Publications par Camille de Salis

Les recours distincts dans une procédure d’autorisation de construire

ATF 150 II 566 | TF, 01.07.2024, 1C_12/2024*

Dans le cas où plusieurs recours distincts sont dirigés contre une autorisation de construire, les différents jugements rendus doivent être qualifiés de décisions incidentes, dans la mesure où ils ne mettent pas fin à la procédure.

Faits

La commune d’Affolter am Albis accorde à une société l’autorisation de construire une maison en terrasses sur sa parcelle, encore occupée par deux maisons destinées à la démolition et située en zone de danger d’inondation. L’autorisation est en particulier subordonnée à la condition que la société propose à l’autorité compétente un projet d’évacuation des eaux du bien-fonds. Suite à la soumission du projet en question, la société obtient une nouvelle décision favorable à son projet de construction.

Un voisin recourt contre les deux décisions auprès du Baurekursgericht zurichois. Ce dernier rejette le recours contre l’autorisation de construire, mais admet partiellement le recours contre le projet d’évacuation des eaux du bien-fonds. Il condamne la société à présenter avant le début des travaux un nouveau projet d’évacuation des eaux, y compris les plans correspondants, et renvoie la cause à l’autorité inférieure.

Par deux jugements distincts, le Verwaltungsgericht zurichois rejette les recours du voisin contre les deux décisions du Baurekursgericht.… Lire la suite

La décision d’ordonner un examen d’aptitude à la conduite comme mesure provisionnelle au sens de l’art. 98 LTF

ATF 150 II 537 | TF, 04.06.2024, 1C_434/2023*

Les décisions ordonnant un examen d’aptitude à la conduite sur la base de l’art. 15d al. 1 LCR doivent être considérées comme portant sur des mesures provisionnelles au sens de l’art. 98 LTF.

Faits

Par la voie d’une ordonnance pénale, le Ministère public bernois déclare un conducteur coupable notamment d’infractions simples aux règles de la circulation routière, commises à plusieurs reprises par manque d’attention, et lui inflige une amende de CHF 400.

Par une décision ultérieure, l’Office de la circulation routière et de la navigation du canton de Berne ordonne au conducteur de se soumettre à un examen médical d’aptitude à la conduite auprès d’un médecin désigné. L’Office écarte l’opposition du conducteur contre cette décision et lui accorde un délai de 45 jours pour se soumettre à l’examen médical.

À la suite du rejet du recours du conducteur par la Commission de recours compétente, l’intéressé exerce un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit déterminer si une décision portant sur un examen d’aptitude à la conduite ordonné sur la base de l’art. 15d al. 1 LCR doit être considérée comme portant sur des mesures provisionnelles au sens de l’art.Lire la suite

La soumission à autorisation préalable d’un lasergame en forêt

ATF 150 I 213 | TF, 24.05.2024, 2C_397/2023*

Le fait de soumettre le lasergame en forêt à une autorisation ne viole pas le droit fédéral.

Faits

Une société ayant pour but en particulier les activités de lasergame demande à l’Office cantonal de l’agriculture et de la nature de la République et canton de Genève (l’«Office») une autorisation permanente valable pour les espaces forestiers du canton de Genève pour pratiquer un lasergame à infrarouge. L’Office refuse, estimant que seules des autorisations ponctuelles sur des sites déterminés pouvaient être envisagées.

Par ailleurs, l’Office explique considérer l’activité comme apparentée à un jeu de combat au sens de la législation genevoise, avec pour conséquence qu’une demande formelle d’autorisation devait être déposée 30 jours au moins avant une manifestation.

Le Tribunal administratif de première instance rejette le recours de la société, tout comme la Chambre administrative de la Cour de justice genevoise. La société saisit le Tribunal fédéral par le biais d’un recours en matière de droit public. Celui-ci doit déterminer si l’application du droit cantonal genevois, soumettant l’activité de la recourante à autorisation préalable, consacre une violation du droit fédéral.

Droit

Dans un premier grief, la recourante se plaint d’une violation de l’art.Lire la suite

L’amiante et le droit suisse de la prescription: nouveau camouflet par la CourEDH

CourEDH, 13.02.2024, Affaire Jann-Zwicker et Jann c. Suisse, requête 4976/20

Dans les circonstances exceptionnelles propres aux victimes de l’exposition à l’amiante, l’application des délais de prescription absolus par les autorités suisses (en particulier la manière de déterminer le dies a quo) a eu pour effet de restreindre le droit d’accès à un tribunal des requérants au point de porter atteinte à l’essence même de ce droit. Il y a donc eu violation de l’art. 6 § 1 CEDH.

Faits

Entre 1961 et 1972, Marcel Jann vit avec ses parents à Niederurnen (GL), dans une maison appartenant à la société Eternit AG, à proximité immédiate de l’usine de la société. Des minéraux d’amiante fibreux y sont transformés en panneaux d’amiante-ciment. Au cours de cette période, Marcel Jann est régulièrement exposé à l’amiante. D’une part, les émissions de poussière de l’usine entrent par les fenêtres de sa chambre à coucher. De l’autre, il joue souvent sur et autour des panneaux et des tuyaux utilisés par l’usine Eternit. En outre, il assiste régulièrement au déchargement des sacs d’amiante à la gare.

Marcel Jann quitte Niederurnen à l’âge de 19 ans et n’est plus exposé à l’amiante par la suite, laquelle est interdite en Suisse en 1989.… Lire la suite