La consorité simple passive (art. 71 al. 1 CPC)

ATF 142 III 581TF, 29.06.2016, 4A_625/2015*

Faits

Trois sociétés entreprennent d’ériger sur le terrain appartenant à l’une d’elles une station de lavage (car wash). Sur la base de trois contrats différents, tous passés avec le même entrepreneur, la première de ces sociétés se fait livrer la station de lavage proprement dite, la deuxième des box de lavage extérieur, et la troisième un restaurant contigu. Les trois sociétés ne payant pas le prix convenu, l’entrepreneur les actionne conjointement en justice. Le Handelsgericht du Canton d’Aarau reconnait le bien-fondé de l’action de l’entrepreneur et condamne les trois sociétés au paiement de leurs dettes respectives.

Les trois sociétés forment recours au Tribunal fédéral et reprochent à l’instance précédente de leur avoir reconnu la qualité de consorts simples. La question à laquelle doit répondre le Tribunal fédéral est celle de savoir si les trois sociétés forment une consorité simple et si l’entrepreneur pouvait effectivement les rechercher ensemble.

Droit

Aux termes de l’art. 71 al. 1 CPC, la consorité simple suppose que les droits et les devoirs des personnes recherchées résultent de faits ou de fondements juridiques semblables.

Le Tribunal fédéral doit se prononcer pour la première fois sur la notion de « faits ou fondements juridiques semblables ».… Lire la suite

La fusion de communes par initiative populaire

ATF 142 I 216TF, 03.06.2016, 1C_844/2013*

Faits

Dans le canton du Tessin, l’initiative populaire constitutionnelle « Avanti con le nuove città di Locarno e Bellinzona » (« Allons de l’avant avec les nouvelles villes de Locarno et Bellinzone ») obtient le nombre de signatures nécessaires et est soumise au Grand Conseil qui doit en déterminer la validité et la recevabilité. L’initiative vise à introduire un nouvel article constitutionnel qui prévoit la fusion de différentes communes (35 en tout) avec la Commune de Locarno et de Bellinzone.

Le parlement tessinois déclare irrecevable l’initiative au motif qu’elle viole le droit d’être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), le principe de l’unité de la matière ainsi que la Charte européenne de l’autonomie locale. Les initiants saisissent le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public pour violation de leurs droits politiques. Il se pose ainsi la question de l’admissibilité d’une fusion par voie d’initiative populaire constitutionnelle cantonale.

Droit

Le recours au Tribunal fédéral est directement ouvert lorsque des citoyens ayant le droit de vote se plaignent du fait qu’une initiative populaire n’a pas été soumise au scrutin populaire (cf.… Lire la suite

L’imposition d’un abandon de créance dépourvu de valeur (art. 16 al. 1 LIFD)

ATF 142 II 197

Faits

Une banque procède en faveur d’un client débiteur en difficulté financière à un abandon de créance à hauteur de 1’000’000 francs.

Dans sa décision de taxation, l’Administration fiscale cantonale impose au titre de revenu le montant de 1’000’000 francs, correspondant à la créance abandonnée par la banque. Le client forme une réclamation contre le bordereau de taxation, réclamation que l’Administration fiscale cantonale rejette. Le Tribunal administratif de première instance et la Cour de justice confirment le bordereau de taxation.

Le client forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit trancher la question de savoir si l’abandon de créance dont a bénéficié le client constitue un revenu imposable au sens de l’art. 16 al. 1 LIFD.

Droit

Selon l’art. 16 al. 1 LIFD, sont imposables « tous les revenus du contribuable, qu’ils soient uniques ou périodiques ». Selon la jurisprudence, l’abandon de créance bancaire en faveur d’un client débiteur est fiscalement considéré comme un revenu pour ce dernier (ATF 140 II 353, c. 2.2). Lorsque la dette remise est privée, il s’agit, selon la théorie de l’accroissement de la fortune nette, d’un revenu imposable en vertu de la clause générale de l’art 16 al.Lire la suite

Le prononcé d’une mesure thérapeutique à la suite d’une procédure simplifiée

ATF 142 IV 307TF, 13.06.16, 6B_171/2016*

Faits

A l’occasion d’une procédure simplifiée (art. 358 ss CPP) qui s’est déroulée en 2013, un prévenu est condamné à 2.5 ans de prison ferme pour de nombreux délits. Le prévenu purge sa peine privative de liberté. Cinq jours avant la fin de l’emprisonnement, le ministère public sollicite une modification de la sanction en mesure thérapeutique institutionnelle en se fondant sur l’art. 65 CP. La mesure thérapeutique s’appuie sur une expertise du prévenu ordonnée par le ministère public et effectuée un mois avant qu’il décide d’imposer la mesure. Le tribunal de première instance refuse la requête, mais le Tribunal cantonal y fait droit sur recours du ministère public. Le prévenu saisit alors le Tribunal fédéral qui doit examiner s’il est possible de modifier un jugement rendu en procédure simplifiée et d’ordonner une mesure thérapeutique institutionnelle.

Droit

Selon l’art. 65 CP, «  si, avant ou pendant l’exécution d’une peine privative de liberté ou d’un internement […], le condamné réunit les conditions d’une mesure thérapeutique institutionnelle prévues aux art. 59 à 61, le juge peut ordonner cette mesure ultérieurement ».

L’art. 65 CP constitue une atteinte dans l’autorité de force jugée du jugement principal et peut enfreindre le principe ne bis in idem.… Lire la suite

Le litige sur la validité du congé et la « protection contre les congés » au sens de l’art. 243 al. 2 let. c CPC

ATF 142 III 402TF, 21.06.2016, 4A_636/2015*

Faits

Un bailleur dépose une demande en procédure ordinaire à l’encontre de son locataire, dans laquelle il prend six conclusions. Il demande au juge de constater que le bail a pris fin au 1er octobre 2013 (I), de condamner le locataire au paiement de 72’600 francs à titre d’indemnité pour occupation illicite (II), de condamner le locataire au paiement de 1’650 francs à titre d’arriérés de frais accessoires (III), d’astreindre le locataire à libérer immédiatement les locaux occupés (IV) et à restituer toutes les clés permettant l’accès à l’immeuble (V) et enfin de donner l’ordre aux agents de la force publique d’exécuter le jugement s’ils en sont requis (VI).

Le Président du Tribunal des baux du canton de Vaud déclare la demande recevable. Sur appel du locataire, le Tribunal cantonal vaudois considère que seules les conclusions II et III, visant à condamner le locataire au paiement de 72’600 francs et 1’650 francs sont recevables. Le Tribunal cantonal considère que les conclusions I, IV, V, VI entrent dans le champ d’application de l’art. 243 al. 2 let. c CPC, qui soumet les litiges portant sur la protection contre les congés à la procédure simplifiée, sans égard à la valeur litigieuse.… Lire la suite