Le refus d’inscription au registre foncier, une affaire patrimoniale?

ATF 144 III 310 | TF, 20.04.2018, 5A_518/2017*

L’exigence de la valeur litigieuse minimale (art. 74 LTF) s’applique à l’ensemble des décisions soumises au recours en matière civile qui constituent des affaires pécuniaires, y compris aux matières relevant matériellement du droit public. Cette exigence s’applique notamment au recours contre le refus d’inscription au registre foncier. Par ailleurs, un droit d’habitation sous condition suspensive ne peut être inscrit au registre foncier qu’une fois la condition réalisée.

Faits

Par acte authentique, le propriétaire d’un immeuble accorde un droit d’habitation à sa compagne. L’acte authentique prévoit notamment, « à titre exclusivement contractuel et sans inscription au registre foncier », que le droit d’habitation ne prendra effet qu’au décès du propriétaire.

Le registre foncier refuse l’inscription du droit d’habitation. L’instance cantonale compétente confirme cette décision.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral analyse d’une part si l’exigence de la valeur litigieuse minimale (art. 74 LTF) s’applique au recours contre le refus d’inscription au registre foncier, et d’autre part si un droit d’habitation sous condition suspensive peut être inscrit au registre foncier.

Droit

A titre liminaire, le Tribunal fédéral relève que les décisions en matière de tenue du registre foncier relèvent du recours en matière civile (art.Lire la suite

Une tâche fédérale au sens de l’art. 2 LPN ne doit pas nécessairement avoir un rattachement dans l’espace

ATF 144 II 218TF, 12.02.2018, 1C_312/2017*

La reconnaissance d’une tâche fédérale au sens de l’art. 2 LPN ne suppose pas que l’activité en question ait un certain rattachement dans l’espace (« Raumbezug »). Il suffit que la tâche fédérale soit en rapport avec la protection de la nature et du patrimoine. Les associations de protection de la nature peuvent donc se voir reconnaître la qualité de partie à une procédure de réexamen de l’homologation de produits phytosanitaires (art. 29 OPPh) sur la base du droit de recours de l’art. 12 LPN (art. 6, 48 al. 2 PA).

Faits

La fondation WWF Suisse (le WWF) apprend que l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) a ouvert des procédures de réexamen de certains produits phytosanitaires contenant des substances actives déterminées (art. 29 al. 1, 4 Ordonnance sur la mise en circulation des produits phytosanitaires [OPPh]). Elle demande à l’OFAG de l’inviter à participer à la procédure et de lui accorder le droit de consulter le dossier. L’OFAG rejette cette requête. Sur recours du WWF, le Tribunal administratif fédéral (TAF) annule la décision de l’OFAG et lui renvoie la cause afin qu’il reconnaisse au WWF la qualité de partie dans la procédure de réexamen.… Lire la suite

La transmission de données concernant les employés de banque, les notaires et les avocats à l’IRS américain

ATF 144 II 29 | TF, 18.12.2017, 2C_640/2016*

Dans le cadre de l’assistance administrative internationale, les noms des employés de banque et de tout avocat/notaire, ainsi que les données permettant de les identifier, doivent être caviardés avant toute transmission des informations au fisc américain.

Faits

Dans le contexte du Joint Statement de 2013 destiné à mettre un terme au contentieux fiscal américain impliquant des banques suisses, une banque décide de participer au programme américain avec l’autorité fiscale américaine (IRS) et le Département fédéral de la justice des Etats-Unis (DoJ) dans la catégorie 2, afin de signer un Non-Prosecution-Agreement (NPA).

En 2015, l’IRS adresse une demande d’assistance administrative internationale à l’Administration fédérale des contributions (AFC) concernant deux comptes bancaires déterminés ouverts auprès de la banque.

L’AFC obtient de la banque les informations requises, puis rend des décisions par lesquelles elle accorde l’assistance administrative à l’IRS et prévoit la transmission des documents bancaires des comptes visés.

Le bénéficiaire économique des comptes recourt au Tribunal administratif fédéral, lequel, après avoir joint les causes, admet partiellement les recours. Le Tribunal considère en effet que les noms des employés de banque et de tout avocat/notaire, ainsi que les données permettant de les identifier (par exemple adresse e-mail, numéro de téléphone), doivent être caviardés avant leur transmission.… Lire la suite

La qualité d’un député pour recourir contre un acte législatif adopté par le Grand Conseil

ATF 144 I 43 | TF, 22.11.2017, 1C_196/2017*

Un membre d’une autorité est habilité à recourir contre un acte législatif s’il est potentiellement touché par l’acte en question et ce, indépendamment du fait que le recourant soit lui-même membre de l’autorité ayant voté la loi en question.

Faits

Le Grand Conseil genevois modifie l’art. 3 de la loi portant sur son propre règlement (LRGC/GE) en octroyant le droit d’initiative parlementaire également aux députés suppléants. Ce droit revenait auparavant aux seuls députés élus.

Le recours d’un député élu au Grand Conseil contre cette modification législative auprès de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice genevoise est déclaré irrecevable, faute de qualité pour recourir (art. 60 LPA/GE).

Le député élu interjette un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se déterminer sur la qualité pour recourir du député contre la modification législative en question.

Droit

Selon l’art. 111 al. 1 LTF, la qualité de partie à la procédure devant toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral. Par voie de conséquence, le Tribunal fédéral analyse en l’espèce la qualité pour recourir du député devant l’instance précédente au regard de l’art.Lire la suite

Le paiement d’une avance de frais par un mineur non accompagné

Décision de la commission administrative du Tribunal fédéral, 16.10.2017, 12T_2/2016*

La pratique prévalant au sein du Tribunal administratif fédéral qui consiste à demander aux requérants d’asile mineurs non accompagnés des avances de frais restreint de manière inadmissible l’accès à la justice. 

Faits

Un citoyen érythréen de 15 ans non accompagné fait une demande d’asile. Il fonde sa requête sur le risque d’être enrôlé de force dans l’armée nationale et sur la circonstance qu’il avait auparavant été détenu deux mois au motif qu’il avait été soupçonné de vouloir quitter le pays sans autorisation. Le Secrétariat d’État aux migrations rejette sa demande.

Contre cette décision, le demandeur d’asile de 15 ans recourt au Tribunal administratif fédéral et demande à titre préalable l’octroi de l’assistance juridique sous la forme d’une dispense d’avance de frais. Par décision incidente, le juge instructeur rejette la requête d’assistance judiciaire au motif que le recours était dénué de toute chance de succès et fixe un délai au demandeur d’asile pour verser une avance de frais de CHF 900. Ne s’étant pas acquitté de ce montant, le demandeur d’asile de 15 ans voit son recours déclaré irrecevable.

La Fondation suisse du service social international adresse alors, au nom du demandeur d’asile de 15 ans, une dénonciation à l’encontre de la décision incidente au Tribunal fédéral en sa qualité d’autorité de surveillance administrative du Tribunal administratif fédéral.… Lire la suite