Réparation du dommage infligé à des biens culturels

Contribution de Me Philipp Fischer à l’occasion des cinq ans de LawInside.ch

Pour célébrer les cinq ans de LawInside.ch, nous avons demandé à des personnalités actives dans le monde juridique en Suisse romande et alémanique de commenter un arrêt comme contributeurs externes de LawInside.ch.

Comme sixième contributeur, nous avons le plaisir d’accueillir Me Philipp Fischer (LL.M. Harvard Law School). Associé et co-fondateur de l’Étude OBERSON ABELS SA, Me Fischer pratique le droit bancaire et financier, le droit de la protection des données ainsi que le droit des sociétés. Il est membre de la Commission de formation permanente de l’Ordre des avocats de Genève (président de 2015 à 2018) et de la Commission d’examens des avocats de Genève. 


Ordonnance de réparation n° ICC-01/12-01/15-236-tFRA du 17 août 2017 dans l’affaire Le Procureur c. Ahmad Al Faqi Al Mahdi

L’article 75 (1) du Statut de la Cour pénale internationale (CPI) accorde aux victimes de destruction de leur patrimoine culturel un droit à la réparation du préjudice subi. La présente affaire concerne la destruction de bâtiments à caractère religieux et historique à Tombouctou (Mali) durant l’été 2012. La CPI octroie des réparations (de type individuelle et collective) en lien avec (i) les dommages causés aux bâtiments protégés, (ii) les pertes économiques indirectes et (iii) le préjudice moral.Lire la suite

La prescription de l’action en restitution du trop-perçu (art. 67 al. 1 CO)

ATF 146 III 82 | TF, 28.02.2020, 4A_495/2019*

En matière d’enrichissement illégitime, le dies a quo du délai absolu correspond au moment de chaque paiement indu et non au moment unique du premier paiement.

Faits

En janvier 2004, un bailleur et un locataire concluent un contrat de bail portant sur un appartement dans le canton de Vaud pour un loyer de CHF 2’100 par mois. Le bailleur ne remet néanmoins pas la formule officielle au locataire.

En juin 2016, le locataire résilie le contrat de bail. Peu après, soit le 6 juillet 2016, il prend contact avec son assureur protection juridique. Le 5 juillet 2017, le locataire saisit l’autorité de conciliation compétente. Il dépose ensuite une demande concluant à la constatation de la nullité du loyer initial, à la fixation de celui-ci à CHF 1’000 par mois depuis le début du contrat de bail et à la restitution du trop-perçu.

Le Tribunal des baux du canton de Vaud fixe le loyer initial à CHF 1’650 par mois. Le bailleur ayant soulevé l’exception de prescription, le Tribunal considère que le délai relatif d’un an a commencé à courir lorsque le locataire a contacté son assureur, soit le 6 juillet 2016.… Lire la suite

Le sort des réserves de cotisation de l’employeur en cas de divorce

 

ATF 146 III 73 | TF, 11.12.2019, 5A_130/2019*

Les réserves de cotisation de l’employeur ne doivent en principe pas être incluses dans le partage des prestations de sorties. De telles réserves peuvent en revanche influencer la valeur de la société qui les a constituées, et donc influencer la valeur de la masse des acquêts ou des fonds propres du propriétaire des titres de cette société.

Faits

Après 22 ans de mariage, une épouse demande le divorce. Son époux est alors l’employé d’une société anonyme dont il est également actionnaire ainsi que l’un des trois membres du conseil d’administration. La société anonyme a constitué des réserves de cotisation de l’employeur importantes (c’est-à-dire des versements anticipés des contributions LPP dues à la caisse de pension). Le couple était marié sous le régime de la participation aux acquêts.

Au titre de partage des avoirs de prévoyance professionnelle, le Tribunal chargé de prononcer le divorce ordonne à la caisse de pension de l’époux de verser sur le compte de libre passage de l’épouse un montant d’environ CHF 280’000. Au titre de liquidation du régime matrimonial, il ordonne à l’époux de verser à son épouse un montant de CHF 320’000. Sur appel des deux parties, la Cour suprême du canton de Soleure modifie légèrement les deux montants précités.… Lire la suite

Le placement à des fins d’assistance d’une personne présentant un danger pour les tiers

ATF 145 III 441  | TF, 28.10.2019, 5A_407/2019*

Un placement à des fins d’assistance ne peut pas être ordonné au seul motif que la personne concernée présente un danger pour les tiers. Une telle mesure n’est possible que si les conditions sont clairement définies dans la loi, ce qui n’est à ce jour pas le cas en Suisse.

Faits

Un prévenu est condamné pénalement. Dans le prolongement de cette condamnation, l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte de la Haute-Argovie (APEA) le place dans une institution au sens de l’art. 426 CC. L’APEA assortit cette mesure de placement de nombreuses restrictions s’agissant notamment des sorties autorisées.

L’intéressé conteste cette mesure de placement auprès de l’Obergericht du canton de Berne, lequel rejette son recours au motif qu’il présente un réel danger pour les tiers, raison pour laquelle un placement à des fins d’assistance s’impose. L’Obergericht se fonde essentiellement sur des expertises psychiatriques constatant les nombreux troubles de la personnalité du recourant et le danger qu’il pourrait représenter pour des tiers.

Le recourant forme ainsi un recours en matière civile au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer si les conditions du placement à des fins d’assistance sont en l’espèce remplies.… Lire la suite

Le secret bancaire s’oppose-t-il à l’information des héritiers ?

TF, 18.07.2019, 4A_522/2018

Le droit du défunt au maintien de sa sphère privée s’oppose à ce que l’héritier connaisse l’identité du bénéficiaire d’un virement fait par le de cujus, à moins que l’héritier réservataire puisse prouver que sa réserve a été lésée (art. 522 ss CC) ou que l’héritier légal puisse prouver qu’il dispose d’un droit au rapport et au partage (art. 626 CC).

Faits

Une cliente d’une banque, dont la fortune s’élève à plus de EUR 13 millions, donne pour ordre à sa banque de procéder à un virement à hauteur de EUR 500’000. L’ordre est également signé par sa fille. Quelques années plus tard, la cliente décède à Madrid.

Sur requête d’un des héritiers de la cliente, la banque fournit les relevés du compte bancaire de la défunte, mais non l’identité du bénéficiaire du virement des EUR 500’000, en raison de l’opposition de celui-ci à la levée du secret bancaire à son égard.

Des héritiers réservataires déposent une action en reddition de compte auprès du Tribunal de première instance du canton de Genève afin que l’identité du bénéficiaire leur soit communiquée. Tant la première instance que la Cour de justice considèrent que le bénéficiaire du virement peut se prévaloir du secret bancaire pour s’opposer à la communication de son identité aux héritiers.… Lire la suite