L’emplacement d’une antenne pour téléphonie mobile

TF, 08.12.2015, 1C_118/2015*

Faits

Le Conseil d’Etat tessinois adopte deux modifications du règlement de la loi cantonale sur le développement territorial. Il entend obliger les communes à prévoir dans leurs règlements d’urbanisme des dispositions réglant l’emplacement et la construction d’antennes de téléphonie mobile. Le délai dans lequel les communes doivent légiférer est de 10 ans. Une disposition transitoire applicable dans l’intervalle prévoit les emplacements possibles pour la construction de ces installations sous forme d’un ordre de priorité en cascade.

Swisscom, Sunrise et Salt saisissent le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public en demandant l’annulation de la disposition transitoire précitée. Le contrôle abstrait porte en particulier sur l’admissibilité de cette disposition au regard de l’autonomie communale et de la séparation des pouvoirs.

Droit

Le principe de la séparation des pouvoirs est un droit constitutionnel justiciable. Selon ce principe, le pouvoir exécutif n’a pas le droit de promulguer des règles de droit, sous réserve d’une délégation législative. La délégation législative est valable à condition qu’elle ne soit pas interdite par le droit cantonal, qu’elle soit prévue par une loi au sens formel, qu’elle se limite à une matière déterminée et que la loi au sens formel prévoie les grandes lignes de la future réglementation.… Lire la suite

Le piéton allongé sur l’autoroute percuté par une voiture

TF, 18.01.2016, 6B_291/2015

Faits

Le passager d’un car, ivre et sous l’emprise du cannabis, exige de quitter le bus alors que celui-ci roule sur l’autoroute par une nuit de neige. Le chauffeur obtempère et débarque son passager sur la bande d’arrêt d’urgence. Celui-ci déambule quelque peu puis s’allonge sur l’autoroute. Il est percuté peu de temps plus tard par une voiture et subit de graves lésions corporelles.

Le chauffeur de car et la conductrice de la voiture à l’origine de la collision sont acquittés de tous chefs de prévention en deuxième instance cantonale.

Le passager recourt au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si le chauffeur de bus en débarquant son passager sur la bande d’arrêt d’urgence et la conductrice en le percutant alors qu’il était allongé sur l’autoroute se sont rendus coupables de lésions corporelles par négligence.

Droit

L’infraction de lésions corporelles par négligence (art. 125 CP) est réalisée en présence (1) de lésions corporelles, (2) d’une négligence et (3) d’un lien de causalité entre les premières et la seconde. Il y a négligence (art. 12 al. 3 CP) lorsque l’auteur viole fautivement un devoir de prudence. S’agissant d’un accident de la route, les règles de la circulation routière déterminent quels devoirs imposait la prudence.… Lire la suite

La cessation du cours de la prescription par une ordonnance pénale (art. 97 al. 3 CP)

ATF 142 IV 11 | TF, 06.01.2015, 6B_608/2015*

Faits

Le 15 avril 2011, un conducteur commet un excès de vitesse en localité. Le 12 octobre 2011, il est condamné à une amende de 290 francs par ordonnance pénale. Suite à l’opposition du prévenu et après de nouvelles mesures d’instruction, le dossier est transmis au Tribunal d’arrondissement. Le 24 juin 2014, celui-ci confirme l’amende. Sur recours du prévenu, le Tribunal cantonal classe la procédure en raison de la prescription de l’action pénale.

Saisi d’un recours du Ministère public, le Tribunal fédéral doit déterminer si une ordonnance pénale frappée d’opposition fait cesser la prescription de l’action pénale (art. 97 al. 3 CP).

Droit

En vertu de l’art. 97 al. 3 CP, la prescription ne court plus si, avant son échéance, un jugement de première instance a été rendu.

En l’absence d’opposition, l’ordonnance pénale est assimilée à un jugement entré en force (art. 354 al. 3 CPP). En revanche, l’ordonnance pénale contre laquelle une opposition a été soulevée n’a pas la qualité de jugement, même si l’autorité la maintient malgré de nouvelles mesures d’instruction. En effet, l’opposition n’est pas un moyen de recours, mais permet de déclencher la procédure judiciaire en rendant caduque l’ordonnance pénale.… Lire la suite

Le maintien d’une détention provisoire contre l’avis du Ministère public

TF, 21.12.2015, 1B_419/2015*

Faits

Sur demande du Ministère public, le tribunal des mesures de contrainte (ci-après : le TMC) place un prévenu tunisien en détention provisoire pour 3 mois. Quelques semaines après, le Ministère public sollicite auprès du TMC des mesures de substitution à la place de la détention provisoire. Le TMC rejette cette requête en avançant que les risques de fuite sont trop importants. Le prévenu recourt alors au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral qui doit trancher la question de savoir si le TMC peut refuser des mesures de substitution requises par le Ministère public et maintenir ou ordonner la détention provisoire.

Droit

Le Tribunal fédéral relève que le TMC peut prendre des mesures de substitution à la place d’une détention provisoire demandée par le Ministère public (art. 226 al. 4 lit. c et 227 al. 5 CPP). En revanche, la loi ne règlemente pas la situation inverse où le TMC veut ordonner une détention provisoire alors que le Ministère public a uniquement sollicité des mesures de substitution.

L’art. 226 al. 4 lit. c et l’art. 227 al. 5 CPP concrétisent le principe de proportionnalité et imposent la détention provisoire seulement lorsque des mesures de substitution ne sont pas envisageables.… Lire la suite

Les dépens dans une procédure de reconnaissance de faillite

ATF 142 III 110 | TF, 21.12.2015, 5A_619/2015*

Faits

Le tribunal de Rotterdam prononce la faillite d’une société. Le liquidateur de cette société demande la reconnaissance de la faillite auprès du Kantonsgericht de Zoug (art. 166 LDIP). Celui-ci refuse de reconnaître la décision, pour défaut de réciprocité du droit néerlandais (art. 166 al. 1 let. c LDIP). Sur appel du liquidateur, l’Obergericht confirme la décision. Suite à un recours en matière civile du liquidateur, le Tribunal fédéral casse la décision et renvoie l’affaire à l’Obergericht pour qu’il se prononce notamment sur la reconnaissance de la faillite et sur la répartition des frais (ATF 141 III 222 ; cf. www.lawinside.ch/48).

L’Obergericht renvoie l’affaire au Kantonsgericht pour qu’il statue sur la reconnaissance de la faillite, compte tenu de la décision du Tribunal fédéral. Le Kantonsgericht reconnaît la faillite. Le liquidateur demande à l’Obergericht d’interpréter son jugement de renvoi, afin de savoir s’il a droit à des dépens pour la procédure de reconnaissance qui a mené aux deux refus – injustifiés – du Kantonsgericht et de l’Obergericht. L’Obergericht retient que le liquidateur n’a pas droit à une indemnité à titre de dépens, en raison du fait qu’une telle indemnité peut uniquement être mise à la charge d’une partie à la procédure (art.Lire la suite