L’élection de compétence matérielle

ATF 142 III 623 |TF, 05.10.2016, 4A_242/2016*

Faits

Un entrepreneur total s’engage à ériger un ouvrage immobilier sur trois parcelles appartenant à son cocontractant lequel est promoteur immobilier. Les deux parties sont inscrites au registre du commerce. Dans le contrat d’entreprise totale, les parties se sont engagées à porter leurs litiges devant le tribunal de commerce du Canton de Zurich (art. 6 CPC).

Après avoir reçu l’ouvrage de l’entrepreneur, le promoteur immobilier le constitue en propriété par étages et vend les parts d’étage à une série d’acheteurs. Le promoteur immobilier (cédant) cède par ailleurs les droits à la garantie qu’il a contre l’entrepreneur total (débiteur cédé) aux acquéreurs (cessionnaires).

Par la suite, un défaut apparaît sur les parts d’étages. Les propriétaires d’étages (cessionnaires) exercent les droits à la garantie qu’ils ont reçus du promoteur immobilier (cédant) et ouvrent action contre l’entrepreneur total (débiteur cédé).

Ils introduisent action devant le tribunal de district, lequel déclare l’action irrecevable en estimant qu’il appartient au tribunal de commerce de connaître de l’action. Sur appel des propriétaires d’étages, le Tribunal cantonal de Zurich annule la décision d’irrecevabilité et renvoie la cause au tribunal de district.

L’entrepreneur total recourt au Tribunal fédéral qui est amené à déterminer si l’élection de compétence matérielle convenue par les parties dans le contrat d’entreprise totale est valable.… Lire la suite

Le regroupement familial et l’intérêt de l’enfant (CourEDH)

CourEDH, El Ghatet c. Suisse, 8.11.2016, n°56971/10

Faits

En 1997, un Égyptien arrive en Suisse et se marie à une Suissesse. En 2004, son fils, qui était resté en Égypte, obtient le droit de le rejoindre en Suisse. Il retourne toutefois en Égypte en 2005 à cause de mauvaises relations avec sa belle-mère. Suite au divorce de son père en 2006, le fils, alors âgé de 15 ans, dépose une demande de regroupement familial.

En 2008, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) rejette cette demande, rejet qui est par la suite confirmé par le Tribunal administratif fédéral. Le Tribunal fédéral confirme la décision en précisant que l’enfant a vécu presque toute sa vie en Égypte et que, compte tenu de son âge de 20 ans, il ferait face à des problèmes d’intégrations majeurs en Suisse (TF, 05.07.2010, 2C_214/2010).

Le requérant saisit alors la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH) qui doit statuer sur la portée de l’art. 8 CEDH en lien avec le regroupement familial.

Droit

L’art. 8 ch. 1 CEDH dispose que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Selon l’art.Lire la suite

La voie de droit devant le TF pour attaquer une décision de droit cantonal en matière de protection de l’adulte et de l’enfant

ATF 142 III 795TF, 27.10.16, 5A_386/2016*

Faits

Un patient se fait admettre dans une clinique psychiatrique. La vieille de sa sortie, le médecin-chef ordonne un suivi médical au sens de la loi cantonale d’application du CC. Cette mesure ambulatoire se fonde sur l’art. 437 CC (mesures de sortie suite à un placement à des fins d’assistance). Le patient recourt contre cette mesure jusqu’au Tribunal fédéral en déposant un recours en matière civile. Le Tribunal fédéral doit déterminer si une décision basée sur du droit public cantonal concernant un placement à des fins d’assistance doit faire l’objet d’un recours en matière civile ou de droit public.

Droit

Le Tribunal fédéral relève que les dispositions sur la protection de l’enfant et de l’adulte constituent généralement du droit public. Par contre, ces règles ont été édictées en vertu d’une compétence de droit civil ; elles ont un rapport étroit avec le droit civil et servent sa réalisation.

La LTF soumet certaines affaires de droit public au recours en matière civile lorsqu’elles ont une connexité avec le droit civil (art. 72 al. 2 lit. b LTF). C’est notamment le cas des décisions rendues dans le domaine de la protection de l’adulte et de l’enfant (art.Lire la suite

La détention avant jugement d’un mineur de moins de quinze ans

ATF 142 IV 389TF, 11.10.2016, 6B_1026/2015*

Faits

Un mineur âgé de douze ans est suspecté d’avoir participé à plusieurs cambriolages. D’origine roumaine, le mineur n’est pas scolarisé et n’a aucun domicile connu. Après avoir été interpellé par la police, le mineur est mis en prévention pour diverses infractions et est placé en détention provisoire pendant environ un mois.

Par ordonnance pénale, le Juge des mineurs du canton de Genève reconnaît le mineur coupable de diverses infractions liées aux cambriolages, mais l’exempte de toute peine. Le mineur fait opposition à l’ordonnance, en soutenant que l’illicéité de sa détention n’y était pas constatée. Le juge des mineurs maintient l’ordonnance pénale, qui est confirmée par le Tribunal des mineurs, puis, sur recours, par la Chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice.

Le mineur forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer en particulier sur la licéité d’une détention provisoire d’un mineur âgé de moins de quinze ans.

Droit

Selon l’art. 27 al. 1 PPMin, la détention provisoire n’est prononcée qu’à titre exceptionnel et seulement si aucune mesure de substitution n’est envisageable.

La doctrine considère cette mesure comme une ultima ratio, qui doit strictement respecter le principe de proportionnalité.… Lire la suite

Le classement en zone à bâtir relève de l’accomplissement d’une tâche fédérale au sens de l’art. 2 LPN (art. 15 et 38a LAT)

ATF 142 II 509TF, 24.08.2016, 1C_315/2015*

Faits

Le 14 janvier 2014, l’assemblée communale d’Adligenswil a (notamment) adopté la révision du plan d’aménagement local, prévoyant le classement en zone à bâtir des plusieurs régions, ainsi que du règlement de constructions et de zones. Le 28 mars 2014, le Conseil d’Etat a approuvé la révision dans sa majeure partie et rejeté le recours de la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage (ci-après : la FP). Cette dernière a alors formé un recours auprès du Tribunal cantonal, tendant à l’annulation de la décision et au renvoi de la cause à la commune pour nouvelle décision dans le sens des considérants, soit en particulier afin de redimensionner la zone à bâtir. Dans son arrêt du 5 mai 2015, le Tribunal cantonal a nié la qualité pour recourir de la FP pour la majorité des classements en zone à bâtir. La FP recourt contre cette décision auprès du Tribunal fédéral, qui doit examiner si le classement en zone à bâtir relève d’une tâche fédérale au sens de l’art. 2 LPN, si les exigences de l’art. 38a LAT s’appliquaient à la révision adoptée, mais non entrée en force avant l’entrée en vigueur de la révision partielle de la LAT et, cas échéant, si le classement en zone à bâtir respectait les exigences de cette disposition.… Lire la suite