Publications par Arnaud Nussbaumer-Laghzaoui

La curatelle de représentation en paternité (art. 308 al. 2 CC)

ATF 142 III 545 | TF, 15.07.2016, 5A_220/2016*

Faits

Le 8 juin 2015, la Justice de paix est avisée du fait que la filiation entre un père et sa fille née quelques jours plus tôt n’est pas établie. Le 10 juin, la Justice de paix requiert de la mère qu’elle invite le père à reconnaitre sa fille, faute de quoi l’instauration d’une curatelle aux fins d’établir la filiation serait envisagée.

Le 24 juin 2015, la mère informe la justice de paix que « pour des motifs strictement personnels », elle ne désire pas divulguer l’identité du père. Elle ajoute être capable d’assumer l’entretien de sa fille et de veiller à ses intérêts, si bien qu’il n’y aurait pas besoin de nommer un curateur.

Par décision du 10 septembre 2015 confirmée par le Tribunal cantonal, la Justice de paix institue en faveur de la fille une curatelle de représentation en paternité au sens de l’art. 308 al. 2 CC. Agissant à titre personnel en tant que représentante légale de sa fille, la mère recourt au Tribunal fédéral. Celui-ci est amené à trancher la question de savoir si l’instauration d’une curatelle de représentation en paternité était en l’espèce justifiée.… Lire la suite

Le contenu du dispositif du jugement pénal

ATF 142 IV 378 | TF, 08.08.2016, 6B_988/2015*

Faits

Le Ministère public reproche à un prévenu d’avoir perçu entre 2000 et 2011 sur la base de fausses déclarations concernant son aptitude au travail une rente invalidité et indemnités journalières pour un montant total de 697’950 francs. Par ailleurs, laissant accroire par de fausses déclarations qu’il était en bon état de santé, le prévenu aurait conclu en mai 2004 un contrat d’assurance avec un assureur et se serait ainsi assuré un revenu mensuel de 12’000 francs. En outre, entre 2006 et 2008, sur la base de faux certificats médicaux, il aurait touché de ce même assureur 154’828 francs. Enfin, sur la base d’un formulaire A falsifié, il aurait obtenu d’une banque qu’elle accepte un transfert de 550’000 francs en cash.

Le tribunal de première instance condamne le prévenu pour escroquerie par métier et faux dans les titres à quatre ans de peine privative de liberté. Considérant qu’une partie des faits reprochés pour la période antérieure au mois de mai 2014 ne peuvent pas être qualifiés d’escroquerie, le tribunal de deuxième instance admet partiellement l’appel du prévenu. Elle ne prononce toutefois pas d’acquittement pour ces faits.

Le prévenu recourt au Tribunal fédéral et conclut notamment à la rectification du dispositif de l’arrêt de deuxième instance.… Lire la suite

Le droit à l’oralité des débats devant l’autorité de protection de l’adulte et de l’enfant

ATF 142 I 188TF, 02.06.2016, 5A_724/2015*

Faits

L’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte retire à un couple la garde de leurs trois enfants et les place dans un foyer. Le tribunal administratif cantonal rejette le recours formé par les parents contre cette décision.

Se prévalant de l’art. 6 ch. 1 CEDH, les parents recourent au Tribunal fédéral. Ils reprochent aux instances précédentes d’avoir violé leur droit à un procès équitable notamment en les privant de leur droit  à la tenue d’une audience publique et à l’oralité des débats. Ils concluent donc à l’annulation de l’arrêt et au renvoi de la cause à l’instance précédente.

Sur la base de l’art. 6 ch. 1 CEDH, le Tribunal fédéral doit déterminer si en l’espèce les parents auraient dû bénéficier d’un droit à la tenue d’une audience publique et à l’oralité des débats.

Droit

Dans un premier temps, le Tribunal fédéral rappelle que l’art. 6 ch. 1 CEDH consacre explicitement un droit à la publicité des débats : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement ».

Se fondant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le Tribunal fédéral considère que le droit à la publicité des débats a pour but d’empêcher toute forme de justice secrète et de permettre un contrôle démocratique du travail des autorités.… Lire la suite

La consorité simple passive (art. 71 al. 1 CPC)

ATF 142 III 581TF, 29.06.2016, 4A_625/2015*

Faits

Trois sociétés entreprennent d’ériger sur le terrain appartenant à l’une d’elles une station de lavage (car wash). Sur la base de trois contrats différents, tous passés avec le même entrepreneur, la première de ces sociétés se fait livrer la station de lavage proprement dite, la deuxième des box de lavage extérieur, et la troisième un restaurant contigu. Les trois sociétés ne payant pas le prix convenu, l’entrepreneur les actionne conjointement en justice. Le Handelsgericht du Canton d’Aarau reconnait le bien-fondé de l’action de l’entrepreneur et condamne les trois sociétés au paiement de leurs dettes respectives.

Les trois sociétés forment recours au Tribunal fédéral et reprochent à l’instance précédente de leur avoir reconnu la qualité de consorts simples. La question à laquelle doit répondre le Tribunal fédéral est celle de savoir si les trois sociétés forment une consorité simple et si l’entrepreneur pouvait effectivement les rechercher ensemble.

Droit

Aux termes de l’art. 71 al. 1 CPC, la consorité simple suppose que les droits et les devoirs des personnes recherchées résultent de faits ou de fondements juridiques semblables.

Le Tribunal fédéral doit se prononcer pour la première fois sur la notion de « faits ou fondements juridiques semblables ».… Lire la suite

La compétence territoriale pour connaître de la liquidation d’une société simple (art. 5 par. 1 CL)

ATF 142 III 466 | TF, 23.06.2016, 4A_445/2015*

Faits

Un ressortissant français et sa concubine forment ensemble une société simple pour ce qui concerne les activités professionnelles du concubin. Les concubins vivent sous le même toit dans le canton de Vaud.

Au décès du concubin, la concubine demande la dissolution et la liquidation de la société simple formée par elle et le de cujus. Ce faisant, elle entreprend une action en paiement contre les héritiers, lesquels sont domiciliés en France et en Espagne.

Le Tribunal de première instance se déclare incompétent et juge que l’action de la concubine est irrecevable. L’appel de celle-ci est admis, le Tribunal cantonal considérant que l’action doit être déclarée recevable. Les héritiers recourent au Tribunal fédéral contre cet arrêt.

La question posée par cet arrêt est de savoir si les deux héritiers peuvent être attraits devant les juridictions vaudoises pour l’action fondée sur la liquidation de la société simple formée par les concubins.

Droit

Après avoir reconnu l’application ratione materiae de la Convention de Lugano, le Tribunal fédéral répond à la question posée par l’arrêt en deux temps  :

Dans un premier temps, le Tribunal fédéral détermine si en l’espèce la compétence se définit selon l’art.Lire la suite