté d’affirmer, en se fondant sur un arrêt récent (TF, 5A_495/2013), que d’après l’expérience de la vie, les revenus diminuent à partir de la retraite.… Lire la suite

Le conflit d’intérêts dans la représentation de plusieurs prévenus

ATF 141 IV 257 | TF, 28.07.2015, 1B_98/2015*

Faits

En 2012, le syndicat UNIA a décerné à une Sàrl la palme d’or du mauvais employeur du canton de Neuchâtel. Celle-ci a déposé plainte pénale pour calomnie et diffamation à l’encontre de trois syndicalistes et de trois de ses anciens employés. Un seul avocat s’est constitué pour la défense de tous les prévenus.

La juge du Tribunal de police a interdit à l’avocat de représenter les six prévenus. Ceux-ci, ainsi que l’avocat, ont recouru contre cette décision. L’Autorité de recours a confirmé la décision en retenant qu’une défense efficace imposait que les deux groupes – les trois syndicalistes et les trois anciens employés – soient défendus par des avocats différents.

Les six prévenus et l’avocat forment un recours en matière pénale. Le Tribunal fédéral doit dès lors se déterminer sur la question du conflit d’intérêts de l’avocat qui représente plusieurs prévenus dans une même procédure.

Droit

L’art. 127 al. 3 CPP prévoit que “[d]ans les limites de la loi et des règles de sa profession, un conseil juridique peut défendre les intérêts de plusieurs participants à la procédure dans la même procédure”. Puisque seul un avocat peut représenter des prévenus (art.Lire la suite

La bonne foi dans l’indication erronée d’un délai de recours

ATF 141 III 270 | TF, 17.06.2015, 5A_878/2014*

Faits

Dans le cadre d’une action révocatoire faisant suite à un prononcé de faillite d’une société anonyme, les défendeurs obtiennent du Juge instructeur de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois la suspension de la procédure civile jusqu’à droit connu sur une procédure pénale parallèle. Le jugement incident a été notifié le 22 mai 2014 aux parties. Dans la section consacrée aux voies de droit, le jugement indiquait que les parties pouvaient déposer un recours dans les 30 jours qui suivaient la notification de la décision.

Par recours déposé le 19 juin 2014 auprès de la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal vaudois, le demandeur conclut à l’annulation du jugement incident de suspension. La Chambre des recours déclare le recours irrecevable, faute d’avoir été déposé dans les 10 jours qui suivent la notification du jugement incident conformément à l’art. 321 al. 2 CPC.

Contre cette décision, le demandeur forme un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Il demande que l’arrêt de la Chambre des recours soit annulé et que celle-ci entre en matière sur son recours, en vertu du principe de la protection de la bonne foi.… Lire la suite

La reconnaissance du lien de filiation créé à la suite d’une gestation pour autrui

ATF 141 III 312 | TF, 21.05.2015, 5A_748/2014*

Faits

Deux hommes suisses liés par un partenariat enregistré concluent un contrat de maternité de substitution avec une femme californienne (gestation pour autrui). La mère porteuse donne naissance en Californie à un enfant dont la mère génétique est une donneuse anonyme d’ovule et le père génétique, qui a donné son sperme, est l’un des deux partenaires suisses.

Les deux partenaires se voient reconnaître la paternité de l’enfant par un jugement californien. Ils demandent alors à l’office compétent saint-gallois de reconnaître ce jugement et de les inscrire dans le registre d’état civil en tant que parents de l’enfant, ce que l’office refuse. Sur recours, le Département de l’intérieur du canton de Saint-Gall admet la demande et inscrit les deux partenaires comme étant les pères de l’enfant.

L’Office fédéral de la justice forme un recours auprès du Verwaltungsgericht de Saint-Gall, qui, après avoir procédé à une pesée des intérêts entre l’interdiction de la gestation pour autrui et le bien de l’enfant, rejette le recours. Reconnaissant ces deux principes comme faisant partie de l’ordre public suisse, le tribunal a pour l’essentiel considéré que l’enfant ne devait pas subir les conséquences négatives du choix – certes regrettable – de ses parents.… Lire la suite

L’avance des frais de l’exécution par substitution dans le contrat d’entreprise (CO 366 II)

ATF 141 III 257 | TF, 25.06.2015, 4A_2/2015*

Faits

Un maître d’ouvrage conclut un contrat d’entreprise avec un entrepreneur en vue de la réalisation d’une maison familiale à Zurich. Après la livraison de l’ouvrage, le maître constate divers défauts. À la suite d’une action en exécution par substitution (art. 366 al. 2 CO), le Handelsgericht de Zurich condamne par jugement du 15 mars 2011 l’entrepreneur au versement d’une avance de frais de 242’740 francs au maître d’ouvrage afin de couvrir les coûts vraisemblables engendrés par l’élimination des défauts. Le dispositif du jugement impose notamment au maître d’ouvrage d’utiliser l’avance de frais uniquement pour couvrir les coûts de réparation. Les travaux de réparation doivent être entrepris dans les 18 mois qui suivent la date du jugement, à défaut de quoi le maître devra restituer l’avance de frais à l’entrepreneur. Aussi, dans l’hypothèse où les coûts de réparation s’avèrent être inférieurs à l’avance de frais, le maître d’ouvrage est tenu de restituer l’excédent à l’entrepreneur.

En juin 2013, une fois les travaux de réparation terminés, le maître d’ouvrage ouvre une action en paiement complémentaire de 40’345 francs contre l’entrepreneur devant le Handelsgericht de Zurich. Selon lui, cette somme représente la différence entre les coûts effectifs de la réparation de l’ouvrage et l’avance de frais – qui s’est révélée être insuffisante – obtenue de l’entrepreneur.… Lire la suite