La récusation des juges du TMC en cas de procédures connexes

ATF 143 IV 69TF, 03.01.2017, 1B_409/2016*

Faits

Dans le cadre d’une instruction pénale pour trafic de stupéfiants, deux juges du Tribunal des mesures de contrainte (ci-après le “TMC”) sont appelés à se prononcer à de multiples reprises sur des demandes d’autorisation de mesures de surveillance et d’investigation secrète, sur le placement en détention provisoire de divers coprévenus, ainsi que sur la prolongation de ces mesures.

Placé en détention provisoire, l’un des prévenus demande la récusation des deux juges. Sa requête est rejetée par l’autorité de recours cantonale.

Le prévenu forme recours auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si le fait que les juges du TMC aient déjà statué dans des procédures connexes constitue un motif de récusation.

Droit

A teneur de l’art. 56 let. b CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d’une autorité pénale est tenue de se récuser lorsqu’elle a agi à un autre titre dans la même cause, en particulier comme membre d’une autorité, conseil juridique d’une partie, expert ou témoin. La notion de “même cause” s’entend de manière formelle et vise une procédure identique impliquant les mêmes parties et portant sur les mêmes questions litigieuses. En outre, l’art.Lire la suite

L’observation du délai pour effectuer un paiement en procédure pénale

ATF 143 IV 5 | TF, 19.01.17, 6B_310/2016*

Faits

Le Ministère public classe une procédure d’escroquerie et de faux dans les titres contre un prévenu. La partie plaignante recourt contre cette décision. Le Tribunal cantonal du canton de Zurich lui impartit un délai jusqu’au vendredi 5 février pour verser des sûretés conformément à l’art. 383 CPP. Le Tribunal cantonal constate que le versement des sûretés a été effectué le lundi 8 février et déclare irrecevable le recours contre la décision de classement. La partie plaignante saisit le Tribunal fédéral qui doit se déterminer sur les obligations de l’autorité en cas de paiement tardif.

Droit

Selon l’art. 383 al. 1 CPP, la direction de la procédure de l’autorité de recours peut astreindre la partie plaignante à fournir des sûretés dans un délai déterminé pour couvrir les frais et indemnités éventuels. En cas de paiement tardif, l’autorité n’entre pas en matière sur le recours (art. 383 al. 2 CPP) Aux termes de l’art. 91 al. 5 CPP, qui correspond à l’art. 143 CPC, le paiement à une autorité pénale est effectué à temps s’il est versé le dernier jour du délai.… Lire la suite

La qualité de lésé du membre d’un groupe visé par un outrage raciste (art. 261bis CP)

ATF 143 IV 77TF, 03.01.2017, 1B_320/2015*

Faits

Sur les ondes de la télévision suisse allemande, un humoriste se sert d’un cliché selon lequel les juifs seraient cupides et explique que lorsqu’un juif fait de l’humour, ce n’est pas uniquement pour faire rire, mais également pour gagner de l’argent.

Un téléspectateur de confession juive dépose une plainte pénale contre l’humoriste pour discrimination raciale. Le ministère public lui nie la qualité de lésé et donc de partie plaignante. Sur recours du téléspectateur, le Tribunal cantonal confirme la décision du ministère public.

Le téléspectateur recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer s’il est en l’espèce lésé.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par expliquer que la problématique qui lui est soumise est de nature formelle. Il est en effet uniquement amené à déterminer si le téléspectateur est une partie à la procédure et non si les propos de l’humoriste sont constitutifs d’une infraction.

Le Tribunal fédéral rappelle que, sous l’intitulé marginal « [d]iscrimination raciale », l’art. 261bis par. 4 in initio CP tend à protéger la dignité que tout homme acquiert dès la naissance, ainsi que l’égalité entre les êtres humains.

En se fondant sur la doctrine, le Tribunal fédéral explique que lorsque l’outrage ou l’injure raciste est dirigé contre un particulier, il ne fait aucun doute que la victime est directement lésée et qu’elle peut faire valoir ses droits en procédure.… Lire la suite

La suspension de la procédure pénale en cas de conjoints (art. 55a CP)

ATF 143 IV 104TF, 23.12.2016, 6B_527/2016, 6B_535/2016*

Faits

Deux époux ont acquis un chien pendant leur mariage. À partir du mois d’avril 2012, ils décident de vivre séparés. Alors qu’elle avait initialement accepté que le chien reste chez son mari après la séparation, l’épouse revient sur sa décision et, à l’occasion d’une promenade avec l’animal, décide de ne plus le rendre à son mari.

Contrarié par cet enlèvement, le mari organise une riposte, qu’il exécute quelques jours plus tard accompagné de sa sœur et d’une amie. Le 22 juin 2012, les trois attendent l’épouse près de chez elle pour lui enlever le chien. À cet occasion, ils commettent des voies de fait à l’encontre de la femme.

Suite à cet incident, les époux s’accusent mutuellement de violences conjugales, plus particulièrement de voies de fait répétées commises entre 2010 et 2012. En 2013, ils trouvent un accord et demandent la suspension de la procédure qui est par la suite classée en application de l’art. 55a CP.

En début d’année 2014, l’époux et les deux participantes sont condamnés pour voies de fait par le tribunal de première instance, jugement confirmé ensuite sur appel.

Le mari et une des participantes interjettent recours en matière pénale au Tribunal fédéral en demandant leur acquittement.… Lire la suite

La détention préventive pour risque de récidive

ATF 143 IV 9 | TF, 23.11.2016, 1B_373/2016*

Faits

Un individu accusé d’attouchements sexuels sur une fillette de neuf ans est mis en détention préventive. Par la suite, la détention préventive est prolongée en raison du risque de récidive. Le prévenu recourt contre la décision de prolonger la détention préventive. Débouté par l’instance cantonale supérieure, il forme recours auprès du Tribunal fédéral.

Dans ce contexte, le Tribunal fédéral est appelé à réexaminer sa jurisprudence selon laquelle le risque de récidive ne peut justifier la détention avant jugement que lorsque le pronostic est très défavorable.

Droit

La détention avant jugement peut être ordonnée en particulier lorsque le prévenu est fortement soupçonné d’avoir commis un crime ou un délit et qu’il y a sérieusement lieu de craindre qu’il compromette sérieusement la sécurité d’autrui par des crimes ou des délits graves après avoir commis des infractions du même genre (art. 221 al. 1 let. c CPP). Selon la jurisprudence fédérale établie sous l’empire des anciennes procédures pénales cantonales, au regard de la grave atteinte à la liberté personnelle du prévenu qu’implique la détention, le maintien en détention avant jugement n’est justifié par le risque de récidive que si (1) de graves infractions sont à craindre et (2) le pronostic est très défavorable.… Lire la suite