La dissolution de la société simple

ATF 146 III 97 |  TF, 09.12.2019, 4A_328/2019*

Lorsque l’actif social d’une société simple ne suffit pas pour restituer tous les apports, y compris ceux en industrie, la société simple a fait une perte qui doit être répartie à parts égales entre les associés, sauf convention contraire.

Faits

Un promoteur immobilier – qui détient également un bureau d’architectes – et une société immobilière signent un « contrat de société simple » afin de réaliser plusieurs projets immobiliers. Le contrat prévoit que la société immobilière obtiendra le remboursement de ses fonds propres si les autorisations de construire ne sont pas accordées. Les permis n’étant pas accordés dans les deux ans suivant la conclusion du contrat, le promoteur informe la société immobilière qu’elle va être remboursée. Par la suite, n’ayant pas reçu les remboursements, la société dépose une réquisition de poursuite puis obtient la mainlevée provisoire de l’opposition.

Le promoteur ouvre une action en libération de dette en invoquant une créance contre la société immobilière au titre du partage des pertes de la société simple. En effet, ses honoraires d’architecte en faveur de la société simple constitueraient un apport en industrie. Il disposerait ainsi d’une créance en remboursement à l’encontre de la société immobilière à hauteur de 50% du montant de ses honoraires.

Le Tribunal cantonal valaisan considère que la prestation d’architecte par le promoteur immobilier constitue bien un apport en industrie, lequel ne peut toutefois pas être remboursé dans le cadre de la liquidation de la société simple.

Saisi par le promoteur, le Tribunal fédéral est amené à préciser les règles applicables à la liquidation d’une société simple.

Droit

L’art. 531 al. 1 CO prévoit que chaque associé doit faire un apport, qui peut consister en argent, en créances, en d’autres biens ou en industrie. L’art. 537 al. 1 CO dispose notamment que si l’un des associés a fait des dépenses ou assumé des obligations pour les affaires de la société, les autres associés en sont tenus envers lui. Selon l’art. 549 al. 2 CO, si l’actif social n’est pas suffisant pour rembourser les apports après le paiement des dettes, dépenses et avances, la perte se répartit entre les associés.

Le Tribunal fédéral souligne qu’il est important de distinguer l’apport (art. 531 al. 1 CO) de la dépense (art. 537 al. 1 CO), bien que cela ne soit pas toujours aisé. En effet, lors de la liquidation de la société simple, il faut d’abord payer les dettes, dont font partie les dépenses, avant de restituer les apports des associés si l’actif social le permet (cf. art. 549 CO).

Dans tous les cas, les apports en industrie ne sont pas traités différemment que les autres types d’apports. Dès lors que l’actif social ne suffit pas pour restituer tous les apports, y compris ceux en industrie, la société simple fait une perte, laquelle doit être répartie à parts égales entre les associés, sauf convention contraire (art. 533 al. 1 CO).

En l’espèce, le Tribunal cantonal a considéré à tort que les honoraires ne pouvaient pas être remboursés du simple fait qu’ils constituaient un apport en industrie. En effet, si l’actif de la société simple ne permet pas de restituer les apports en industrie, la perte qui en découle doit être supportée à parts égales entre le promoteur et la société immobilière. Ainsi, si le promoteur établit ses honoraires et qu’ils constituent un apport en industrie, ils doivent être pris en compte lors de la restitution aux deux associés de leurs apports respectifs.

Partant, le Tribunal fédéral admet le recours et renvoie la cause au Tribunal cantonal.

Note

La première partie de l’arrêt résumé ici traite du droit inconditionnel de répliquer ; cette problématique a fait l’objet d’un résumé séparé (LawInside.ch/857/).

Proposition de citation : Célian Hirsch, La dissolution de la société simple, in: https://lawinside.ch/860/