La liberté de l’assemblée des copropriétaires en matière de respect du règlement de la communauté
La communauté des propriétaires d’étages n’est pas tenue d’imposer le respect du règlement de PPE par voie judiciaire. L’assemblée peut, pour des motifs objectifs, décider de ne pas engager d’action en justice.
Faits
Deux copropriétaires d’un appartement situé au premier étage d’une propriété par étages estiment que les revêtements de sol nouvellement posés dans un appartement à l’étage supérieur violent le règlement de la communauté (le « règlement »), car ils péjorent les conditions acoustiques au détriment de leur part d’étage. Lors de l’assemblée ordinaire des copropriétaires, ils demandent que le démontage des nouveaux sols soit ordonné. Leur requête est rejetée par 11 voix contre 1.
Les deux copropriétaires concluent à l’annulation de cette décision auprès du Kreisgericht puis du Kantonsgericht de Saint-Gall, sans succès. Dans ce contexte, le Tribunal fédéral est amené à déterminer si l’assemblée des copropriétaires est tenue de faire respecter le règlement contre la volonté de la majorité.
Droit
À titre liminaire, le Tribunal fédéral rappelle que, comme tout propriétaire foncier, les propriétaires d’étages peuvent se défendre contre les atteintes illicites à leur propriété. Un copropriétaire peut donc agir contre ces atteintes sur la base des art. 684 et 679 CC. En ce qui concerne les rapports internes entre copropriétaires, notre Haute Cour souligne que ces relations passent généralement par la communauté. Par conséquent, un copropriétaire ne peut pas engager directement une action en justice contre un autre pour faire respecter le règlement de l’immeuble. Il doit d’abord obtenir une décision de l’assemblée des copropriétaires (cf. ATF 145 III 121, résumé in Lawinside/741).
Le Tribunal fédéral ajoute que l’administrateur doit veiller au respect de la loi et des règlements (art. 712s al. 3 CC). Toutefois, il ne peut agir en justice sans autorisation préalable de l’assemblée des copropriétaires, sauf cas d’urgence ou de procédure sommaire (art. 712t al. 2 CC). En exigeant cette autorisation, la loi confère aux copropriétaires le pouvoir de décider s’ils souhaitent ou non engager une action en justice. Certes, la communauté est tenue, par l’intermédiaire de son administrateur de veiller au respect du règlement (art. 712m al. 1 ch. 2 cum 712s al. 3 CC), mais cela n’implique pas nécessairement qu’elle doive imposer son respect par voie judiciaire. L’assemblée peut, pour des raisons objectives, notamment en raison du coût élevé d’une procédure ou de la préservation des relations entre copropriétaires, décider de ne pas introduire d’action en justice. Par ailleurs, en entrant dans la communauté des propriétaires par étages, chaque propriétaire accepte que la majorité prenne des décisions contraignantes, même si elles ne correspondent pas à sa volonté.
En l’espèce, les nouveaux revêtements de sol affectent uniquement la relation entre les recourants et les copropriétaires de l’étage supérieur. L’absence d’atteinte à un intérêt commun constitue une raison objective justifiant la décision de la communauté de ne pas agir.
Cela étant, en tant que copropriétaires directement touchés, les recourants ont la possibilité d’agir contre ces immissions sur la base des art. 684 et 679 CC. Ils disposent donc d’une autre voie de droit pour faire valoir leurs griefs. Dans ce cadre l’existence d’une atteinte excessive s’évaluera à l’aune du règlement : si elle est avérée, une violation du règlement rendra vraisemblable le caractère excessif de l’atteinte.
Dès lors, la décision des instances cantonales s’avère conforme au droit fédéral. Le Tribunal fédéral rejette le recours.
Proposition de citation : Sébastien Picard, La liberté de l’assemblée des copropriétaires en matière de respect du règlement de la communauté, in: https://lawinside.ch/1558/