Publications par Célian Hirsch

La reconnaissance d’une décision de faillite étrangère (LDIP 166)

ATF 141 III 222 | TF, 27.03.2015, 5A_248/2014*

Faits

Le tribunal de Rotterdam (Pays-Bas) ouvre une procédure d’insolvabilité à l’encontre d’une société néerlandaise. L’administrateur de cette procédure demande au Tribunal cantonal de Zug de reconnaître le jugement néerlandais, afin de pouvoir agir en Suisse.

Le Tribunal cantonal et l’Obergericht refusent de reconnaître le jugement au motif que le droit néerlandais ne respecte pas la condition de la réciprocité prévue par l’art. 166 al. 1 let. c LDIP.

L’administrateur exerce un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit trancher la question de la réciprocité du droit néerlandais, c’est-à-dire déterminer si le droit néerlandais permettrait de reconnaître un jugement suisse dans une situation similaire.

Droit

L’art. 166 al. 1 LDIP subordonne la reconnaissance d’une décision de faillite étrangère à trois conditions. L’une d’elles est la condition de réciprocité du droit étranger (art. 166 al. 1 let. c LDIP). Cette condition est remplie si le droit étranger reconnaît les conséquences d’une faillite suisse d’une manière semblable, sans pour autant qu’il soit nécessaire que la reconnaissance soit forcément identique.

Le Tribunal fédéral rappelle que la jurisprudence européenne tend à assouplir cette condition de réciprocité. De même, la Suisse semble suivre cette tendance, en particulier avec le nouvel art.Lire la suite

L’imputation d’une détention provisoire sur une mesure thérapeutique institutionnelle

ATF 141 IV 236 | TF, 23.04.2015, 6B_385/2014*

Faits

Un prévenu est mis en détention provisoire et en détention pour des motifs de sûreté durant 298 jours. À la suite de la procédure pénale, le Bezirksgericht de Winterthur le condamne à 90 jours-amendes et ordonne une mesure thérapeutique institutionnelle à son encontre. En outre, il le dédommage pour les 208 jours de détention excessive.

L’Obergericht confirme le jugement. Le Ministère public exerce alors un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Selon lui, on ne saurait retenir une détention excessive, en raison du fait que la détention provisoire du prévenu doit être imputée sur la mesure thérapeutique institutionnelle ordonnée.

Le Tribunal fédéral doit alors trancher la question de savoir si une détention provisoire peut être imputée sur une mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l’art. 59 CP.

Droit

Le Tribunal fédéral constate que la question de l’imputation sur la détention provisoire d’une mesure privative de liberté au sens des art. 56 ss CP n’est pas réglée par la loi. L’art. 51 CP se contente de disposer que « [l]e juge impute sur la peine la détention avant jugement subi par l’auteur dans le cadre de l’affaire qui vient d’être jugée ou d’une autre procédure ».… Lire la suite

Les conditions de détention à Champ-Dollon et les fouilles des détenus

ATF 141 I 141 | TF, 07.04.2015, 6B_14/2014*

Faits

Soupçonné d’avoir commis plus d’une dizaine de cambriolages, un prévenu est placé en détention provisoire dans la prison de Champ-Dollon à Genève. Sept mois plus tard, il dépose une demande de mise en liberté en se plaignant des conditions de détention et fait une demande en indemnisation. Ses demandes sont refusées par la Cour de justice.

Il interjette alors un recours en matière pénale contre ce jugement. Outre son acquittement, il demande une indemnisation pour son tort moral subi à cause des conditions de détention et pour les fouilles à nu dont il a systématiquement fait l’objet.

Le Tribunal fédéral doit alors trancher la question de savoir si les conditions de détention ainsi que les fouilles à nu qu’a subi le requérant contreviennent aux art. 3 CEDH7 Cst. et 3 CPP.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler sa  nouvelle jurisprudence (ATF 140 I 125) concernant les conditions de détention minimales devant être respectées afin d’éviter une atteinte à la dignité humaine du détenu au sens de l’art. 3 CEDH (interdiction de la torture). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral avait considéré qu’un détenu disposant d’une cellule avec un espace individuel de 4 m2 ne subissait pas un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’art.Lire la suite

Un statut Facebook peut-il être une menace alarmant la population (CP 258) ?

ATF 141 IV 215 | TF, 08.04.2015, 6B_256/2014*

Faits

Alors qu’il vient de rater son examen de maturité et qu’il est déçu de n’avoir reçu que peu de messages Facebook pour son anniversaire, un jeune publie un statut Facebook dans lequel il indique « Je vous anéantis tous (…) PAN!!! PAN!!! PAN !!! » (traduction libre du suisse-allemand). Ce statut est visible pour ses 290 amis ainsi que les amis de ceux qui likent ce statut.

Le Ministère public zurichois le condamne pour « Menaces alarmant la population » au sens de l’art. 258 CP. Suite à un recours, le juge unique, puis l’Obergericht le condamnent uniquement pour tentative de menaces alarmant la population. L’Obergericht retient que le cercle de personnes qu’il atteint avec son statut Facebook ne peut être considéré comme un cercle privé, mais, au contraire, que la menace est faite publiquement (jugement de l’Obergericht zurichois du 25.11.2013, SB130371). Le jeune recourt alors au Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir si une menace générale publiée sur Facebook peut tomber sous le coup de l’art. 258 CP.

Droit

L’art. 258 CP prévoit que « Celui qui aura jeté l’alarme dans la population par la menace ou l’annonce fallacieuse d’un danger pour la vie, la santé ou la propriété sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire ».… Lire la suite

La violation de l’obligation d’informer l’assureur (CP 146 et LPC 31)

ATF 140 IV 206

Faits

Un accidenté est au bénéfice de diverses rentes. Sa femme reçoit une somme d’argent en héritage, ce dont il n’informe pas le Service des prestations complémentaire du canton de Genève (SPC). En 2012, lorsque ce service l’apprend, il lui demande la restitution de montants reçus entre 2005 et 2012. L’accidenté recourt auprès de la Cour de justice en invoquant la péremption du droit au remboursement des prestations reçues avant 2007, argument accepté par cette Cour.

Le SPC interjette alors un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Selon lui, puisque les conditions de l’infraction de l’art. 146 al. 1 CP (escroquerie) ou, subsidiairement, de l’art. 31 al. 1 let. d LPC (manquement à l’obligation de communiquer) seraient remplies, le délai de péremption pénal s’appliquerait.

Le Tribunal fédéral doit alors trancher la question de l’application de l’art. 146 al. 1 CP ou, subsidiairement, de l’art. 31 al. 1 let. d LPC lorsqu’un assuré ne communique pas un changement de circonstances.

Droit

L’art. 24 al. 2 LPGA dispose que le droit de demander la restitution de prestations indûment touchées s’éteint au plus tard cinq ans après le versement de la prestation, sauf si un délai plus long est prévu par le droit pénal.… Lire la suite