La réduction de l’indemnité pour détention excessive en cas d’expulsion

ATF 149 IV 289 | TF, 01.05.2023, 6B_1160/2022*

Lorsqu’une personne visée par une expulsion pénale, en situation de séjour illégal et sans perspective d’avenir en Suisse doit être indemnisée pour détention excessive, le Tribunal fédéral admet qu’il soit tenu compte du coût de la vie dans son pays d’origine.

Faits

Un prévenu, ressortissant algérien, déjà visé par une expulsion pénale, est condamné pour rupture de ban. Il se voit allouer en première instance et en appel une indemnité de Fr. 935.-, intérêts en sus, à titre de réparation du tort moral subi en raison de 27 jours de détention excessive (AARP/242/2022).

Le prévenu forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral et conclut notamment à l’octroi d’une indemnité pour tort moral de Fr. 200.- par jour de détention excessive.

Droit  

Après avoir confirmé la peine infligée au prévenu, le Tribunal fédéral se penche sur la question du montant de l’indemnité.

Il commence par rappeler qu’une telle indemnité est notamment due au prévenu en cas de détention excessive, c’est-à-dire lorsque la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté, quoi qu’ordonnées de manière licite, ont dépassé la durée de la privation de liberté prononcée dans le jugement (art.Lire la suite

Impossibilité de contacter le prévenu et renonciation implicite à l’appel

ATF 149 IV 259 | TF, 17.04.2023, 6B_1433/2022*

Le prévenu qui souhaite former un appel doit démontrer de manière continue, pendant la procédure d’appel, sa volonté que la juridiction d’appel examine la décision de première instance. Le prévenu est réputé renoncer implicitement à la procédure d’appel s’il refuse de communiquer son lieu de séjour ou que celui-ci reste inconnu et qu’il est impossible, même pour son défenseur, de le contacter.

Faits

Un prévenu est condamné en première instance pour contraintes, menaces et insoumission répétée à des décisions de l’autorité. À la suite de la notification du dispositif du jugement, le prévenu informe son conseil de sa volonté de former appel. Depuis cet ultime contact, le défenseur du prévenu n’est plus parvenu à communiquer avec lui. Faute d’indications contraires du prévenu depuis lors, le conseil forme appel.

A la suite de la convocation aux débats devant l’instance d’appel, le défenseur du prévenu demande la fixation d’un délai pour contacter le prévenu afin de confirmer sa volonté de poursuivre la procédure devant l’instance d’appel. Faute pour le défenseur du prévenu d’être parvenu à le contacter, l’instance d’appel considère que l’appel a été retiré et déclare le jugement de première instance exécutoire. Contre cette décision, le défenseur du prévenu intente un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral, lequel est amené à préciser sa jurisprudence relative à la renonciation implicite à l’appel en cas d’impossibilité de communiquer avec le prévenu et faute de connaissance de son lieu de séjour.Lire la suite

Le plan d’affectation partiel du projet de parc éolien « Eoljoux »

ATF 149 II 86 | TF, 27.01.2023, 1C_240/2021*

(i) Un projet tel qu’un parc éolien, ayant une incidence importante sur l’environnement, doit avoir un ancrage suffisant dans le plan directeur cantonal pour faire l’objet d’une planification d’affectation. Cela présuppose que le projet soit approuvé en coordination réglée (art. 5 al. 2 lit. a OAT). En cas de refus du Conseil fédéral de délivrer une telle approbation, une commune peut demander que le degré de coordination du plan directeur soit contrôlé à titre incident dans le cadre de l’examen de la planification d’affectation, afin de vérifier si le plan expose suffisamment comment le projet est coordonné avec les autres intérêts en présence.

 (ii) Un projet d’énergie renouvelable qui atteint une certaine taille et une certaine importance revêt un intérêt national qui permet d’envisager une dérogation à la règle selon laquelle un objet inscrit à l’IFP doit être conservé intact (art. 12 al. 3 LEne, art. 6 al. 2 LPN). Une telle dérogation n’est toutefois pas automatique, elle suppose une pondération complète des intérêts concrètement en jeu. La coordination ne peut être qualifiée de réglée lorsque les atteintes que provoque le projet ne peuvent être conciliées avec les objectifs de protection de l’Inventaire fédéral de la protection du paysage.Lire la suite

La demande d’intervention du Conseil fédéral auprès d’une autorité étrangère

ATF 149 I 316 | TF, 02.05.2023, 2C_236/2022*

Les art. 8 et 13 CEDH ne permettent pas à l’ayant droit économique qui se prévaut d’une violation du principe de spécialité par une autorité étrangère d’exiger l’intervention du Conseil fédéral auprès de l’autorité concernée. La décision d’intervenir auprès de l’autorité s’effectue de manière discrétionnaire et ne peut être revue par les tribunaux suisses.

Faits

En 2010 et 2011, l’Autorité des marchés financiers française (AMF) requiert de la FINMA qu’elle lui accorde l’assistance administrative à propos d’un négoce de titres opéré par trois banques. La FINMA accepte et notifie la décision à l’ayant droit économique des relations bancaires. La FINMA rappelle toutefois que les informations échangées ne doivent servir qu’à la mise en œuvre de la réglementation sur les bourses, le commerce de valeurs mobilières et les négociants en valeurs mobilières. Une utilisation à d’autres fins n’est possible qu’à condition de recueillir l’assentiment de la FINMA (principe de spécialité).

En 2020, l’ayant droit requiert le prononcé d’une décision formelle par le Conseil fédéral. Il reproche en substance à l’AMF d’avoir transmis les informations au Tribunal de grande instance de Paris sans l’assentiment de la FINMA. Lesdites informations ont ensuite fondé l’ouverture d’une enquête pour faux et usage de faux.… Lire la suite

Qualité pour agir du créancier cessionnaire admis provisoirement à l’état de collocation et relation entre action en restitution et action en responsabilité

ATF 149 III 422 TF, 30.05.2023, 4A_465/2022; 4A_467/2022*

Un créancier dont la créance a été admise provisoirement à l’état de collocation peut se voir céder des prétentions de la masse en faillite et agir dans une procédure en cette qualité. La cession doit alors être assortie d’une condition résolutoire pour le cas où la créance est définitivement écartée de l’état de collocation.

L’action en restitution (art. 678 CO) et l’action en responsabilité (art. 754 ss CO) sont en relation de concurrence (Anspruchkonkurrenz). Lorsque plusieurs personnes sont responsables à ce titre, elles répondent selon les règles de la solidarité imparfaite (art. 51 al. 2 CO).

Faits

À l’issue d’une procédure d’arbitrage, une société entame des poursuites à l’encontre de la société reconnue débitrice. La société poursuivante obtient la mainlevée pour un montant de CHF 5.8 millions. S’ensuit l’ouverture de la faillite de la société débitrice.

Agissant en tant que créancier cessionnaire, la société poursuivante ouvre (i) une action en restitution à l’encontre de la société actionnaire de la société débitrice ainsi qu’une (ii) action en responsabilité à l’encontre du président du conseil d’administration et directeur unique de cette même société et de la société débitrice, ainsi qu’à l’encontre de l’organe de révision de la société débitrice.… Lire la suite