L’avocat·e qui s’en rapporte à justice

TF, 02.06.2025, 2C_611/2024*

En fonction des circonstances, l’avocat·e ne viole pas son devoir de diligence en s’en rapportant à justice plutôt que de plaider que l’appel est réputé retiré lorsqu’un·e autre appelant·e fait défaut (art. 407 al. 1 lit. a CPP). En l’espèce, cette faute technique n’atteint pas le seuil de gravité nécessaire pour tomber sous le coup de l’art. 12 lit. a LLCA.

Faits

Précédemment inscrit au registre des avocat·es membres de l’UE/AELE, un avocat est inscrit au registre du canton de Genève depuis 2013.

L’avocat est nommé d’office dans un cas de défense obligatoire. Le Tribunal de police genevois condamne son mandant, le reconnaissant coupable notamment de lésions corporelles simples. Il l’acquitte toutefois de tentative de viol et de contrainte sexuelle.

En appel, la personne qui accuse le mandant de tentative de viol et de contrainte sexuelle ne se présente pas. L’avocat de l’absente, sans nouvelles récentes de sa part, demande à pouvoir représenter sa cliente sur la base de la procuration conférée plusieurs années plus tôt. Invité à se prononcer sur le défaut, le défenseur s’en rapporte à justice, tandis que le Ministère public conclut au retrait de l’appel.

Après délibération, la Chambre pénale déclare prendre acte du retrait de l’appel et révoque, faute de défense obligatoire, le mandat d’office du défenseur.… Lire la suite

Quelles sont les conditions d’annulation d’une faillite sans poursuite préalable ?

TF, 14.04.2025, 5A_198/2025

En cas de faillite sans poursuite préalable, l’annulation de la faillite n’est envisageable que si le débiteur démontre de manière vraisemblable, à l’aide d’indices concrets, sa solvabilité. De simples espérances d’un éventuel renflouement ne suffisent dès lors pas à établir que les difficultés financières ne sont que passagères. 

Faits

Suite à la requête d’un créancier, le Tribunal de première instance du canton de Genève a requis la faillite sans poursuite préalable d’une société dans la mesure où celle-ci avait fait l’objet de nombreuses poursuites, avait cessé de payer ses créances de droit public et n’était donc plus en mesure de faire face à ses obligations pécuniaires à court terme

La société interjette recours contre cette décision auprès de la Cour de justice du canton de Genève, qui le rejette et confirme le jugement de faillite. 

La société intente alors un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral, lequel doit déterminer si la faillite sans poursuite préalable doit être annulée.

Droit

Une faillite sans poursuite préalable peut être requise par le créancier si le débiteur, sujet à la poursuite par voie de faillite, a suspendu ses paiements (art. 190 al. 1 ch. 2 LP).Lire la suite

Le droit au mariage en l’absence de titre de séjour des deux fiancés

TF, 01.05.2025, 2C_480/2024*

Un refus général de délivrer des autorisations de séjour de courte durée en vue du mariage lorsque les fiancés sont tous deux dépourvus de titres de séjour porte atteinte à la substance du droit au mariage (art. 14 Cst. ; art. 12 CEDH). Dans certaines circonstances exceptionnelles, il convient d’octroyer les autorisations, même si les mariés n’auront pas le droit de demeurer en Suisse par la suite.

Faits

Deux ressortissants du Sénégal, nés en 1984 et 1986, indiquent être arrivés en Suisse en 2007 et 2012 respectivement. Ils ont quatre enfants, nés entre 2014 et 2023, les trois premiers étant scolarisés en Suisse.

En janvier 2019, la mère dépose auprès de l’Office cantonal de la population et des migrations de Genève une demande d’autorisation de séjour pour raisons humanitaires pour elle et ses deux premiers enfants, les deux plus jeunes n’étant pas encore nés. En mars 2022, le père dépose également une demande d’autorisation de séjour.

Un an plus tard, l’Office cantonal refuse les demandes et prononce le renvoi de Suisse des parents et des enfants, sur la base de condamnations pénales, en particulier pour entrée illégale et exercice d’une activité lucrative sans autorisation.… Lire la suite

La portée des obligations positives de l’État en matière de violences à l’égard des femmes

CourEDH, 03.04.2025, Affaire N.D. c. Suisse, requête no 56114/18

L’art. 2 CEDH met à charge des États parties à la Convention une obligation positive de prendre des mesures d’ordre pratique afin de protéger la vie d’un individu de comportements criminels d’autrui. Lorsque sont en cause des violences à l’égard des femmes ou des violences domestiques, l’État a à sa charge une obligation de prévention efficace qui inclut une évaluation du risque de létalité autonome, proactive et exhaustive.

Faits

Un individu est condamné en 1995 à 12 ans de peine privative de liberté pour meurtre et viol de sa compagne. Il est libéré en 2001. En 2006, il est placé en détention préventive dans le cadre d’une procédure pénale ouverte pour menace et contrainte à l’égard de sa nouvelle compagne. Dans ce cadre, une expertise psychiatrique, établie en vue d’une libération, constate que le prévenu risque de commettre des actes de violence grave lors de situations de rupture avec les personnes avec lesquelles il a entretenu des relations intimes. En octobre 2006, le prévenu est remis en liberté sous conditions.

En novembre 2006, le prévenu entame une nouvelle relation avec une femme qui ignore son passé. Face à son comportement, sa nouvelle compagne envisage de mettre fin à leur relation et contacte le médecin de famille du prévenu.… Lire la suite

Le régime transitoire de la conversion ex lege des actions au porteur en actions nominatives

TF, 31.03.2025, 4A_497/2024* 

La conversion ex lege des actions au porteur en actions nominatives ne s’applique qu’aux sociétés déjà existantes et non rétroactivement aux sociétés radiées qui n’étaient pas inscrites au registre du commerce au moment de la conversion. 

Faits  

Par décision du 4 juillet 2003, une assemblée générale dissout une société dont le capital-actions est composé d’actions au porteur. Le 12 janvier 2005, l’office du registre du commerce radie la société. Par décision du 18 août 2022, l’Einzelrichter des Regionalgerichts Surselva ordonne sa réinscription et nomme un liquidateur. 

Une personne dépose une demande d’inscription au registre des actions de la société. Le l’Einzelrichter rejette la demande. Le Kantonsgericht des Grisons confirme la décision.  

Le prétendu actionnaire saisit le Tribunal fédéral. Ce dernier doit déterminer si la conversion ex lege des actions au porteur en actions nominatives s’applique rétroactivement aux sociétés radiées au moment de la conversion et ensuite réinscrites. 

Droit  

Selon l’art. 622 al. 1bis CO, en vigueur depuis le 1er février 2021, les actions au porteur ne sont autorisées que si la société a des titres de participation cotés en bourse ou si elles sont émises sous forme de titres intermédiés au sens de la Loi fédérale sur les titres intermédiés et sont déposées auprès d’un dépositaire en Suisse désigné par la société ou inscrites au registre principal. Lire la suite