Archive d’étiquettes pour : client

La preuve des pertes du client incombe à la banque

TF, 16.07.2024, 4A_301/2023

Lorsque la banque liquide les positions du client et qu’il en résulte un solde négatif, il appartient à la banque de prouver les pertes. À défaut, la banque ne prouve pas l’existence de sa créance à l’encontre du client.

Faits

En 2011, un client utilise la plateforme informatique d’une banque vaudoise afin de spéculer sur la variation du cours USD/CHF. Le 15 janvier, la BNS annonce qu’elle abandonne le taux plancher CHF/EUR. Cela provoque un vent de panique et rend le marché USD/CHF temporairement illiquide. Conformément aux conditions générales, la banque liquide les positions du client et l’informe, quelques jours plus tard, que son compte est d’une valeur négative de USD 929’075.

La banque ouvre action en paiement contre le client auprès de la Chambre patrimoniale du canton de Vaud. Dans ses allégués n°83 à 86, la banque indique que la liquidation automatique des positions du client s’est soldée par une perte de USD 1’125’991.40 et, qu’après déduction des avoirs en compte du client de USD 193’325.62, le débit du compte était de USD 929’075.

Dans sa réponse, le client conteste ces quatre allégués et dépose une demande reconventionnelle afin que le montant de USD 193’325.62, soit le solde de son compte avant la liquidation, lui soit restitué.… Lire la suite

Clause insolite dans les conditions générales d’un contrat informatique

TF, 11.07.2023, 4A_372/2022

Une clause standardisée dans les conditions générales d’un contrat informatique impartissant au client trente jours au maximum pour s’opposer aux prestations facturées au moyen d’un courrier recommandé est insolite, car elle porte sérieusement atteinte à la situation juridique du client. Il en va de même pour une clause prévoyant une indemnité forfaitaire en cas de résiliation par le client sans faute de l’entreprise fournissant le logiciel informatique.

Faits

En 2016, une société active dans la fourniture de logiciels informatiques conclut trois contrats avec une autre entreprise : un contrat de licence en vue de l’utilisation du logiciel, un contrat de prestations de services informatiques pour le développement de logiciels spécifiques adaptés aux besoins du client et un contrat de maintenance. Chaque contrat est accompagné de conditions générales particulières.

L’art. 6 des conditions générales complétant le contrat de prestations de services prévoit (i) un délai maximal de 30 jours incombant au client pour s’opposer aux prestations facturées au moyen d’un courrier recommandé, et (ii) une indemnité forfaitaire de CHF 107’289.- en cas de résiliation du contrat par le client sans faute de l’entreprise.

En 2019, la cliente résilie les contrats avec effet immédiat en raison d’un important dépassement budgétaire et de failles dans la sécurité informatique.… Lire la suite

Quelle action contre la banque lors de transactions non autorisées ?

ATF 149 III 105 | TF, 13.09.2022, 4A_407/2021*

Le client qui conteste avoir autorisé des transactions doit déposer une action en dommages-intérêts, et non en exécution, sauf si la transaction non autorisée provient d’un défaut de légitimation.

Faits

Un chargé de relation, responsable du desk turc d’une banque, procède à des transactions (opérations Forex, investissements, virements…) sur les comptes de plusieurs clients, sans avoir reçu d’ordres au préalable. Afin de dissimuler ces transactions non autorisées, l’employé remet aux clients uniquement des résumés qu’il a lui-même préparés, et non des documents officiels de la banque.

Lorsque le chargé disparaît en Turquie, la fraude est découverte. Plusieurs clients actionnent la banque afin d’obtenir le remboursement des montants débités sans droit (cf. TF, 17.02.2020, 4A_126/2019 commenté in cdbf.ch/1112 et ACJC/548/2021). Dans le cas qui nous intéresse, le client a listé douze transactions qu’il n’avait pas ordonnées, totalisant EUR 4’550’958,30.

Le client saisit le Tribunal de première instance genevois d’une demande en paiement. Il agit à titre principal en exécution du contrat, réclamant la restitution de ses avoirs, et, à titre subsidiaire, en responsabilité pour inexécution du contrat, exigeant la réparation de son préjudice.

Après une procédure de près de dix ans, le Tribunal condamne la banque, en application des règles de la gestion d’affaires sans mandat (art.Lire la suite

Appel de marge et réalisation des actifs par la banque

TF, 24.01.2021, 6B_1381/2021

Une banque ne commet pas de gestion déloyale en reprenant pour son compte et à un prix inférieur au marché les positions d’un client n’ayant pas satisfait aux besoins en marge fixés préalablement dans un contrat execution only de négoce d’options et de futures. 

Faits

En 2015, un client conclut avec sa banque un contrat execution only de négoce d’options et de futures. Le contrat oblige le client à surveiller en permanence son compte afin de respecter les besoins en marge de la banque. Ceux-ci sont fixés par la banque en fonction du risque généré par la transaction ou de la stratégie envisagée par le client. Si les besoins en marge ne sont pas satisfaits, la banque peut réaliser les positions à sa libre appréciation, même à un prix défavorable.

En 2018, la banque informe le client d’une augmentation de ses besoins en marge et de la nécessité de fournir immédiatement des fonds supplémentaires (appel de marge). Le client n’ayant pas répondu, la banque réalise les positions du client en les reprenant dans ses livres et lui transmet une confirmation de transactions. Ce document indique que les positions ont été réalisées sur le marché boursier, mais ne mentionne pas qu’elles ont été reprises par la banque.… Lire la suite

Le client piraté et la banque négligente

ATF 146 III 326 | TF, 09.07.2020, 4A_9/2020*

Les clauses bancaires de transfert de risque ne sont valables que dans les limites des art. 100 et art. 101 CO (convention exclusive de la responsabilité) appliqués par analogie. En matière d’ordres frauduleux, il n’y a faute grave que s’il saute aux yeux de toute personne raisonnable que l’ordre transmis, de par son adresse, son texte, son contenu ou un lieu de virement exotique, et compte tenu de la situation du client, ne peut émaner de celui-ci. 

Faits

En novembre 2014, un ressortissant turc et homme d’affaires retraité dépose environ EUR 850’000 auprès d’une société de négoce en valeurs mobilières. Parmi la documentation contractuelle signée, se trouve notamment une clause de décharge pour les ordres transmis par e-mail:

le client autorise expressément la société à accepter des instructions données notamment par e-mail et à les exécuter immédiatement, en n’importe quelles circonstances, même si elles ne sont pas suivies d’une confirmation écrite. Le client déclare assumer tous les risques, même en cas d’erreur de la part de la société quant à son identité et dégage celle-ci de toute responsabilité de ce chef pour tous dommages qu’il pourrait encourir.

Les conditions générales prévoient également que le dommage résultant de défauts de légitimation ou de faux non décelés est à la charge du client, sauf en cas de faute grave de la société de négoce.… Lire la suite