La titularité d’un compte bancaire commun en matière de rappel d’impôt simplifié

TF, 30.05.2018, 2C_807/2017

Le rappel d’impôt simplifié pour héritiers porte uniquement sur les éléments soustraits par le défunt. Lorsque l’épouse du défunt est cotitulaire avec ce dernier d’un compte bancaire, elle est en droit de démontrer que le compte concerné était en la propriété exclusive du défunt. L’épouse du défunt bénéficie ainsi du rappel d’impôt simplifié pour héritiers. À défaut d’apporter cette preuve, l’épouse du défunt est considérée comme copropriétaire du compte et le rappel d’impôt ordinaire lui est alors applicable.

Faits

Un exécuteur testamentaire informe le Service des contributions neuchâtelois de l’existence d’un compte bancaire non déclaré par un défunt. Bien que l’épouse du défunt soit cotitulaire de la relation bancaire non déclarée, l’exécuteur testamentaire sollicite au Service de procéder au rappel d’impôt simplifié pour héritiers en précisant que le défunt avait la « propriété exclusive » du compte.

Concernant la part du compte dont le défunt était titulaire, le Service procède au rappel d’impôt simplifié pour les héritiers sur trois ans. Quant à l’autre part du compte dont la veuve était cotitulaire, le Service procède au rappel d’impôt ordinaire sur dix ans.

Les héritiers contestent le rappel d’impôt ordinaire et demandent au Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel de soumettre l’ensemble du compte au rappel d’impôt simplifié.… Lire la suite

La double incrimination en matière d’escroquerie fiscale

TPF, 30.10.2018, RR.2018.210

En matière d’entraide pénale internationale au sujet d’une escroquerie fiscale, il revient à l’État suisse requis d’analyser selon le principe de la double incrimination si les faits de la demande d’entraide sont réprimés en Suisse comme une escroquerie fiscale au sens de l’art. 14 al. 2 DPAIl revient toutefois à l’État requérant d’exposer des soupçons suffisamment précis pour constater qu’une escroquerie fiscale a été commise. 

Faits

Les autorités françaises dirigent en France une enquête pour soustraction frauduleuse à l’impôt et blanchiment aggravé à l’encontre du gérant d’une société. Elles soupçonnent que le gérant utilise un circuit atypique de ventes de vins entre des sociétés françaises ainsi qu’une autre société située dans la Principauté d’Andorre. La société andorrane serait une pure adresse de domiciliation dont le but serait de dissimuler des revenus perçus en France.

Les autorités françaises sollicitent des autorités suisses l’entraide judiciaire internationale en matière pénale afin d’obtenir les relevés des comptes bancaires suisses dont le gérant est le titulaire.

L’Office fédéral de la justice délègue l’exécution de la demande au Ministère public du canton du Valais (MP), canton dans lequel est situé l’institut bancaire concerné. Au vu du caractère fiscal de la demande, le MP demande un avis sur la question à l’Administration fédérale des contributions (AFC).… Lire la suite

La possibilité pour le Royaume-Uni de renoncer de manière unilatérale au Brexit

CJUE, Wightman and Others, ECLI:EU:C:2018:999 (10.12.2018)

La Cour de Justice de l’Union européenne retient qu’un État membre de l’Union européenne peut retirer de manière unilatérale sa notification de retrait de l’Union européenne conformément à l’art. 50 TUE aussi longtemps qu’aucun accord de retrait n’est conclu entre l’Union européenne et cet État membre ou, à défaut d’accord, tant que le délai de deux ans qui suit la notification de retrait n’a pas expiré. Le Royaume-Uni peut dès lors renoncer au Brexit de manière unilatérale jusqu’à l’adoption d’un accord de retrait avec l’Union européenne ou, à défaut d’un tel accord, jusqu’au 29 mars 2019.

Faits

Le 23 juin 2016, le Royaume-Uni s’est majoritairement prononcé par référendum en faveur d’une sortie de l’Union européenne. Le 29 mars 2017, la Première ministre du Royaume-Uni a notifié au Conseil européen l’intention de quitter l’Union européenne en application de l’art. 50 TUE. Des membres du Parlement du Royaume-Uni, des membres du Parlement écossais et des membres du Parlement européen ont ouvert une procédure devant la Court of Session d’Ecosse pour demander à la Cour écossaise de se prononcer de manière déclaratoire sur la question de savoir si le Royaume-Uni pouvait unilatéralement révoquer sa notification de retrait de l’Union européenne.… Lire la suite

Le partage de la prévoyance professionnelle et les « justes motifs » au sens de l’art. 124 b CC

ATF 145 III 56 | TF, 06.11.2018, 5A_443/2018*

Le comportement des époux durant le mariage ne justifie en principe pas le refus du partage de la prévoyance professionnelle. Cependant, dans des situations particulièrement choquantes, ceci peut constituer un juste motif permettant le refus total ou partiel du partage, l’emportant ainsi sur les considérations économiques liées aux besoins de prévoyance des époux.  

Faits

Une épouse introduit une action en divorce après 45 ans de mariage, alors que les deux époux ont atteint l’âge de la retraite.

Pendant la durée du mariage, l’épouse a toujours travaillé. L’époux a en revanche gravement violé ses obligations d’entretien envers la famille, n’a pas contribué à la prise en charge des enfants ni aux tâches du ménage et a exercé un contrôle strict sur la vie de son épouse, au point de la priver de son autonomie. En outre, il a maltraité sa famille, tant physiquement que psychologiquement, et a joué une partie du salaire de son épouse à des jeux de hasard, en privant ainsi parfois sa famille de l’argent nécessaire pour subvenir à ses besoins de base.

En application du nouveau droit de la prévoyance professionnelle (art. 7d al. 2 Tit. fin.Lire la suite

Le licenciement immédiat de l’employé harceleur

TF, 10.10.2018, 4A_105/2018

Un cadre qui a adopté des gestes et propos grossiers et à connotation sexuelle peut, selon la gravité, voir son contrat de travail résilié avec effet immédiat. Le fait que l’employé-e victime ne dépose pas de plainte pénale ne permet pas de retenir un consentement tacite aux gestes et propos déplacés. De même, une ambiance « familière » ne saurait justifier un tel comportement.

Faits

Une société engage une personne en tant que cuisinier, puis comme chef du secteur hôtelier. En 2004, il est reproché à l’employé d’avoir adopté des comportements déplacés envers le personnel féminin. En 2013, une apprentie informe la direction que cet employé a des gestes et propos grossiers et à connotation sexuelle à son égard. Il lui aurait notamment demandé de se mettre à quatre pattes en l’appelant parfois « petite chérie » ou « petite cochonne ». De plus, il lui aurait donné des bisous et fait des caresses sur la joue. L’employé est dès lors licencié avec effet immédiat pour ce motif (ainsi que pour un second motif).

L’employé saisit le Tribunal des prud’hommes de l’arrondissement de la Sarine et demande des dommages-intérêts à titre de résiliation anticipée. Le Tribunal admet sa demande et condamne l’employeur à lui verser une indemnité à titre de licenciement anticipé ainsi qu’une seconde indemnité à titre de licenciement injustifié.… Lire la suite