La portée de la maxime inquisitoire sociale

ATF 141 III 569 | TF, 16.12.2015, 4A_179/2015*

Faits

Des locataires sollicitent une baisse de loyer en se fondant sur une diminution du taux hypothécaire de référence. Le bailleur refuse la réduction du loyer en estimant que le loyer actuel correspond aux loyers usuels du quartier (art. 269a lit. a CO). La tentative de conciliation échoue. Le Président du Tribunal des baux invite le bailleur à fournir l’adresse d’au moins cinq appartements situés dans le quartier afin de prouver que le loyer actuel correspond à ceux pratiqués dans la localité.

Après analyse des informations reçues, le Tribunal des baux estime que les cinq appartements ne sont pas comparables avec celui du bailleur et admet la baisse de loyer. Le bailleur recourt au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral en invoquant notamment la violation de la maxime inquisitoire (art. 247 al. 2 CPC). Il soutient que le tribunal aurait dû l’avertir que les appartements qu’il a indiqués ne satisfaisaient pas les critères en la matière (art. 11 OBLF). Le Tribunal fédéral doit alors s’exprimer sur la portée de la maxime inquisitoire lors d’une procédure en réduction des loyers.

Droit

Lors d’une action en diminution du loyer, le tribunal saisi doit établir les faits d’office (art.Lire la suite

Le refus d’une commission rogatoire pour violation du droit d’être entendu

ATF 142 III 116 | TF, 21.12.2015, 4A_340/2015*

Faits

Un tribunal espagnol adresse au Tribunal de première instance de Genève (TPI) une requête d’entraide judiciaire internationale en matière civile, soit une commission rogatoire au sens de la Convention de La Haye de 1970 sur l’obtention des preuves à l’étranger en matière civile ou commerciale (CLaH70). Cette requête tend à obtenir la production de documents par une banque au sujet d’un compte bancaire.

La demande intervient en lien avec un litige espagnol concernant des versements en provenance de ce compte bancaire. Ni le titulaire du compte ni l’ayant droit économique ne sont toutefois parties au litige espagnol.

La banque informe le TPI que le titulaire du compte a refusé de la délier du secret bancaire, de sorte qu’elle ne peut pas transmettre les informations demandées.

Le TPI rend une ordonnance qui ordonne à la banque de produire les informations demandées dans la requête d’entraide.

Le titulaire du compte ainsi que l’ayant droit économique recourent contre cette ordonnance. La Cour confirme l’ordonnance en retenant notamment que le fait que les recourants n’étaient pas partie à la procédure en Espagne n’est pas un motif qui justifierait de refuser la requête d’entraide.… Lire la suite

La preuve à futur et la reddition de compte du mandataire

ATF 141 III 564 | TF, 16.12.2015, 4A_191/2015*

Faits

Une société confie la gestion de ses avoirs à une banque, qui les place auprès de Bernard Madoff Investment Services (BMIS). Il se révèle à la suite de la crise financière de 2008 que les investissements étaient fictifs et que BMIS versait des plus-values uniquement grâce aux apports de nouveaux investisseurs (système dit « de cavalerie »).

Dans ce cadre, la société dépose une requête de preuve à futur portant sur divers documents détenus par la banque, afin de recueillir des informations sur la diligence dont la banque a fait preuve en plaçant ses avoirs auprès de la société de Bernard Madoff.

La demande est rejetée par les instances cantonales. La société interjette recours auprès du Tribunal fédéral, qui se prononce en particulier sur le rapport entre la preuve à futur et l’action en reddition de compte à l’encontre du mandataire.

Droit

Les parties sont liées par un mandat. Or, l’art. 400 CO prévoit une obligation de reddition de compte à la charge du mandataire. Celui-ci est en particulier tenu de donner au mandant les renseignements devant lui permettre de s’assurer de la bonne et fidèle exécution du mandat, et le cas échéant d’agir en responsabilité (devoir d’information).… Lire la suite

Le droit de répondre en cas de modification de l’appel (art. 317 CPC)

ATF 142 III 48 | TF, 16.12.2015, 5A_553/2015*

Faits

Après avoir fait appel contre un jugement en divorce, l’époux modifie ses conclusions en appel et apporte des faits nouveaux. Le juge d’appel transmet pour information la nouvelle écriture à l’épouse et rend son arrêt sur appel deux semaines après avoir reçu l’écriture modifiée. Dans son arrêt, il admet la recevabilité des conclusions nouvelles et des faits nouveaux sur la base de l’art. 317 CPC.

Contre cet arrêt, l’épouse forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur la question de savoir si le tribunal d’appel a violé le droit d’être entendu de l’épouse en rendant son arrêt sans lui avoir imparti un délai pour qu’elle puisse se déterminer sur les conclusions modifiées et sur les faits nouveaux.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’on déduit du droit d’être entendu un droit pour toute partie de prendre position sur les écritures de la partie adverse. À ce titre, on distingue le droit de répliquer du droit de répondre. Alors que le droit de répondre s’exerce contre une demande, un appel ou un recours, le droit de répliquer porte sur toute prise de position versée au dossier, quelle que soit sa dénomination procédurale.… Lire la suite

La compétence du tribunal de commerce pour l’action révocatoire (art. 285 ss LP)

ATF 141 III 527 | TF, 12.11.15, 5A_89/2015*

La seconde partie de cet arrêt, qui traite de l’action en responsabilité (art. 41 CO), a été résumée ici : https://lawinside.ch/147.

Faits

Une banque cantonale réclame 2 millions de francs à une société allemande qui aurait notamment fait de fausses factures à une société suisse en faillite afin de diminuer la masse soumise à l’exécution forcée. La banque saisit le tribunal de commerce d’Argovie d’une action paulienne (action révocatoire, art. 285 ss LP). Celui-ci s’estime incompétent matériellement dans la mesure où l’action concerne une prétention fondée sur la LP. La banque saisit alors le Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’action paulienne entre dans la compétence du tribunal de commerce.

Droit

Le Tribunal fédéral relève que la doctrine n’est pas unanime sur la question de savoir si l’action révocatoire ressortit aux tribunaux de commerce. Il se réfère cependant à l’ATF 140 III 335 selon lequel les tribunaux de commerce ne sont pas compétents pour les litiges relevant de la LP qui ont un effet réflexe sur le droit matériel. Il convient donc de déterminer si l’action révocatoire au sens de l’art. 285 ss LP constitue un tel litige.… Lire la suite