Publications par Tobias Sievert

Le principe de la bonne foi en droit fiscal

TF, 19.01.2022, 2C_461/2021

Pour se voir accorder un statut fiscal particulier obtenu par le passé pour une période fiscale future en application du principe de la bonne foi, il faut que l’administration fiscale promette expressément d’accorder ce statut pour une période fiscale subséquente. Le simple fait d’avoir bénéficié du statut durant une certaine période ne remplace pas la promesse de l’administration fiscale.

Faits

Une société anonyme sise à Sierre est active dans la détention de participations. Depuis sa création en 1967, la société est taxée parfois en tant que société de placement de capitaux ordinaire, parfois en tant que société holding. Depuis la période fiscale 2002, la société bénéficie du statut fiscal privilégié de société holding uniquement.

Pour la période fiscale 2017, le Service cantonal des contributions du Valais ne reconnaît pas le statut de société holding et considère que la société doit être taxée de manière ordinaire.

La Commission des recours en matière fiscale du canton du Valais admet le recours de la société. La société pouvait se fier de bonne foi à la pratique adoptée par l’administration fiscale concernant la reconnaissance de son statut de société holding. En particulier, la situation n’avait pas changé, les participations détenues par la société n’ayant pas subi de modifications majeures depuis la reconnaissance de son statut particulier.… Lire la suite

La révocation d’un allégement fiscal

ATF 147 II 454 | TF, 03.12.2021, 2C_141/2020, 2C_245/2021*

Lorsque la convention à la base d’un allégement fiscal assortit l’obligation de domiciliation dans le canton après la période d’exonération à des limites temporelles claires, celles-ci sont en principe seules déterminantes quant à la question de la révocation rétroactive de l’allégement fiscal. Ce n’est que si les conditions de l’accord fiscal sont imprécises que l’on peut se référer par analogie aux règles sur le rappel d’impôt (art. 53 LHID).

Faits

En 2004, le Département des finances du canton de Vaud accorde à une société sise à Morges (Monsanto) une exonération fiscale du bénéfice et du capital imposables pour une période de dix ans (2005-2014). L’exonération fiscale est subordonnée à différentes modalités, notamment au maintien du siège de la société dans le canton pendant dix ans à compter de la fin de l’exonération, soit jusqu’en 2024. Dans le contexte d’une réorganisation du groupe commercial entamée en 2018, la société cesse ses activités à Morges et transfère son siège à Bâle en 2020.

Dans l’intervalle, en 2019, le Conseil d’Etat du canton de Vaud révoque avec effet rétroactif l’exonération accordée pour les périodes fiscales 2005 à 2014 et décide de percevoir les impôts économisés d’un montant de CHF 34’000’000.… Lire la suite

La résidence fiscale en matière d’assistance administrative internationale

TF, 24.11.2021, 2C_953/2020

Si la demande d’assistance contient toutes les informations requises par la CDI et son protocole, notamment concernant l’objectif fiscal poursuivi, on peut implicitement considérer que l’État requérant estime la personne visée comme étant son contribuable. Cette revendication implicite de résidence fiscale n’a en principe pas à être remise en cause par la Suisse, ni sous l’angle de la bonne foi de l’État requérant, ni sous l’angle de la pertinence vraisemblable. 

Faits

La Corée adresse une demande d’assistance administrative en matière fiscale à la Suisse. Elle vise un contribuable faisant l’objet d’une enquête pénale fiscale pour évasion fiscale en Corée. Le contribuable aurait constitué plusieurs sociétés dans des paradis fiscaux et effectué divers investissements, sans déclarer les revenus au fisc coréen. Ces revenus auraient été placés auprès d’une banque en Suisse.

L’Administration fédérale des contributions (AFC) accorde l’assistance. Le contribuable forme un recours au Tribunal administratif fédéral. Il conteste être résident fiscal coréen et produit une attestation des autorités fiscales indonésiennes selon laquelle il est imposé en Indonésie. Le Tribunal administratif fédéral constate que la demande d’assistance coréenne ne mentionne aucun critère de rattachement du contribuable à l’impôt en Corée. Il qualifie la demande de pêche aux renseignements illicite et admet le recours.… Lire la suite

L’effet anticipé de la zone réservée (art. 27 LAT)

TF, 09.07.2021, 1C_358/2020

Une commune est en droit d’entreprendre des démarches en matière de planification en réponse à un projet de construction spécifique, notamment en adoptant une zone réservée (art. 27 al. 1 LAT). Savoir si la zone réservée s’oppose à la délivrance du permis de construire suppose une pesée des intérêts privés et publics concernés.

Faits

Une société demande un permis de construire pour stocker et exploiter des minéraux sur une parcelle située sur le territoire de la commune de Stans. La parcelle est colloquée en zone industrielle. Après le dépôt de cette demande, la commune adopte une zone réservée (art. 27 al. 1 LAT) couvrant l’ensemble du territoire de la zone industrielle. La commune envisage en effet de modifier l’affectation de la zone.

La société conteste l’adoption de la zone réservée. Sans succès devant les autorités cantonales, la société forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer quant aux effets de la zone réservée sur la demande de permis de construire formulée antérieurement.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle notamment que selon l’art. 27 al. 1 LAT, si l’adaptation d’un plan d’affectation s’impose, l’autorité peut prévoir des zones réservées dans des territoires exactement délimités.… Lire la suite

La remise en cause de la personne concernée par une demande d’assistance administrative

TF, 05.11.2021, 2C_901/2020

En cas de doute sérieux au sujet de la personne concernée par une demande d’assistance administrative internationale en matière fiscale, l’État requis doit solliciter des éclaircissements auprès de l’État requérant. Le Tribunal administratif fédéral n’est pas habilité à substituer sa propre appréciation à celle de l’État requérant en modifiant lui-même la demande d’assistance sur ce point. 

Faits

L’Inde adresse une demande d’assistance administrative en matière fiscale à l’Administration fédérale des contributions (AFC). La demande vise un contribuable indien, héritier de son père défunt. Le contribuable disposerait d’avoirs en Suisse notamment liés à la succession de son père. L’AFC ordonne la transmission des renseignements. Le contribuable recourt au Tribunal administratif fédéral (TAF).

Sur la base d’un jugement indien produit par le contribuable durant la procédure de recours, le TAF retient que la demande d’assistance indienne ne vise en réalité pas le contribuable désigné, mais une autre personne, à savoir l’hoirie du père défunt. Ainsi, seuls les renseignements en lien avec l’hoirie doivent être communiqués au fisc indien. Le TAF admet donc partiellement le recours et ordonne la transmission des informations liées à l’hoirie.

L’AFC et le contribuable forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral.… Lire la suite