La recevabilité d’une nouvelle requête d’assistance judiciaire
Le juge ne peut rejeter une requête d’assistance judiciaire pour le seul motif que la partie adverse a été condamnée au paiement de dépens, à moins que la solvabilité de celle-ci ne fasse aucun doute. Cependant, lorsque la partie ayant gain de cause est mise au bénéfice d’une créance de dépens, le juge peut déclarer la requête d’assistance judiciaire sans objet. Dans ce cas, le juge doit lui permettre de renouveler sa requête en se prévalant de l’impossibilité du recouvrement des dépens.
Faits
L’Autorité de protection de l’enfant et de l’adulte du district de Monthey confirme le placement d’un enfant. Le Juge unique de la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais rejette le recours interjeté par le père de l’enfant. Il met à charge de ce dernier les frais judiciaires de la mère et le condamne à lui verser une indemnité à titre de dépens pour la procédure de recours. La requête d’assistance judiciaire introduite par la mère est déclarée sans objet.
Par la suite, l’avocat de la mère requiert la fixation d’une indemnité d’avocat d’office en sa faveur pour avoir tenté de recouvrer vainement l’indemnité de dépens allouée à sa cliente, au titre de l’assistance judiciaire gratuite. Le Juge unique rejette la requête.
La mère et son avocat exercent conjointement un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Ils concluent principalement à ce que le Tribunal fédéral fixe les honoraires d’avocat d’office en tenant compte des frais de poursuite et de mainlevée encourus. La mère sollicite également le bénéfice de l’assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
Droit
Le Tribunal fédéral retient d’abord que les dispositions du CPC sur l’assistance judiciaire ont été appliquées à titre de droit cantonal supplétif. Partant, le Tribunal fédéral ne peut intervenir à cet égard que si l’autorité précédente a versé dans l’arbitraire ou enfreint d’autres droits constitutionnels. Toutefois, les conditions de l’assistance judiciaire gratuite au sens des art. 117 ss CPC correspondent à celles de la garantie minimale de l’art. 29 al. 3 Cst., disposition dont le Tribunal fédéral examine librement le respect.
Le Tribunal fédéral rappelle ensuite que, selon l’art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l’assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès. Le mécanisme de l’art. 29 al. 3 Cst. assure donc l’indemnisation par l’État de l’avocat au bénéfice de l’assistance judiciaire en cas de gain du procès lorsque la partie adverse à qui incombent les frais de justice n’est pas en mesure de s’en acquitter.
Ainsi, le juge ne peut rejeter purement et simplement une requête d’assistance judiciaire pour le motif que des dépens ont été mis à la charge de la partie adverse, à moins que la solvabilité de celle-ci ne fasse aucun doute. Si l’insolvabilité de la partie adverse est d’ores et déjà établie, le juge peut fixer directement l’indemnité due à titre d’honoraires d’avocat d’office. Il a également la possibilité de suspendre la procédure tendant à l’octroi de l’assistance judiciaire et de ne statuer sur ce point qu’ultérieurement, si cela devait s’avérer nécessaire. Lorsque l’autorité s’abstient de mentionner le sort de la requête d’assistance judiciaire dans le cadre de la décision au fond, la situation doit être assimilée à une suspension de la procédure tendant à l’octroi de l’assistance judiciaire.
En l’espèce, le dispositif de la décision est muet quant au sort de la requête d’assistance judiciaire de la recourante, alors que ses considérants indiquent que cette requête est sans objet. En réalité, cela signifie que l’autorité cantonale a suspendu la procédure relative à l’assistance judiciaire. En effet, dans sa décision, l’instance cantonale a indiqué que la requête d’assistance judiciaire était dépourvue d’objet en raison du fait que la requérante s’est vue octroyer des dépens.
Par conséquent, dès lors que le critère de l’indigence n’avait pas été examiné, l’autorité précédente ne pouvait pas considérer que le bénéfice de l’assistance judiciaire avait été refusé. En outre, elle ne pouvait pas non plus opposer à la recourante que la décision était entrée en force de chose jugée pour refuser d’examiner si les conditions d’octroi de l’assistance judiciaire étaient réalisées. En effet, par sa requête ultérieure, la recourante a en réalité réitéré sa requête initiale en se prévalant d’un changement de circonstances, à savoir qu’elle n’était pas parvenue à recouvrer les dépens. Or, cette requête imposait à l’autorité cantonale de déterminer si les conditions d’octroi de l’assistance judiciaire étaient remplies. En ne procédant pas à cet examen, le Juge unique de la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais a violé l’art. 29 al. 3 Cst.
Partant, le Tribunal fédéral admet le recours.
Proposition de citation : André Lopes Vilar de Ouro, La recevabilité d’une nouvelle requête d’assistance judiciaire, in: https://lawinside.ch/1538/