Les frais de défense du prévenu à la charge de la partie plaignante

TF, 18.08.2015, 6B_810/2014*

Faits

Le ministère public rend une ordonnance de classement dans une procédure à l’encontre de plusieurs prévenus. La partie plaignante forme un recours contre cette ordonnance. La Chambre des recours rejette le recours de la partie plaignante et alloue aux prévenus une indemnité pour frais de défense à charge de l’État.

Contre cette décision, le Ministère public forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. En s’appuyant sur l’ATF 139 IV 45, il estime que les frais de défenses du prévenu doivent être mis à la charge de la partie plaignante et non de l’État.

Le Tribunal fédéral doit se déterminer sur la question de savoir dans quelle mesure les frais de défense d’un prévenu peuvent être mis à la charge de la partie plaignante.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler le principe selon lequel la responsabilité de l’action pénale incombe à l’État. Ainsi, c’est à l’État de prendre en charge les frais de défense du prévenu quand celui-ci a gain de cause (art. 429 al. 1 CPP). Dans l’ATF 139 IV 45, il a admis une exception à ce principe en se fondant sur l’art. 432 CPP.… Lire la suite

La définition du fonctionnaire dans le Code pénal

ATF 141 IV 329TF, 19.08.2015, 6B_1110/2014*

Faits

Entre 2000 et 2010, il est reproché à un prévenu, qui travaillait pour la Caisse de pensions du canton de Zurich, d’avoir commis des actes de corruption et d’avoir ainsi causé un dommage de plus de 45 millions à cette Caisse. Le Tribunal de première instance condamne le prévenu pour corruption passive à plusieurs reprises (art. 322quater CP), gestion déloyale des intérêts publics à plusieurs reprises (art. 314 CP), de blanchiment d’argent (art. 305bis CP) et de violation du secret de fonction (art. 320 CP) à une peine privative de liberté de 6 ans et 3 mois ainsi qu’au paiement d’une amende de 6’000 francs.

Le Tribunal cantonal, sur recours du prévenu et du Ministère public, confirme le jugement, mais réduit la peine à 6 ans de prison et le condamne à des jours-amende avec sursis à la place de l’amende. Le prévenu recourt au Tribunal fédéral en argumentant notamment qu’il n’était pas un fonctionnaire au sens de l’art. 110 al. 3 CP. En effet, à partir de 2004, la Caisse serait sortie de la structure cantonale. De plus, il aurait uniquement géré les intérêts des assurés de la Caisse à l’exclusion d’intérêts publics, ce qui empêcherait de le qualifier de fonctionnaire.… Lire la suite

La prise en compte du minimum vital dans le séquestre pénal

ATF 141 IV 360 | TF, 10.08.2015, 1B_175/2015*

Faits

En avril 2014, le Ministère public genevois ordonne la mise sous séquestre des avoirs bancaires d’une personne prévenue d’abus de confiance et de faux dans les titres en vue de garantir une possible créance compensatrice (art. 71 al. 3 CP). En raison d’une incapacité totale de travail, l’assurance perte de gain du prévenu lui verse un capital rétroactif d’environ 60’000 francs sur l’un des comptes bancaires placés sous séquestre. Dès cette date, l’assurance lui verse une indemnité mensuelle pour perte de gain sur ce même compte. Le 9 février 2015, le prévenu dépose une requête tendant à la levée partielle de son séquestre à concurrence de 3’800 francs. Il fait valoir que son minimum vital n’est plus garanti. Le Ministère public rejette la requête. Sur recours, la Chambre pénale de recours confirme cette décision.

Le prévenu forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Le Tribunal fédéral doit se prononcer sur la question de savoir si l’autorité pénale doit tenir compte du minimum vital du prévenu lorsqu’elle se prononce sur le séquestre pénal en vue de la garantie d’une créance compensatrice.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que selon la systématique du CPP, seul le séquestre en couverture des frais impose expressément de prendre en compte le revenu et la fortune du prévenu et de garantir le minimum vital du droit des poursuites (art.Lire la suite

L’expulsion du locataire en procédure pour cas clairs

ATF 141 III 262 | TF, 11.08.2015, 4A_184/2015*

Faits

Deux sociétés concluent un contrat de bail portant sur un local commercial à Zurich. Le 12 novembre 2014, la société bailleresse résilie le contrat pour le 31 décembre 2014 en invoquant la demeure du locataire pour le paiement du loyer (art. 257d CO). Le 9 janvier 2015, elle introduit une requête d’expulsion en procédure pour cas clairs au sens de l’art. 257 CPC.

La société locataire s’y oppose en soutenant qu’elle a déposé le 18 décembre 2014 une action en annulation du congé qui est encore pendante devant l’autorité de conciliation. Selon la locataire, l’art. 64 al. 1 lit. a CPC empêcherait de déposer une requête d’expulsion selon la procédure réservée aux cas clairs en raison du lien de litispendance.

Le Tribunal fédéral doit ainsi trancher la question de savoir si une action en protection contre les congés basée sur l’art. 271 ss CO empêche une procédure d’expulsion parallèle introduite selon l’art. 257 CPC.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’il avait déjà implicitement admis qu’un tribunal pouvait statuer sur une demande d’expulsion selon la procédure réservée pour cas clairs, même si le locataire avait attaqué la résiliation extraordinaire dans une autre procédure et que cette procédure était encore pendante.… Lire la suite

La recevabilité d’un recours contre le refus de retrancher une pièce du dossier pénal

ATF 141 IV 289 | TF, 29.07.2015, 1B_56/2015*

Faits

Le Ministère public rend une ordonnance pénale contre un prévenu. Celui-ci s’y oppose et demande qu’un procès-verbal d’audition effectué sans la présence de son avocat soit retiré du dossier et conservé à part jusqu’à la clôture de la procédure, comme le prévoirait l’art. 141 al. 5 CPP. Le Ministère public refuse d’entrer en matière sur la demande du prévenu qui recourt au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral est amené à se prononcer sur la question de savoir si un recours au Tribunal fédéral contre une décision refusant de retrancher un procès-verbal du dossier pénal est recevable.

Droit

En vertu de l’art. 131 al. 3 CPP, « les preuves administrées avant qu’un défenseur ait été désigné, alors même que la nécessité d’une défense aurait dû être reconnue, ne sont exploitables qu’à condition que le prévenu renonce à en répéter l’administration ».

La décision sur l’exploitation des preuves (art. 140 et 141 CPP) ne met pas fin à la procédure et constitue une décision incidente. Par conséquent, le recourant doit démontrer l’existence d’un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 lit.Lire la suite