Le retrait d’une poursuite peut-il faire l’objet d’un émolument ?
ATF 142 III 648 | TF, 19.08.2016, 5A_172/2016*
Faits
L’Etablissement des assurances sociales du canton de Zurich retire différentes poursuites contre un débiteur. L’Office des poursuites compétent met à charge de l’Etablissement CHF 18.30 pour cette opération, ce que l’Etablissement conteste devant le Bezirksgericht, qui agit en qualité d’autorité inférieure de surveillance. La plainte étant rejetée, l’Etablissement obtient gain de cause devant l’Obergericht, l’autorité cantonale supérieure de surveillance. L’Office des poursuites saisit alors le Tribunal fédéral d’un recours en matière civile tendant à l’annulation de cette décision.
Doit être tranchée la question de savoir si le retrait d’une poursuite comporte des frais à charge du créancier ou non.
Droit
Le créancier peut retirer une poursuite par une simple déclaration qui n’a pas à être motivée. L’office des poursuites procède ensuite à l’inscription du retrait dans le registre des poursuites.
Pour autant que la LP et l’OELP ne prévoient pas d’exceptions, toute opération des autorités de poursuite comporte des frais. Ceux-ci sont déterminés exclusivement par l’OELP (cf. art. 1 al. 1 OELP). L’art. 1 al. 2 OELP dispose qu’un émolument de 150 francs au plus peut être perçu pour les opérations qui ne sont pas tarifées dans l’ordonnance. Cette norme doit être distinguée de l’art. 42 OELP (« Autres inscriptions »), d’après lequel « [l]’émolument pour toute inscription non tarifée aux articles 16 à 41 est de 5 francs ». Alors que la première est une norme générale qui définit le cadre des émoluments qui peuvent être perçus lorsque l’ordonnance ne prévoit rien, la seconde ne s’applique qu’aux inscriptions qui ne sont pas tarifées aux art. 16 à 41.
Il est incontesté que l’OELP ne prévoit aucun émolument pour l’inscription du retrait d’une poursuite. L’ordonnance n’exclut toutefois pas non plus cette opération de l’obligation de percevoir un émolument. S’agissant d’une inscription au registre des poursuites, seul l’art. 42 OELP est pertinent pour déterminer si le retrait d’une poursuite est soumis à émolument.
En l’espèce, le Tribunal fédéral rappelle que les motifs qui conduisent le créancier à retirer la poursuite ne sont d’aucun intérêt pour l’office des poursuites. Il rejette ainsi l’argument selon lequel le législateur souhaitait encourager le remboursement des dettes en exonérant de tout émolument le retrait d’une poursuite. Une telle solution impliquerait d’analyser dans chaque cas d’espèce si le retrait d’une poursuite a lieu dans l’intérêt du débiteur, et de décider ensuite sur cette base si l’opération doit être soumise à la perception d’un émolument ou non. Or, cela dépasserait les devoirs et les ressources des offices de poursuite. Partant, l’inscription du retrait d’une poursuite est une opération soumise à émolument.
Les directives internes zurichoises prévoyant l’exonération de tout émolument pour cette opération n’y changent rien, celles-ci n’ayant en tout cas pas force de loi.
C’est ainsi que le Tribunal fédéral admet le recours de l’Office des poursuites, annule la décision de l’autorité de surveillance supérieure et la remplace par le rejet de la plainte de l’Etablissement zurichois.
Proposition de citation : Simone Schürch, Le retrait d’une poursuite peut-il faire l’objet d’un émolument ?, in: https://lawinside.ch/309/