La condamnation d’un automobiliste grâce à la recherche automatisée de véhicule

ATF 146 I 11TF, 07.10.2019, 6B_908/2018*

La mise en place d’une recherche automatisée de véhicules et de surveillance du trafic constitue une atteinte au droit à l’autodétermination informationnelle. En l’absence de base légale formelle, la preuve recueillie à l’aide de ce système est illicite. La preuve est en outre inexploitable lorsqu’il ne s’agit pas d’une infraction grave.

Faits

Grâce à la mise en place d’une recherche automatisée de véhicules et de surveillance du trafic (RVS), la police du canton de Thurgovie découvre qu’un conducteur a conduit à trois reprises un véhicule automobile sans toutefois disposer du permis nécessaire. Alors que le Bezirksgericht d’Arbon l’acquitte pour ces faits, l’Obergericht de Thurgovie le condamne à 140 jours-amendes.

Le conducteur dépose un recours auprès du Tribunal fédéral, lequel est amené à examiner la légalité de l’utilisation d’une RVS.

Droit

La recherche automatisée de véhicules et de surveillance du trafic (RVS) permet, à l’aide de caméras, de traiter automatiquement les données des plaques d’immatriculation des véhicules. Ce système augmente ainsi de manière importante l’intensité de la surveillance policière, bien que les données ne soient conservées que pendant 30 jours au maximum.

L’art. 13 al. 2 Cst.Lire la suite

Les Dashcam en procédure pénale

Note du 20 décembre 2020 : cf. également l’arrêt « GoPro » 6B_1282/2019*

ATF 146 IV 226TF, 26.09.2019, 6B_1188/2018*

Une preuve recueillie à l’aide d’une Dashcam ne respecte pas le principe de reconnaissabilité et porte ainsi atteinte au droit de la personnalité des autres usagers de la route. 

Au regard du droit procédural, l’existence d’un éventuel motif justificatif ne saurait lever le caractère illicite de la preuve qui a été récoltée par un particulier en portant atteinte au droit de la personnalité. 

Dans une procédure pénale, une preuve recueillie de manière illicite (au sens du droit procédural) par un particulier n’est exploitable que pour élucider des infractions graves (application par analogie de l’art. 141 al. 2 CPP).

Faits

Le Bezirksgericht de Bülach condamne un prévenu pour violations simples et graves des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 et 2 LCR). Le prévenu recourt auprès de l’Obergericht de Zurich en invoquant le fait que les preuves provenant de la Dashcam (caméra embarquée) d’un particulier sont inexploitables puisqu’elles sont récoltées en violation de la LPD.

L’Obergericht de Zurich admet que la prise d’images par la Dashcam a porté atteinte au droit de la personnalité du prévenu et que l’intérêt du particulier ne justifiait pas une telle prise d’image.… Lire la suite

Meurtre de St Légier: Le bracelet électronique comme mesure de substitution

ATF 145 IV 503TF, 17.09.2019, 1B_362/2019*

L’art. 237 al. 3 CPP constitue une base légale suffisante pour ordonner le port du bracelet électronique comme mesure de substitution à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté. Cela étant, l’efficacité du bracelet électronique est sujette à caution en l’absence d’un dispositif permettant une surveillance en temps réel. En tout état, le tribunal doit examiner l’adéquation de cette mesure au cas par cas.

Faits

Le corps sans vie d’une femme est découvert dans un ravin à proximité de Saint-Légier (canton de Vaud). Interpellé, son mari admet l’avoir tuée et est placé en détention provisoire. Leur fille est également accusée d’avoir participé au meurtre.

Le Tribunal criminel de l’Est vaudois condamne le mari à dix-huit ans de peine privative de liberté pour assassinat et atteinte à la paix des morts. Sa fille est également condamnée à une lourde peine. Le tribunal ordonne en outre le maintien des deux condamnés en détention pour des motifs de sûreté. L’époux forme appel sur le fond. Séparément, il recourt contre son maintien en détention devant le Tribunal cantonal vaudois, puis devant le Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral examine en particulier si le port d’un bracelet électronique est propre à pallier au risque de fuite.… Lire la suite

L’imputation de la détention provisoire sur une mesure ambulatoire

ATF 145 IV 359TF, 12.8.2019, 6B_375/2018*

L’imputation de la détention avant jugement sur une mesure au sens des art. 56 ss CP ne réduit pas nécessairement la durée de la mesure en question. La durée de la détention avant jugement peut par ailleurs également être imputée sur une mesure ambulatoire au sens de l’art. 63 CP. Dans ce cadre, le juge dispose d’un important pouvoir d’appréciation pour déterminer la manière dont cette imputation doit avoir lieu. Le droit à une éventuelle indemnisation s’apprécie ex post.  

Faits

Dans le cadre d’une procédure pénale, un prévenu effectue 292 jours de détention avant jugement. Au terme de la procédure, le Tribunal d’arrondissement de Winterthur renonce à toute peine en raison de l’irresponsabilité du prévenu au moment des faits (art. 19 al. 1 CP) et ordonne un traitement ambulatoire (art. 63 al. 1 CP). Il alloue également au prévenu un montant de CHF 14’600 à titre d’indemnisation pour la détention avant jugement effectuée.

Ce jugement ayant été confirmé par le Tribunal cantonal du canton de Zurich, le Ministère public central zurichois recourt auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si la détention avant jugement peut être imputée sur une mesure ambulatoire au sens de l’art.Lire la suite

Le prononcé d’une mesure thérapeutique institutionnelle ultérieur au prononcé d’une peine privative de liberté

ATF 145 IV 383TF, 07.10.2019, 6B_910/2018*

En tant que lex specialis, l’art. 363 al. 1 CPP l’emporte sur l’art. 65 al. 1 CP. Ainsi, les cantons peuvent prévoir que des tribunaux autres que celui qui a prononcé la peine initiale soient compétents pour ordonner une mesure thérapeutique institutionnelle.  Afin de respecter le principe ne bis in idem, le prononcé d’une telle mesure doit se fonder sur des faits ou moyens de preuves nouveaux et les conditions de son octroi devaient déjà être remplies au moment du jugement initial.

Faits

En 2009 un prévenu est condamné à une peine privative de liberté de 15 ans. En 2018, le Tribunal d’application des peines et des mesures de la République et canton de Genève (ci-après : TAPEM) ordonne un changement de sanction en application de l’art. 65 al. 1 CP et instaure une mesure thérapeutique institutionnelle au bénéfice du condamné. Le TAPEM fonde sa décision sur un complément d’expertise ordonné en 2016 ayant révélé la nécessité d’imposer une mesure thérapeutique au condamné vu ses importants troubles psychotiques, alors qu’une expertise plus ancienne datée de 2008 n’établissait aucune pathologie psychiatrique.

La Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise rejette le recours du condamné contre cette décision du TAPEM considérant que les conditions pour prononcer une mesure thérapeutique institutionnelle sont bel et bien remplies.… Lire la suite