La distinction entre escroquerie (art. 146 CP) et utilisation frauduleuse d’un ordinateur (art. 147 CP)

ATF 150 IV 188 | TF, 24.04.2024, 6B_831/2023*

L’utilisation frauduleuse d’un ordinateur (art. 147 CP) ne peut être retenue que lorsqu’aucune personne humaine n’est trompée. En revanche, dès lors qu’une personne humaine est impliquée, même dans un processus partiellement automatisé, l’infraction doit être qualifiée d’escroquerie (art. 146 CP).

Faits

Un individu est mis en prévention pour avoir recouru à des sociétés écran et des identités fictives afin de passer des commandes frauduleuses auprès de diverses entreprises, dans le but d’obtenir des téléphones et d’autres appareils électroniques. Les entreprises, convaincues de traiter avec un client solvable, expédient les produits en ignorant que les informations fournies sont fictives et que le prévenu n’a pas l’intention d’honorer les paiements.

Le tribunal pénal du canton de Bâle-Ville condamne le prévenu à sept ans d’emprisonnement et à huit ans d’expulsion du pays pour escroquerie par métier (art. 146 CP), utilisation frauduleuse d’un ordinateur (art. 147 CP) et plusieurs autres infractions contre le patrimoine.

Le prévenu fait appel de cette décision sans succès : la cour d’appel confirme la décision de première instance. Il introduit alors un recours au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si certains comportements relèvent de l’escroquerie ou de l’utilisation frauduleuse d’un ordinateur.… Lire la suite

Le principe « ne bis in idem » et l’exigence de la forme écrite comme règle de validité du séquestre

TF, 03.10.2024, 7B_455/2023*

L’effet du principe « ne bis in idem » d’un acquittement partiel entré en force ne se rapporte qu’aux faits concrètement concernés par l’acquittement partiel, mais pas à l’accusation portée simultanément. En outre, l’obligation du ministère public de confirmer par voie d’ordonnance écrite le séquestre ordonné oralement constitue une condition de validité au sens de l’art. 141 al. 2 CPP.

Faits

Un conducteur est soumis à un contrôle par des gardes-frontières. Dans le cadre du contrôle, les gardes-frontières trouvent dans le coffre du véhicule plusieurs boîtes contenant 175 plants de chanvre, ainsi que 0,7 gramme de marijuana dans la poche du conducteur.

Le Ministère public du canton de Saint-Gall rend une ordonnance pénale à l’encontre du conducteur pour infraction à la loi sur les stupéfiants par l’importation de plants de chanvre et de 0,7 gramme de marijuana destiné à sa consommation personnelle. Le Ministère public prononce également la confiscation et la destruction des stupéfiants séquestrés. Le conducteur fait opposition à l’ordonnance pénale.

Le Kreisgericht de Rheintal et l’Obergericht du canton de Saint-Gall acquittent le conducteur du chef d’infraction à la loi sur les stupéfiants relatif à l’importation de stupéfiants destinés à sa consommation personnelle.… Lire la suite

La nullité de la taxation d’office

TF, 19.08.2024, 9C_673/2023*

Une taxation d’office qui est augmentée d’année en année et dans des proportions de plus en plus massives, sans rapport avec la capacité économique du contribuable, peut être entachée de nullité. Tel est en particulier le cas lorsque la taxation d’office s’écarte délibérément et arbitrairement de la capacité économique du contribuable, respectivement lorsqu’elle revêt un caractère essentiellement punitif.

Faits

Des époux retraités ne déposent pas leurs déclarations fiscales, raison pour laquelle l’administration fiscale bernoise procède à leur taxation d’office pour les périodes 2005 à 2012. Les taxations entrent en force. Par la suite, l’administration fiscale procède au recouvrement partiel des impôts. Plusieurs saisies sont exécutées entre 2005 et 2010.

En 2012, les époux déposent leurs déclarations fiscales. En parallèle, ils forment une réclamation contre les taxations 2006 à 2012 et demandent également une reconsidération. L’administration fiscale reconsidère les taxations pour la période 2010 à 2012 en faveur des contribuables. Elle refuse toutefois de reconsidérer la période 2006 à 2009.

Les contribuables déposent un recours à la Commission des recours en matière fiscale du canton de Berne en concluant à la nullité des taxations 2006 à 2009. Celle-ci rejette le recours pour la période 2006 à 2009 et constate en outre la nullité des nouvelles taxations de l’administration fiscale pour la période 2010 à 2012.… Lire la suite

La prise en compte de la durée du viol pour la fixation de la peine

TF, 18.09.2024, 6B_612/2024*

La courte durée d’un viol ne doit pas être prise en compte comme circonstance atténuante (art. 47 CP).

Faits

Deux personnes se rencontrent lors d’une soirée dans un bar. À la fin de la soirée, la femme décline la proposition de l’homme de la raccompagner chez elle. L’homme la suit tout de même. Durant le trajet, la femme repousse ses avances. Finalement, l’homme viole la femme durant quelques minutes avant que cette dernière ne réussisse à appeler à l’aide.

Suite à la plainte de la victime, le Tribunal des arrondissements des districts de Martigny et St-Maurice reconnaît l’homme coupable de viol et le condamne à 30 mois de peine privative de liberté, dont 15 mois fermes.

Sur appel du Ministère public, la Cour pénale du Tribunal cantonal du Valais condamne l’individu à 42 mois de peine privative de liberté.

L’intéressé interjette alors un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, qui doit se prononcer sur la fixation de la peine en fonction de la culpabilité (art. 47 CP) dans le cas d’un viol.

Droit

Le recourant invoque une violation de l’art. 47 CP. Le Tribunal cantonal aurait effectué une mauvaise appréciation de sa culpabilité.… Lire la suite

La légitimation active pour demander l’indemnité prévue par l’art. 429 al. 3 CPP

TF, 01.10.2024, 7B_654/2024*

Le nouvel art. 429 al. 3 CPP vise à ce que l’indemnité accordée parvienne effectivement et exclusivement au défenseur. Le défenseur, mais également le prévenu, sont compétents pour contester la décision fixant l’indemnité.

Faits

Par une première décision, le Stadtrichteramt de Zurich inflige une amende de 400 CHF au prévenu. Sur contestation de ce dernier, le Stadtrichteramt annule l’amende prononcée, mais refuse de lui accorder l’indemnité de 298 CHF destinée à couvrir ses frais d’avocat.

Le prévenu, représenté par son avocat, agit contre le refus d’indemnisation auprès de l’Obergericht du canton de Zurich. L’Obergericht rejette le recours en raison du défaut de légitimation du prévenu. Le prévenu interjette recours au Tribunal fédéral, lequel doit se prononcer sur l’interprétation du nouvel art. 429 al. 3 CPP, en particulier sur la question de la légitimation active de l’action contestant l’indemnité allouée au défenseur privé.

Droit

Le nouvel art. 429 al. 3 CPP prévoit que le défenseur privé chargé de la défense du prévenu a un droit exclusif à l’indemnité prévue à l’art. 429 al. 1 let. a CPP. En outre, l’art. 429 al. 3 CPP prévoit que le défenseur peut contester la décision fixant l’indemnité.… Lire la suite