Entrées par Tobias Sievert

L’imposition privilégiée des réserves latentes à la suite d’une réévaluation comptable (art. 37b LIFD)

TF, 24.04.2024, 9C_680/2022*

Le bénéfice de liquidation issu d’une réévaluation comptable d’actifs immobilisés peut être soumis à l’imposition privilégiée au sens de l’art. 37b al. 1 LIFD.

Faits

Deux associés exploitent, dans une activité lucrative indépendante, une société en nom collectif. Les associés décident de cesser leur activité d’indépendant et transforment leur société en société anonyme. Avant cette transformation, des actifs immobilisés font l’objet d’une réévaluation comptable, ce qui génère un bénéfice d’environ CHF 175’000.

Chacun des associés demande, dans sa déclaration fiscale, une imposition séparée du bénéfice de liquidation (imposition privilégiée) en raison de la cessation de son activité d’indépendant engendrée par la transformation en société anonyme.

L’Office d’impôt refuse d’inclure le montant résultant de la réévaluation comptable dans le bénéfice de liquidation. Il taxe ainsi ce montant en tant que revenu ordinaire. Sur réclamation, l’Administration cantonale des impôts admet la qualification des montants en tant que bénéfice de liquidation soumise à l’imposition privilégiée. Le Tribunal cantonal vaudois confirme cette décision.

L’Administration fédérale des contributions (AFC) forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si le bénéfice issu d’une réévaluation comptable d’actifs immobilisés peut être soumis à l’imposition privilégiée selon l’art.Lire la suite

Etendue de l’examen d’une initiative populaire et principe de la stabilité des plans (art. 21 al. 2 LAT)

TF, 28.09.2023, 1C_32/2023

Dans le contrôle de conformité d’une initiative populaire en matière de planification, la commune doit se limiter à un examen sommaire de l’art. 21 al. 2 LAT et ne sanctionner que les cas de violations manifestes du principe de la stabilité des plans.

Faits

En 2006, la commune du Mont-sur-Lausanne adopte le plan de quartier « Valleyre » qui prévoit une zone de verdure et d’habitats groupés. Ce plan n’entre toutefois en vigueur qu’en 2019, en même temps que d’autres plans de quartier afin d’exécuter un remaniement parcellaire. En 2021, des électeurs de la commune déposent un projet d’initiative populaire communale rédigée en termes généraux dans le but de classer le périmètre du plan de quartier « Valleyre » en zone inconstructible.

La commune du Mont-sur-Lausanne déclare invalide le projet d’initiative au motif qu’il contrevient à l’art. 21 al. 2 LAT, lequel consacre le principe de la stabilité des plans. Sur recours du comité d’initiative, la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal vaudois déclare l’initiative valide.

Des citoyens opposés à l’initiative forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer en particulier sur l’étendue de l’examen d’une initiative populaire en matière de planification au regard du principe de la stabilité des plans (art.Lire la suite

La procédure de rappel d’impôt dans un rapport intercantonal

TF, 21.11.2023, 9C_14/2023*

Le principe posé dans l’ATF 139 I 64 de la déchéance du droit du canton de domicile “secondaire” de procéder, après sa taxation définitive, à un rappel d’impôt sur la base de la taxation principale du canton de domicile “principal” doit être abandonné (revirement de jurisprudence).

Faits

Une société dont le siège est à Zurich dispose d’une succursale à Genève. Entre 2012 et 2015, l’Administration fiscale du canton de Genève (AFC-GE) impose la société aux impôts cantonaux et communaux.

En 2016, l’Administration fiscale du canton de Zurich (AFC-ZH) taxe la société et informe l’AFC-GE qu’elle a procédé à des corrections dans le bénéfice imposable et dans la répartition intercantonale de la contribuable.

Après avoir reçu copie des taxations de l’AFC-ZH, l’AFC-GE ouvre une procédure en rappel d’impôt et soustraction à l’encontre de la société. Par la suite, l’AFC-GE notifie les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende en fixant une nouvelle part du bénéfice et du capital imposable à Genève.

Le Tribunal administratif de première instance rejette le recours de la contribuable. La Cour de justice admet le recours de la contribuable et annule les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende. L’AFC-GE forme alors un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, lequel doit se prononcer sur l’admissibilité d’ouvrir la procédure en rappel d’impôt et en soustraction dans un rapport intercantonal.… Lire la suite

La qualité pour recourir des associations professionnelles contre une décision d’adjudication de gré à gré

TF, 07.02.2024, 2C_196/2023*

En matière de marchés publics, une association professionnelle qui souhaite recourir contre une décision d’adjudication de gré à gré, sans être elle-même touchée par la décision entreprise, doit rendre plausible qu’une majorité ou un grand nombre de ses membres seraient à la fois aptes et disposés à soumissionner pour le marché en cause.

Faits

La Direction générale des immeubles et du patrimoine de l’Etat de Vaud (DGIP) lance un concours de projets pour le Gymnase du Chablais. Les lauréats du concours sont désignés. Par la suite, la DGIP adjuge de gré à gré la construction d’un autre gymnase, à savoir le Gymnase d’Echallens, aux lauréats du concours du Gymnase du Chablais.

Deux associations professionnelles composées d’architectes et d’ingénieurs forment un recours au Tribunal cantonal vaudois contre les décisions d’adjudication de gré à gré de la DGIP. Le Tribunal cantonal déclare le recours irrecevable au motif que les associations n’ont pas la qualité pour recourir. Les associations forment alors un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur la qualité pour recourir des associations professionnelles contre une décision d’adjudication de gré à gré.

Droit

La recevabilité du recours en matière de marchés publics suppose notamment que la décision attaquée soulève une question juridique de principe (art.Lire la suite

La planification d’une décharge portant atteinte à un objet protégé par un inventaire fédéral

TF, 07.11.2023, 1C_327/2022, 1C_331/2022*

(1) L’atteinte à un objet protégé par un inventaire fédéral doit être évaluée à l’aune des objectifs spécifiques de protection de l’objet en question. En cas d’atteinte grave, l’atteinte ne peut être justifiée que par des intérêts d’importance nationale jugés équivalents ou supérieurs. (2) Une décharge qui porte atteinte à un objet protégé par un inventaire fédéral doit faire l’objet d’une étude de l’impact sur l’environnement au stade de la planification d’affectation, et ce même si le droit cantonal désigne la procédure d’autorisation en tant que « procédure décisive ».

Faits

Le canton de Zoug adopte un plan d’affectation cantonal qui prévoit l’implantation d’une décharge de type A destinée au dépôt de matériaux d’excavation non pollués. La décharge est prévue dans le périmètre du site « IFP 1309 Zugersee  » classé à l’inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels (IFP).

Le plan d’affectation cantonal fixe les grandes lignes de l’exploitation envisagée. Le projet concret de décharge devra encore être décidé dans une procédure d’autorisation subséquente. Au stade de la planification d’affectation, les autorités cantonales ne mènent pas de procédure d’étude de l’impact sur l’environnement (EIE), estimant que celle-ci aura lieu dans la procédure d’autorisation de construire conformément au droit cantonal.… Lire la suite