Le calcul du loyer net admissible selon la méthode du rendement brut (art. 269a let. c CO)
La solution de l’ATF 147 III 14 ayant porté de 0,5 % à 2 % le supplément ajouté au taux hypothécaire de référence dans le cadre de la méthode du rendement net (art. 269 CO) est transposable à la méthode du rendement brut (art. 269a let. c CO). Le rendement admissible s’obtient donc en multipliant le prix de revient par le taux hypothécaire de référence auquel on ajoute 3,5 % (1,5 % pour les frais d’entretien et les charges courantes et, désormais, 2 % pour le rendement des fonds investis).
Faits
Une bailleresse et des locataires concluent un contrat de bail à loyer. Après sa résiliation, un litige s’élève entre les parties. Les locataires saisissent la Commission de conciliation, puis le Tribunal des baux de la Broye, et concluent en particulier la restitution de loyers payés en trop en raison de la nullité du loyer initial liée à la non-utilisation de la formule officielle obligatoire.
L’immeuble concerné ayant moins de 10 ans, le Tribunal se fonde sur la méthode absolue du rendement brut pour fixer le loyer net admissible (art. 269a let. c CO). Son calcul l’amène à admettre les conclusions des locataires et à condamner la bailleresse à leur restituer un trop-perçu de CHF 33’600.-.
Ayant été déboutée de son appel par le Tribunal cantonal fribourgeois, la bailleresse introduit un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci est en particulier amené à se prononcer sur la fixation du pourcentage à ajouter, au titre du rendement des fonds propres, au taux hypothécaire de référence et aux 1,5 % relatifs aux frais d’entretien et aux charges courantes.
Droit
Le Tribunal fédéral commence par rappeler que, dans le cadre de la méthode du rendement net (art. 269 CO), le loyer admissible est calculé en additionnant le rendement des fonds propres aux charges immobilières. Le rendement des fonds propres correspond aux fonds propres investis, multipliés par le taux hypothécaire de référence auquel on ajoute un supplément, qui a été porté de 0,5 % à 2 % (tant que le taux hypothécaire de référence est inférieur ou égal à 2 %) dans l’ATF 147 III 14 (résumé in : https://lawinside.ch/1002/).
A l’inverse, dans la méthode du rendement brut applicable aux immeubles récents (art. 269a let. c CO), le loyer admissible s’obtient en multipliant le prix de revient de l’appartement par le taux de rendement brut admissible. Le taux de rendement brut admissible s’obtient à son tour en additionnant le taux hypothécaire de référence, les charges courantes et frais d’entretien du propriétaire (en principe 1,5 %) et un pourcentage à titre de rémunération des fonds investis (0,5 % jusqu’à présent) calqué sur celui prévalant dans le calcul du rendement net.
Se penchant sur un premier grief de la recourante, le Tribunal fédéral se demande ensuite si la cour cantonale était liée par les taux hypothécaires de référence erronés qui ont été produits à titre de moyen de preuve par la bailleresse en vertu du principe de disposition. Le Tribunal fédéral rappelle toutefois que le taux hypothécaire de référence est un fait notoire (TF, 22.08.2016, 4A_415/2015, consid. 3.6.2). Dès lors, les taux hypothécaires indiqués de manière inexacte ne portent pas préjudice à la bailleresse et la Cour cantonale aurait dû se référer aux chiffres publiés par l’Office fédéral du logement pour déterminer les taux hypothécaires applicables en l’espèce.
Le Tribunal fédéral aborde ensuite la question du pourcentage relatif au rendement des fonds propres qui doit être ajouté au taux hypothécaire de référence et aux charges courantes et frais d’entretien du propriétaire pour déterminer le rendement brut admissible. Se fondant sur l’ATF 147 III 14 précité, il admet que les raisons qui ont conduit à augmenter ce pourcentage de 0,5 % à 2 % dans cet arrêt (essentiellement liées à la baisse régulière du taux hypothécaire de référence) sont tout aussi pertinentes dans le cadre du calcul du rendement brut. De plus, puisque ce supplément est identique dans les deux modes de calcul, la modification de l’un doit s’appliquer à l’autre. Cette augmentation ne vaut toutefois que pour autant que le taux hypothécaire de référence soit inférieur ou égal à 2%.
Dès lors, le taux hypothécaire de référence étant inférieur à 2 % durant la période litigieuse, le loyer admissible selon la méthode du rendement brut correspond au prix de revient multiplié par le taux hypothécaire de référence, auquel s’ajoutent 3,5 % (soit 1,5 % pour les frais d’entretien et les charges courantes et 2 % à titre de rendement des fonds propres).
Après avoir réduit en équité le montant des frais d’investissement pris en compte, la bailleresse n’ayant pas collaboré à l’administration des preuves sur ce point, le Tribunal fédéral admet partiellement le recours, annule l’arrêt attaqué et calcule le loyer admissible en tenant compte d’un taux de rendement des fonds propres de 2 % en référence à la solution de l’ATF 147 III 14. Le montant du trop-perçu est ainsi réduit de CHF 33’600.- à CHF 25’655.70.
Proposition de citation : Yoann Stettler, Le calcul du loyer net admissible selon la méthode du rendement brut (art. 269a let. c CO), in: https://lawinside.ch/1540/