L’exploitabilité de découvertes fortuites obtenues grâce à une balise GPS

ATF 144 IV 370TF, 02.11.2018, 1B_345/2018*

La mise en place de dispositifs techniques de surveillance aux fins de localiser une personne ou une chose (art. 280 let. c CPP) est soumise aux conditions prévues par l’art. 269 CPP (conditions pour la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication), applicable par renvoi de l’art. 281 al. 4 CPP, et non aux conditions prévues par l’art. 273 al. 1 CPP (identification des usagers, localisation et caractéristiques techniques de la correspondance), lequel est une norme particulière.

Faits

Une personne prévenue d’infractions graves à la LStup voit son véhicule surveillé au moyen de l’installation d’une balise GPS suite à l’autorisation rendue par le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Berne (TMC). Alors qu’il est sous surveillance, le prévenu commet à plusieurs reprises des excès de vitesse.

Par décision du 7 septembre 2016, le TMC admet la requête du Ministère public du canton de Berne qui désire pouvoir utiliser à l’encontre du prévenu les découvertes fortuites issues de la surveillance GPS. Le Ministère public notifie au prévenu cette décision contre laquelle ce dernier dépose un recours auprès de la Cour suprême du canton de Berne.

La Cour admet le recours, annule la décision du TMC et ordonne la destruction immédiate des preuves (BK 2017 447).… Lire la suite

Le changement de nom et la notion de « motifs légitimes » (art. 30 al. 1 CC)

ATF 145 III 49 | TF, 26.10.18, 5A_461/2018*

La notion de « motifs légitimes » de l’art. 30 al. 1 CC doit être appréciée de manière plus souple que celle de « justes motifs » de l’ancienne version du même article, sans se limiter aux requêtes en lien avec un changement d’état civil ou des enfants issus de familles recomposées. La composante subjective ou émotionnelle de la motivation du requérant ne peut plus être écartée comme par le passé, pour autant toutefois que les raisons invoquées atteignent une certaine gravité et ne soient pas purement futiles.

Faits

Un binational suisse et français actif dans l’immobilier et connu sous le nom de « A-B » renonce à sa nationalité française. Désormais résidant en Suisse, il demande l’autorisation de modifier son nom composé d’un seul patronyme (« A ») – lequel résulte notamment de son acte de naissance français – en un double nom (« A B » ou « A-B », avec ou sans trait d’union) au Chef du Département de la formation et de la sécurité (aujourd’hui de l’économie et de la formation; DEF) du canton du Valais. Débouté, l’intéressé recourt contre la décision du DEF auprès du Conseil d’Etat valaisan, puis auprès du Tribunal cantonal valaisan.… Lire la suite

La validité d’un termination agreement en droit du travail

TF, 23.10.2018, 4A_13/2018, 4A_17/2018

Un termination agreement doit être qualifié de convention de résiliation s’il prévoit la renonciation par l’employé à la protection des art. 336 ss CO. L’employé peut valablement renoncer à se prévaloir de ces dispositions, à condition que l’art. 341 al. 1 CO soit respecté, ce qui se détermine en examinant si la convention prévoit des concessions réciproques. A cet égard, l’employé ne saurait renoncer au droit de faire contrôler judiciairement la validité de l’accord des parties.

Faits

Pour son activité en tant que trader en matières premières, un employé perçoit un salaire annuel de CHF 300’000 ainsi qu’un bonus discrétionnaire. Pour l’année 2012,  le bonus dû à l’employé est fixé à USD 3’750’000 payable en trois tranches de respectivement USD 1’650’000 (première tranche, payable le 31 janvier 2013), USD 1’050’000 (deuxième tranche, payable le 31 janvier 2014) et USD 1’050’000 (troisième tranche, payable le 31 janvier 2015). Le paiement de ces montants est soumis à la condition que l’employé ne donne pas sa démission ou qu’il ne fasse pas l’objet d’un licenciement avant le 31 décembre de l’année précédant la date du paiement.

Le 16 novembre 2013, la société résilie le contrat de travail de l’employé avec effet au 31 janvier 2014.… Lire la suite

L’action partielle en cas de cumul objectif d’actions

ATF 144 III 452TF, 28.08.18, 4A_442/2017*

En cas d’action partielle fondée sur un cumul objectif d’actions, il n’est pas nécessaire pour le demandeur d’indiquer dans quel ordre et/ou quelle étendue les différentes prétentions sont invoquées. Cet arrêt constitue un revirement de jurisprudence par rapport à l’ATF 142 III 683 (résumé in: LawInside.ch/345). 

Faits 

Une banque introduit une action en responsabilité fondée sur le droit des sociétés auprès du Tribunal de commerce du canton d’Argovie. L’action est dirigée contre l’administrateur d’une société en faillite, l’organe de révision de cette même société, ainsi que la société agissant en qualité d’organe de fait de la société en faillite.

Dans sa demande, la banque conclut au paiement par les défendeurs, solidairement responsables, de la somme de CHF 3’000’000, plus intérêts à 6%, sous réserve d’une action ultérieure (la totalité des dommages s’élevant à près de CHF 6’000’000 au total).

Après s’être déclaré compétent à raison du lieu, le Tribunal de commerce n’entre pas en matière sur la demande. Selon le tribunal argovien, le recourant aurait soulevé six postes de dommage, se basant sur différents complexes de faits (à savoir plusieurs violations de leurs obligations par les défendeurs) sans préciser l’ordre et l’étendue des prétentions.… Lire la suite

Le droit d’être entendu des héritiers dans la procédure d’inventaire (CC 580 ss)

ATF 144 III 313 | TF, 17.07.2018, 5A_791/2017*

Une fois l’inventaire clôturé, un délai d’un mois est imparti aux héritiers pour consulter l’inventaire et pour déclarer notamment s’ils acceptent ou répudient la succession (cf. art. 584 al. 1 CC et art. 587 al. 1 CC cum art. 588 al. 1 CC). En particulier, les héritiers ne sont pas en droit de présenter à ce stade une requête en modification de l’inventaire et de demander le report du délai pour déclarer s’ils acceptent ou répudient la succession. Ainsi, aucune violation de leur droit d’être entendu ne peut être retenue du fait que l’autorité n’entre pas en matière sur de telles requêtes.

Faits

Dans une succession, les héritiers sollicitent au Préfet de Bienne l’établissement d’un inventaire des biens de leur père défunt (cf. art. 580 ss CC). Le notaire chargé d’établir l’inventaire modifie celui-ci après différentes requêtes des héritiers. Une fois l’inventaire clôturé, le notaire communique celui-ci au Préfet.

Les héritiers sollicitent alors du Préfet la rectification de l’inventaire. Ils demandent également qu’aucun délai pour déclarer s’ils acceptent ou répudient la succession ne leur soit imparti avant que l’inventaire soit rectifié.

Le Préfet n’entre pas en matière sur la demande en rectification des héritiers et leur imparti un délai d’un mois pour déclarer s’ils acceptent ou répudient la succession (cf.… Lire la suite