La titularité d’une marque dans un groupe de sociétés

ATF 143 III 216 – TF, 27.02.2017, 4A_489/2016*

Faits

Reico & Partner Vertiebs GmbH, société allemande (la “société-mère“), détient pendant plusieurs années l’entier du capital de Reico Vital Systeme GmbH, Sàrl suisse (la “société-fille“). Toutes deux déploient leur activité dans le même domaine. Par la suite, la société-mère cède 70 % de sa participation dans la société-fille à un tiers.
La société-mère détient la marque allemande “REICO VITAL SYSTEME” depuis 2007. La société-fille est titulaire de deux marques suisses comprenant le mot “REICO”  depuis le mois de décembre 2011. Le gérant de la société-mère est titulaire depuis 2013 de deux autres marques suisses incluant le mot “Reico”, dont la présentation graphique est très similaire à celle des marques détenues par la société-fille. Après la vente des parts sociales de la société-fille, un litige quant à la titularité et l’utilisation de ces diverses marques et noms de domaines survient entre la société-fille d’une part et la société-mère (désormais actionnaire minoritaire) et son gérant d’autre part.

Le tribunal de commerce du canton de Saint-Gall tranche en faveur de la société-mère et de son gérant. Il interdit à la société-fille d’utiliser les marques et le nom de domaine litigieux et en ordonne le transfert à la société-mère.… Lire la suite

La contestation des décisions de l’AG par l’actionnaire minoritaire

ATF 143 III 120 | TF, 28.02.2017, 4A_579/2016*

Faits

Deux actionnaires détiennent ensemble 50 % du capital-actions d’une SA, notamment sous la forme d’actions à droit de vote privilégié qui leur assurent la majorité des voix à l’assemblée générale de la société. Un troisième actionnaire (“l’actionnaire minoritaire”) détient l’autre moitié du capital-actions, uniquement sous la forme d’actions ordinaires. Les statuts de la société prévoient qu’à défaut de disposition légale ou statutaire contraire, les décisions de l’assemblée générale sont prises à la majorité absolue des voix présentes ou représentées. En cas d’égalité des votes, les élections font l’objet d’un tirage au sort. Le président a voix prépondérante pour les autres décisions.

Lors d’une assemblée générale, l’actionnaire minoritaire refuse la réélection du réviseur de la société, contre l’avis des autres actionnaires. Ces derniers convoquent alors une nouvelle assemblée générale et modifient à cette occasion les statuts, de façon à ce que le président ait voix prépondérante pour toutes les décisions de l’assemblée générale, y compris en matière d’élections. Ceci fait, la réélection du réviseur est à nouveau soumise à l’assemblée. Comme précédemment, les actionnaires majoritaires votent pour et l’actionnaire minoritaire contre. Conformément aux statuts modifiés, le vote du président tranche en faveur de la réélection.… Lire la suite

Un contrat de crédit-cadre peut-il constituer une société simple ?

TF, 13.12.2016, 4A_251/2016, 4A_265/2016

Faits

Deux sociétés souhaitent acquérir un parc immobilier et fonder une société d’investissement à capital variable (SICAV). Elles se tournent vers une banque pour le financement. La banque reconnaît l’importance stratégique du projet et se dit prête à assurer sa prise en charge “par un groupe de projet bénéficiant des meilleures compétences de [son] organisation”. Elle décide ainsi d’octroyer le crédit et les parties signent à cet effet un contrat-cadre concernant les crédits sur gage immobilier portant sur un montant de 111 millions de francs. Outre la fourniture de plusieurs garanties, le contrat prévoit que la banque fonctionnera comme directeur de fond et dépositaire. La banque amène même un investisseur supplémentaire qui participe au projet.

Par la suite, un litige surgit en lien avec les sûretés à fournir par les emprunteurs et la banque se refuse d’accorder la deuxième tranche du crédit et résilie le contrat de prêt avec effet immédiat. Les sociétés demandent alors à avoir accès à l’ensemble des documents en lien avec les sûretés, ce que la banque refuse. Les sociétés actionnent la banque en reddition de compte en invoquant en particulier l’art. 541 CO régissant le droit de tout associé d’être informé sur la marche des affaires sociales.… Lire la suite

Le jugement de première instance dans l’affaire Sika

Kantonsgericht Zug, 27.10.2016, A3 2015 27

Faits

Sika AG (ou la “société”) fait l’objet d’un conflit entre certains membres de son conseil d’administration et la famille Burckard qui souhaite vendre sa participation dans la société au groupe français Saint-Gobain.

Le capital-actions de Sika AG se compose d’actions nominatives liées non cotées (valeur nominale 0.10 francs) ainsi que d’actions au porteur cotées (valeur nominale 0.60 francs). Par l’intermédiaire de la société Schenker-Winkler Holding AG (la “Holding”), la famille Burckard détient 99.87 % des actions nominatives de Sika, soit 16.97 % de l’ensemble du capital-actions. Grace au système d’actions à droit de vote privilégié prévu par les statuts de Sika (une action = un vote), la Holding contrôle la société avec le 52.92 % des voix.

En 2014, la famille Burckard conclut un contrat de vente d’actions (“SPA”) avec Saint-Gobain portant sur l’ensemble des actions de la Holding au prix de 2.75 milliards de francs. Six des neuf membres du conseil d’administration de Sika ainsi que la direction s’opposent d’emblée à la transaction. La Holding demande au conseil d’administration de convoquer une assemblée générale extraordinaire ayant pour objet le remplacement d’une partie des membres du conseil d’administration de Sika. Le conseil d’administration refuse cette requête en faisant valoir que le droit de vote de la Holding est limité à 5 % par une clause statutaire applicable dans le cas d’espèce.… Lire la suite

Les pouvoirs de signature pouvant être inscrits au RdC

ATF 142 III 204 TF, 03.03.2016, 4A_536/2015*

Faits

Une société requiert l’inscription au registre du commerce des droits de signature de ses administrateurs. Chaque membre du conseil d’administration a un pouvoir de signature collective à deux avec certains autres membres nommément désignés. Le registre du commerce refuse l’inscription au motif qu’un droit de signature ne peut être restreint à la signature conjointe avec une personne précise. Cette décision est confirmée par l’instance cantonale supérieure.

Sur recours de la société, le Tribunal fédéral est appelé à préciser quelles modalités de signature peuvent être inscrites au registre du commerce.

Droit

La jurisprudence du Tribunal fédéral rendue sous l’empire de l’ancien droit admettait des pouvoirs de signature collectifs décrits avec précision, par exemple s’agissant des personnes conjointement avec lesquelles la signature peut être exercée (ATF 121 III 368). L’instance précédente a cependant retenu que cette jurisprudence ne trouvait plus application. En effet, elle se référait à l’art. 641 ch. 8 aCO en vertu duquel le mode d’exercice de la représentation (« die Art der Ausübung der Vertretung ») devait être inscrit au registre du commerce. Or, cette disposition a été abrogée lors de la révision du droit de la SA et de l’Ordonnance sur le registre du commerce en 2008.… Lire la suite