La reconnaissance du lien de filiation créé à la suite d’une gestation pour autrui

ATF 141 III 312 | TF, 21.05.2015, 5A_748/2014*

Faits

Deux hommes suisses liés par un partenariat enregistré concluent un contrat de maternité de substitution avec une femme californienne (gestation pour autrui). La mère porteuse donne naissance en Californie à un enfant dont la mère génétique est une donneuse anonyme d’ovule et le père génétique, qui a donné son sperme, est l’un des deux partenaires suisses.

Les deux partenaires se voient reconnaître la paternité de l’enfant par un jugement californien. Ils demandent alors à l’office compétent saint-gallois de reconnaître ce jugement et de les inscrire dans le registre d’état civil en tant que parents de l’enfant, ce que l’office refuse. Sur recours, le Département de l’intérieur du canton de Saint-Gall admet la demande et inscrit les deux partenaires comme étant les pères de l’enfant.

L’Office fédéral de la justice forme un recours auprès du Verwaltungsgericht de Saint-Gall, qui, après avoir procédé à une pesée des intérêts entre l’interdiction de la gestation pour autrui et le bien de l’enfant, rejette le recours. Reconnaissant ces deux principes comme faisant partie de l’ordre public suisse, le tribunal a pour l’essentiel considéré que l’enfant ne devait pas subir les conséquences négatives du choix – certes regrettable – de ses parents.… Lire la suite

La reconnaissance d’une décision de faillite étrangère (LDIP 166)

ATF 141 III 222 | TF, 27.03.2015, 5A_248/2014*

Faits

Le tribunal de Rotterdam (Pays-Bas) ouvre une procédure d’insolvabilité à l’encontre d’une société néerlandaise. L’administrateur de cette procédure demande au Tribunal cantonal de Zug de reconnaître le jugement néerlandais, afin de pouvoir agir en Suisse.

Le Tribunal cantonal et l’Obergericht refusent de reconnaître le jugement au motif que le droit néerlandais ne respecte pas la condition de la réciprocité prévue par l’art. 166 al. 1 let. c LDIP.

L’administrateur exerce un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit trancher la question de la réciprocité du droit néerlandais, c’est-à-dire déterminer si le droit néerlandais permettrait de reconnaître un jugement suisse dans une situation similaire.

Droit

L’art. 166 al. 1 LDIP subordonne la reconnaissance d’une décision de faillite étrangère à trois conditions. L’une d’elles est la condition de réciprocité du droit étranger (art. 166 al. 1 let. c LDIP). Cette condition est remplie si le droit étranger reconnaît les conséquences d’une faillite suisse d’une manière semblable, sans pour autant qu’il soit nécessaire que la reconnaissance soit forcément identique.

Le Tribunal fédéral rappelle que la jurisprudence européenne tend à assouplir cette condition de réciprocité. De même, la Suisse semble suivre cette tendance, en particulier avec le nouvel art.Lire la suite

Le grief de l’ordre public formel dans une procédure d’exequatur

ATF 141 III 210 | TF, 09.04.2015, 4A_203/2014*

Faits

Une société d’assurance russe (« l’assurance ») conclut un contrat avec une entreprise étatique russe afin d’assurer une centrale hydroélectrique appartenant à cette dernière. L’assurance est réassurée, entre autre, par un contrat conclut avec une société de réassurance suisse (« le réassureur »). Ce contrat prévoit une clause d’élection de for en faveur des tribunaux russes. Suite à un grave accident qui se produit à la centrale hydroélectrique, l’assurance paye l’intégralité de la somme assurée. Les réassureurs refusent toutefois – en partie – de couvrir le dommage.

L’assurance actionne le réassurer en payement de la somme assurée devant un tribunal commercial de Moscou. Celui-ci admettant l’action, le réassurer épuise alors en vain les trois autres instances disponibles, qui le déboutent.

Ayant obtenu gain de cause de manière définitive, l’assureur demande au Bezirksgericht zurichois de reconnaître le jugement russe et de le déclarer exécutable en Suisse (exequatur). Cette demande est admise. Le réassureur recourt à l’Obergericht, puis au Tribunal fédéral (en matière civile) en faisant valoir qu’une reconnaissance de la décision russe se heurterait à l’ordre public formel et ne serait dès lors possible à la teneur de l’art. 27 al.Lire la suite