Publications par Julien Francey

La violation du secret de fonction (art. 320 CP)

ATF 142 IV 65 | TF, 07.03.2016, 6B_851/2015*

Faits

En 2012, l’Université de Zurich résilie le contrat de travail de Christoph Mörgeli concernant son poste de maître-assistant et conservateur de l’Institut d’histoire de la médecine et du Musée de l’Université en raison de prestations insuffisantes et d’une rupture des liens de confiance. L’Université fait ensuite établir un rapport sur la qualité des thèses dirigées notamment par Christoph Mörgeli en histoire de la médecine. En août 2013, le Conseil de l’Université, dont fait partie Katharina Riklin, prend connaissance de ce rapport. Interrogée peu après dans les murs du Parlement fédéral sur l’affaire Mörgeli, Katharina Riklin déclare à un journaliste que le rapport sera publié prochainement et que cela ne se présentait pas bien pour M. Mörgeli. Celui-ci dépose alors plainte pénale pour violation du secret de fonction contre Katharina Riklin qui est acquitté en 1re instance, mais condamnée devant le Tribunal cantonal. Elle saisit alors le Tribunal fédéral qui doit préciser les conditions de la violation du secret de fonction.

Droit

Aux termes de l’art. 320 CP, se rend coupable de violation du secret de fonction, « celui qui aura révélé un secret à lui confié en sa qualité de membre d’une autorité ou de fonctionnaire, ou dont il avait eu connaissance à raison de sa charge ou de son emploi ».… Lire la suite

L’octroi de l’assistance judiciaire sous réserve d’une cession de créance en faveur de l’Etat

ATF 142 III 131TF, 09.02.16, 4A_325/2015*

Faits

Un demandeur dépose une action en dommages-intérêts et requiert l’assistance judiciaire. Le tribunal d’arrondissement accorde l’assistance judiciaire, sous réserve que le demandeur signe une cession de créance en vertu de laquelle il cède à la caisse du tribunal son éventuelle créance résultant du procès contre le défendeur jusqu’à concurrence des frais couverts par l’assistance judiciaire. Le demandeur recourt contre cette décision au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral qui doit déterminer si un tribunal peut accorder l’assistance judiciaire sous réserve de la cession de l’éventuelle créance découlant du procès en cours afin de couvrir les frais d’assistance judiciaire.

Droit

Le Tribunal fédéral constate que le CPC ne prévoit pas la possibilité d’accorder l’assistance judiciaire sous réserve d’une cession de créance en faveur de l’Etat. Il examine alors si le CPC admet implicitement cette faculté. Le Tribunal fédéral relève à cet égard que les avis doctrinaux divergent. Il estime premièrement que cette cession de créance ne peut pas se fonder sur l’assistance judiciaire partielle (art. 118 al. 2 CPC), dès lors que la cession de créance ne modifie pas l’étendue des prestations de l’assistance judiciaire (exonération d’avance et de sûretés, exonération des frais de justice et commissions d’un avocat).… Lire la suite

L’escroquerie lors d’une commande sur Internet

ATF 142 IV 153 TF, 08.03.16, 6B_887/2015*

Faits

Un internaute achète sur Internet une imprimante à 2’200 francs. Il la reçoit, mais ne paie pas la facture annexée, car il ne dispose pas des moyens nécessaires. Le tribunal de 1ère instance puis le Tribunal cantonal condamnent l’acheteur pour escroquerie. Celui-ci recourt au Tribunal fédéral qui doit préciser les conditions de l’escroquerie lors d’une commande sur Internet.

Droit

Selon l’art. 146 CP, se rend coupable d’escroquerie, « celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ».

Le Tribunal fédéral constate qu’en commandant une imprimante sur Internet, le recourant a trompé le vendeur sur sa capacité financière. En effet, l’acheteur ne disposait pas de l’argent pour payer l’imprimante à l’échéance de la facture. Il reste à examiner si cette tromperie relève de l’astuce.

L’astuce est réalisée lorsque l’auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène.… Lire la suite

La renonciation à recourir contre une sentence arbitrale et la CEDH

CourEDH, 24.03.16, Noureddine Tabbane c. Suisse (no 41069/12)

Faits

Un litige survient entre Noureddine Tabbane et la société Colgate à l’occasion de l’exécution de leur partenariat commercial. Conformément à une clause d’arbitrage, Colgate introduit une requête devant un tribunal arbitral, dont le siège se trouve à Genève. Celui-ci condamne Tabbane à rendre ses actions à Colgate. Tabbane dépose un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral qui se déclare incompétent en raison du fait que les parties avaient valablement renoncé à recourir contre toute décision du tribunal arbitral (art. 192 LDIP).

Tabbane saisit alors la CourEDH en soutenant que l’art. 192 LDIP viole la CEDH.

Droit

La CourEDH rappelle que les parties peuvent renoncer aux garanties de l’art. 6 par. 1 CEDH (accès à un tribunal indépendant et impartial établi par la loi) par une clause d’arbitrage pour autant qu’elles le fassent de manière libre, licite et sans équivoque. En l’espèce, le requérant ne prétend pas avoir signé la clause arbitrale et la renonciation à recourir contre la sentence arbitrale sous la contrainte. De même, la Cour relève que le Tribunal fédéral a conclu que la renonciation aux tribunaux ordinaires était licite et sans équivoque.… Lire la suite

Le dépassement par la droite

ATF 142 IV 93 | TF, 03.03.16, 6B_374/2015*

Faits

Un conducteur roule sur l’autoroute et dépasse par la droite, sans accélérer, deux voitures qui se trouvent sur la voie de gauche et qui ralentissent en raison d’un trafic dense. Le Tribunal cantonal le condamne en appel pour violation grave des règles de la circulation. Le conducteur recourt au Tribunal fédéral qui doit déterminer dans quels cas un dépassement par la droite est autorisé.

Droit

L’art. 35 LCR interdit les dépassements par la droite. Un dépassement par la droite est toutefois permis lorsque les voitures circulent en files parallèles, pour autant que la manœuvre n’entrave pas le trafic (art. 8 al. 3, 1ère phr. OCR et 44 al. 1 LCR). Par contre, le dépassement par la droite en contournant la voiture de devant, puis en se remettant dans la voie de circulation de gauche est strictement interdit, même en cas de circulation en colonnes.

Le Tribunal fédéral rappelle la jurisprudence, selon laquelle une circulation en files parallèles suppose un trafic dense sur toutes les voies (i) et une distance semblable (ii) entre tous les véhicules circulant dans le même sens. Il estime que cette définition restrictive du trafic en files parallèles ne correspond plus à la réalité de la circulation actuelle.… Lire la suite