La détention provisoire d’un jihadiste soupçonné d’appartenir à l’EI

TF, 05.12.2016, 1B_412/2016

Faits

Un prévenu qui est soupçonné d’appartenir à l’organisation Etat islamique (EI) se trouve en détention provisoire. Le Ministère public de la confédération (MPC) qui est chargé de l’enquête demande une deuxième prolongation de la détention pour une période de trois mois, ce que le Tribunal des mesures de contrainte de Berne (TMC) admet. Sur recours, le prévenu est débouté par la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (TPF).

Saisi d’un recours en matière pénale du prévenu, le Tribunal fédéral doit se pencher sur l’analyse des conditions de prolongation de la détention provisoire en lien avec une enquête pour appartenance à l’EI.

Droit

Le prévenu fait tout d’abord valoir que le dossier en main du TMC tel que transmis par le MPC est incomplet et que d’importantes pièces à sa décharge font défaut.

Au plus tard quatre jours avant l’expiration de la durée de la période de détention, le ministère public transmet au TMC la demande de prolongation écrite et motivée, et joint les pièces essentielles du dossier (art. 227 al. 2 CPP). Le détenu et son défenseur ont le droit de consulter le dossier en possession du TMC et de s’exprimer sur la demande de prolongation dans les trois jours (art.Lire la suite

La production de preuve par Facebook Switzerland

ATF 143 IV 21TF, 16.11.16, 1B_185/2016*

Faits

Un journaliste fait l’objet de diffamations sur Facebook et dépose une plainte pénale contre inconnu. Le ministère public requiert de la société Facebook Switzerland Sàrl la production de l’identité du détenteur du compte et les adresses IP utilisées pour poster les commentaires injurieux sous menace de la peine prévue par l’art. 292 CP. Facebook Switzerland recourt au Tribunal cantonal, puis au Tribunal fédéral en soulevant qu’elle ne possède pas ces données et qu’une ordonnance de production de preuve ne peut pas être rendue à son encontre.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’une décision de production de pièces est une décision incidente, sujette à recours notamment si elle cause un préjudice irréparable (cf. art. 93 al. 1 lit. b LTF). Tel est le cas lorsqu’une décision de ce type est assortie des peines prévues à l’art. 292 CP, comme en l’espèce. Partant, le recours en matière pénale est ouvert.

L’ordre de dépôt (art. 265 CPP) permet au ministère public d’obtenir auprès de leurs détenteurs les objets ou valeurs qui feront l’objet d’un séquestre. L’art. 265 CPP ne nécessite pas l’accord du tribunal des mesures de contrainte, contrairement à la surveillance de la correspondance par poste ou télécommunication (cf.… Lire la suite

La détention avant jugement d’un mineur de moins de quinze ans

ATF 142 IV 389TF, 11.10.2016, 6B_1026/2015*

Faits

Un mineur âgé de douze ans est suspecté d’avoir participé à plusieurs cambriolages. D’origine roumaine, le mineur n’est pas scolarisé et n’a aucun domicile connu. Après avoir été interpellé par la police, le mineur est mis en prévention pour diverses infractions et est placé en détention provisoire pendant environ un mois.

Par ordonnance pénale, le Juge des mineurs du canton de Genève reconnaît le mineur coupable de diverses infractions liées aux cambriolages, mais l’exempte de toute peine. Le mineur fait opposition à l’ordonnance, en soutenant que l’illicéité de sa détention n’y était pas constatée. Le juge des mineurs maintient l’ordonnance pénale, qui est confirmée par le Tribunal des mineurs, puis, sur recours, par la Chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice.

Le mineur forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer en particulier sur la licéité d’une détention provisoire d’un mineur âgé de moins de quinze ans.

Droit

Selon l’art. 27 al. 1 PPMin, la détention provisoire n’est prononcée qu’à titre exceptionnel et seulement si aucune mesure de substitution n’est envisageable.

La doctrine considère cette mesure comme une ultima ratio, qui doit strictement respecter le principe de proportionnalité.… Lire la suite

L’utilisation d’un pseudonyme sur Internet par un policier pour attraper un pédophile

ATF 143 IV 27TF, 28.09.16, 6B_1293/2015*

Faits

Un policier se fait passer pour une fille de 14 ans sur un forum de discussion sur Internet. Un internaute entre en contact avec la fille, engage une conversation sexuelle et lui fixe un rendez-vous. Au lieu du rendez-vous, la police arrête l’internaute. Le tribunal de première instance condamne notamment l’internaute pour tentative d’acte d’ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP). Sur recours du prévenu, le Tribunal cantonal l’acquitte du chef de prévention de tentation d’acte sexuel sur mineurs. Le Tribunal cantonal considère qu’il existait une investigation secrète (art. 285a ss CPP) qui aurait nécessité l’accord du tribunal des mesures de contrainte. A défaut, les preuves recueillies par le policier sont inutilisables (cf. art. 289 al. 6 CPP en lien avec l’art. 140 s. CPP). Le ministère public saisit le Tribunal fédéral qui doit se pencher sur la différence entre l’investigation secrète (art. 285a ss CPP) et les recherches secrètes (art. 298a ss CPP).

Droit

Selon l’art. 298a al. 1 CPP, « les recherches secrètes consistent, pour les membres d’un corps de police, à tenter d’élucider des crimes ou des délits dans le cadre d’interventions de courte durée où leur identité et leur fonction ne sont pas reconnaissables […] ».… Lire la suite

La délégation du tri judiciaire en cas de mise sous scellés (art. 248 al. 4 CPP)

ATF 142 IV 372TF, 08.09.2016, 1B_90/2016*

Faits

Dans le cadre d’une enquête pénale, un témoin se voit séquestrer son ordinateur portable. Suite à la mise sous scellés de l’ordinateur, le procureur entame la procédure de levée des scellés devant le Tribunal des mesures de contrainte genevois (TMC). Le TMC décide de nommer un policier membre de la Brigade de criminalité informatique (BCI) en tant qu’expert pour effectuer le tri des données informatiques contenues dans l’ordinateur.

Contre cette décision, le témoin forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, en demandant la nomination d’un expert neutre et indépendant. Il requiert en outre que son avocat puisse assister au travail de l’expert. Il se pose ainsi en particulier la question de savoir si le TMC est en droit de déléguer l’exécution du tri judiciaire à un membre de la BCI.

Droit

La décision querellée ne met pas un terme à la procédure et revêt par conséquent un caractère incident. Dès lors, elle n’est attaquable que si elle est susceptible de causer un préjudice irréparable au destinataire (art. 93 let. a LTF) ou si l’admission du recours permet d’éviter une procédure probatoire longue et couteuse (art. 93 let.Lire la suite