La qualité de fait notoire des informations d’un registre du commerce étranger

TF, 03.04.2024, 4A_639/2023*

Les informations qui figurent dans des registres du commerce étrangers ne sont pas des faits notoires, même lorsqu’elles sont accessibles sur Internet.

Faits

En 2012, une caisse d’épargne allemande établit un contrat de prêt avec une débitrice. Durant l’année 2016, la caisse d’épargne ainsi qu’une seconde sont absorbées par une troisième caisse d’épargne nouvellement créée ; cette dernière succède juridiquement aux entités précitées (Gesamtrechtsnachfolge).

En 2022, la nouvelle caisse d’épargne actionne la débitrice en déposant un commandement de payer. Après quelques jours, elle requiert la mainlevée définitive auprès du juge unique du Bezirksgericht de March (SZ). Ce dernier fait droit à la demande de mainlevée définitive. Le Tribunal cantonal de Schwyz rejette le recours de la débitrice.

La débitrice forme alors recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur la qualité de fait notoire des informations inscrites aux registres du commerce étrangers.

Droit

La débitrice n’oppose qu’un seul argument auprès du Tribunal fédéral : l’identité de la créancière poursuivante ne correspondrait pas à l’identité de la créancière au bénéfice du titre de mainlevée. Le juge examine d’office si ces identités coïncident et n’octroie la mainlevée qu’à condition que cette circonstance soit prouvée sans aucun doute (ATF 143 III 221, c.Lire la suite

La prolongation du sursis concordataire définitif

TF, 12.01.2024, 5A_169/2023*

Passé le délai de six mois de l’art. 294 LP, seul le commissaire – à l’exclusion du débiteur et du créancier – peut demander une prolongation du sursis concordataire selon l’art. 295b LP. A défaut de demande, la faillite s’ouvre d’office.

Faits

Le Kantonsgericht d’Appenzell Rhodes-Extérieures constate l’endettement manifeste d’une société. Il suspend la procédure de faillite et accorde un sursis concordataire provisoire d’une durée de quatre mois. La société bénéficie ensuite de deux sursis concordataires définitifs d’une durée de six mois chacun.

À quelques jours de l’expiration du second sursis concordataire, les commissaires en charge du sursis demandent la révocation de ce dernier ainsi que l’ouverture de la faillite. Lors d’une audience du Tribunal de concordat, les organes de la débitrice demandent de prolonger le sursis concordataire. Le Kantonsgericht révoque le sursis concordataire ; sur recours de la société, l’Obergericht confirme le jugement de première instance.

La société forme recours au Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur la faculté du débiteur à demander la prolongation du sursis concordataire.

Droit

La recourante fait valoir en substance que l’art. 295b LP accorde la possibilité de demander la prolongation du sursis concordataire de 12 mois et dans les cas complexes jusqu’à 24 mois.… Lire la suite

Dies ad quem de la période de suspension du délai péremptoire de l’art. 166 al. 2 LP

ATF 149 III 410TF, 03.08.2023, 5A_190/2023*

La suspension du délai péremptoire de l’art. 166 al. 2 LP prend fin dès la notification du prononcé de mainlevée. La question de savoir si par « notification du prononcé de mainlevée » il faut entendre la notification du seul dispositif ou celle de la décision dûment motivée n’est pas formellement tranchée.

Faits

Le 4 septembre 2020, un individu notifie à une société anonyme un commandement de payer pour un montant de CHF 600’000.-, intérêts en sus. La poursuivie y fait opposition totale

Le 23 février 2021, l’autorité compétente prononce la mainlevée provisoire de l’opposition. Cette décision est d’abord communiquée aux parties sous la forme d’un dispositif non motivé. Le prononcé motivé est adressé aux parties le 16 avril 2021. Aucun recours ni action en libération de dette ne sont introduits.

Le poursuivant requiert la continuation de la poursuite et la poursuivie se voit notifier une commination de faillite le 14 juillet 2022. Par acte du 2 août 2022, le poursuivant requiert la faillite de la poursuivie. La faillite de la poursuivie est prononcée au mois de septembre 2022.

La poursuivie recourt contre cette décision auprès de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois qui la déboute.Lire la suite

L’action en contestation négative de l’état de collocation en présence d’un dividende nul

ATF 149 III 362TF, 25.04.2023, 5A_869/2021*

Le créancier intentant une action en contestation négative de l’état de collocation, en présence d’un dividende de faillite supposé nul, ne peut invoquer l’intérêt de la masse à l’établissement correct de l’état de collocation, à l’exclusion de tout intérêt propre, à titre d’intérêt digne de protection.

Faits

A la suite du départ de son unique administrateur, la liquidation d’une société par voie de faillite est prononcée pour carence dans son organisation. Dans ce contexte, l’Office des faillites établit l’état de collocation faisant état de trois créanciers : une société créancière, l’ancien administrateur unique (également actionnaire de la société créancière) et un troisième créancier. Le dividende de faillite prévu est nul.

Par la suite, la société créancière et l’ancien administrateur intentent séparément deux actions en contestation négative de l’état de collocation visant à évincer les créances du troisième créancier. Après que l’action de la société créancière a été rejetée, respectivement que l’ancien administrateur a été partiellement débouté par les instances cantonales, ces deux demandeurs saisissent le Tribunal fédéral tant d’un recours en matière civile que d’un recours constitutionnel subsidiaire.

Le Tribunal fédéral est principalement amené à trancher la question de savoir si un créancier peut, en présence d’un dividende de faillite supposé nul, uniquement invoquer l’intérêt de la masse en faillite pour intenter une action en contestation négative de l’état de collocation.Lire la suite

Le jugement prudhommal condamnant au paiement de montants bruts et la mainlevée définitive de l’opposition

ATF 149 III 258 | TF, 29.03.2023, 5A_816/2022*

Poursuivi pour le paiement de montants bruts à la suite d’un jugement définitif et exécutoire (art. 80 al. 1 LP), l’employeur peut soulever, à titre d’exception au sens de l’art. 81 al. 1 LP, son obligation de verser les cotisations sociales. Il lui incombe alors de prouver par titre l’étendue de son obligation, sans qu’il ait à se prévaloir d’un paiement effectif.

Faits

Le Tribunal des prud’hommes genevois, puis la Chambre des prud’hommes de la Cour de justice condamnent solidairement deux personnes à verser à leur ancienne employée plusieurs montants bruts.

L’Office des poursuites fait notifier un commandement de payer à l’un des créanciers. Le Tribunal de première instance prononce ensuite la mainlevée définitive de l’opposition du créancier. Après l’annulation du jugement sur recours du poursuivi, la Cour de justice prononce à son tour la mainlevée définitive de l’opposition.

Le poursuivi exerce un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit répondre à la question de savoir si, sur la base d’un jugement condamnant l’employeur à verser un salaire brut, le juge de la mainlevée doit accorder la mainlevée définitive et, le cas échéant, pour le salaire net ou pour le salaire brut.… Lire la suite