L’enseignement primaire comme profession typiquement féminine

ATF 141 II 411 | TF, 01.12.2015, 8C_366/2014*

Faits

Une enseignante primaire argovienne conteste la classe salariale dans laquelle est colloquée sa profession au motif que celle-ci constituerait une discrimination en raison du sexe. La dernière instance cantonale retient cependant que la fonction d’enseignant primaire ne peut être considérée comme typiquement féminine, de sorte qu’il ne peut être question d’une discrimination.

Sur recours de l’enseignante, le Tribunal fédéral doit déterminer si la profession d’enseignant primaire est ou non typiquement féminine.

Droit

L’art. 8 al. 3 Cst. féd. et l’art. 3 LEg prohibent toute discrimination salariale à raison du sexe. Une telle discrimination existe notamment lorsque des différences de rémunération injustifiées touchent une profession typiquement féminine. Une profession est en principe considérée comme typiquement féminine lorsque la proportion de femmes y est nettement supérieure à 70%. On prend cependant également en compte la dimension historique de la profession.

En l’espèce, le Tribunal fédéral souligne qu’il se prononce pour la première fois sur un recours formé par une enseignante primaire pour discrimination salariale à raison du sexe. En revanche, l’utilisation de la profession d’enseignant primaire comme profession de comparaison neutre du point de vue du sexe était jusqu’ici admise de jurisprudence constante (cf.… Lire la suite

L’interdiction de pénétrer une région et la proportionnalité (art. 74 LEtr)

ATF 142 II 1

Faits

Un délinquant étranger qui séjourne illégalement en Suisse commet plusieurs infractions. A la suite de celles-ci, l’office des migrations de Zurich rend une décision qui interdit au délinquant de pénétrer la région zurichoise.

Sur recours du délinquant, le tribunal administratif de Zurich annule la décision au motif qu’elle ne serait pas apte à éviter la commission de nouvelles infractions, car le délinquant pourrait toujours commettre des actes délictueux ailleurs, ceux-ci n’étant pas spécifiquement liés à la région zurichoise.

Le Secrétariat d’Etat aux migrations forme un recours au Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’interdiction de pénétrer le territoire est apte à garantir la sécurité publique, bien que la mesure n’empêche pas au délinquant de commettre des infractions dans une autre région que celle de Zurich.

Droit

Selon l’art. 74 al. 1 let. a LEtr, l’autorité cantonale peut enjoindre à un étranger de ne pas pénétrer dans une région déterminée, notamment lorsqu’il n’est pas titulaire d’une autorisation de séjour et trouble ou menace la sécurité et l’ordre public.

Cette mesure doit respecter le principe de la proportionnalité. En particulier, elle doit être apte à atteindre l’objectif poursuivi. L’office des migrations a ordonné cette mesure dans le but d’éviter que le délinquant ne commette de nouvelles infractions sur le territoire zurichois.… Lire la suite

L’interdiction d’organiser la conférence du Conseil Central islamique Suisse (CCIS)

TF, 28.10.2015, 1C_35/2015

Faits

Le Conseil Central Islamique Suisse (CCIS) souhaite organiser sa conférence annuelle dans les espaces du Forum Fribourg (salle de conférence). À cet effet, il requiert auprès du préfet une autorisation de courte durée pour offrir des mets et des boissons à consommer sur place (patente K, art. 2 al. 1 let. a cum 14 LEPu [loi fribourgeoise sur les établissements publics]). Celui-ci refuse de délivrer la patente et interdit aussi la conférence. Le refus du préfet est confirmé par le Tribunal cantonal.

Saisi par le CCIS, le Tribunal fédéral doit établir s’il est possible, et le cas échéant à quelles conditions, d’interdire une manifestation ayant lieu dans des espaces privés – mais ouverts au public – loués par des privés selon un contrat de droit privé.

Droit

Le Tribunal fédéral observe tout d’abord que la LEPu soumet uniquement à autorisation la vente de mets et de boissons sur place, mais non pas l’organisation d’une conférence en tant que telle. Il écarte ainsi d’emblée l’analyse de l’instance cantonale qui a considéré les deux aspects comme étant liés afin de justifier la décision du préfet d’interdire la conférence.

La LEPu n’étant pas une base légale suffisante à fonder l’interdiction en question, il s’agit de vérifier si celle-ci pouvait être prononcée en application de la clause générale de police (art.Lire la suite

La faillite d’une caisse de pensions

ATF 141 V 650TF, 13.11.2015, 9C_119/2015*, 9C_138/2015*

Faits

Une caisse de pensions fait faillite. Lors de la liquidation, elle requiert des prestations du fonds de garantie. Le fonds refuse de garantir certaines prestations de libre-passage, qui auraient été transférées par erreur à la caisse de pensions concernée. Le refus est confirmé par le Tribunal administratif fédéral.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral doit se prononcer sur les prestations garanties en cas de faillite d’une caisse de pensions.

Droit

L’art. 56 LPP prévoit l’institution d’un fonds de garantie dont la fonction est notamment de garantir les prestations légales (art. 56 al. 1 let. b LPP) et les prestations règlementaires plus étendues (art. 56 al. 1 let. c LPP) dues par une institution de prévoyance devenue insolvable. Il est ainsi uniquement question de prestations d’institutions de prévoyance, les prestations de fondations de libre-passage n’étant pas garanties. Seules sont par conséquent visées les prétentions fondées sur une relation de prévoyance (« Vorsorgeverhältnis« ).

Or, en l’espèce, les bénéficiaires des prestations litigieuses n’ont jamais été assurés auprès de la caisse de pensions concernée, leurs employeurs n’étant pas affiliés à celle-ci. Les prestations pour lesquelles la garantie est demandée ne reposent ainsi sur aucune relation de prévoyance.… Lire la suite

L’ordre de démonter une pompe à chaleur et la protection contre le bruit

ATF 141 II 476 | TF, 18.11.2015, 1C_82/2015*

Faits

Un propriétaire obtient une autorisation de construire un immeuble qui prévoit un emplacement intérieur pour une pompe à chaleur. Une fois la parcelle bâtie, il s’est avéré que la pompe à chaleur est installée à l’extérieur du bâtiment et que celle-ci est bruyante.

La commune ordonne la démolition de l’installation. Cette décision est confirmée par les instances cantonales qui considèrent que, bien que les valeurs de planification soient respectées, la mise en place de l’installation n’est pas conforme au principe de prévention et contraire au permis de construire octroyé.

Le propriétaire forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral qui doit se prononcer sur la question de savoir si, d’une part, l’installation est conforme au droit de l’environnement et, d’autre part, si l’ordre de démolir est proportionné.

Droit

Au plan cantonal, lorsqu’un projet est exécuté contrairement à l’autorisation de construire, l’autorité doit examiner si le projet peut éventuellement être autorisé (art. 51 al. 4. let. b de la loi cantonale valaisanne sur les constructions). Dans cet examen, il s’agit d’analyser si le projet est conforme aux exigences du droit de l’environnement.

La pompe à chaleur est une installation fixe nouvelle dont l’exploitation produit du bruit (art.Lire la suite