La fiction du retrait de l’opposition à l’ordonnance pénale

ATF 142 IV 158 – TF, 11.04.2016, 6B_87/2016*

Faits

Le Service de la circulation tessinois émet une ordonnance pénale condamnant un conducteur de voiture à une amende pour infraction à la LCR. Suite à l’opposition du conducteur, la cause est transmise au tribunal de première instance qui cite les parties à une audience. La citation à comparaître n’ayant pas été retirée par le conducteur dans le délai de garde de 7 jours, le tribunal considère que l’opposition a été retirée et raie la cause du rôle (cf. art. 356 al. 4 CPP).

Débouté en appel, le conducteur interjette recours au Tribunal fédéral en faisant valoir qu’il n’a jamais reçu la citation à comparaître, et que dès lors il n’a pas valablement renoncé à porter la cause devant le tribunal de première instance.

Il se pose alors la question de savoir s’il est possible de retenir un retrait de l’opposition valable du fait que le prévenu fait défaut à l’audience en raison du non-retrait de la citation à comparaître (cf. art. 85 al. 4 let. a CPP).

Droit

L’art. 355 al. 2 CPP dispose que si l’opposant fait défaut sans excuse et malgré citation à une audition convoquée par le Ministère public, son opposition est réputée retirée.… Lire la suite

Le principe de la double instance cantonale en matière d’exequatur (art. 106 EIMP)

ATF 142 IV 170 – TF, 01.03.2016, 6B_346/2015*

Faits

Le Ministère de la Justice autrichien demande l’exécution d’une décision de condamnation d’un individu à une peine privative de liberté à l’autorité compétente suisse. Après consultation de l’autorité d’exécution du canton de Berne, l’Office fédéral de la Justice (ci-après : l’OFJ) admet la demande. L’autorité d’exécution demande alors à l’Obergericht bernois de mener la procédure d’exequatur. Après avoir entendu le procureur général, celui-ci déclare le jugement autrichien exécutoire. L’intéressé recourt alors au Tribunal fédéral contre cette décision au motif que son droit d’être entendu aurait été violé et qu’aucune voie de droit cantonale ne se trouvait à sa disposition.

Droit

Selon l’art. 104 al. 1 EIMP, l’OFJ rend une décision sur l’acceptation formelle de la demande d’exécution. S’il l’admet, il transmet le dossier avec son avis à l’autorité d’exécution. Ensuite, le juge cantonal matériellement compétent selon l’art. 32 CPP renseigne le condamné sur la procédure, l’entend en présence de son mandataire et statue sur l’exécution (art. 105 EIMP). Si les conditions de l’exécution sont remplies, il déclare la décision exécutoire et prend les mesures nécessaires (art. 106 al. 2 EIMP). La décision doit être rendue sous la forme d’un jugement motivé et le droit cantonal doit prévoir une voie de droit (art.Lire la suite

L’accusateur public au sens de l’art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF

ATF 142 IV 196 | TF, 03.03.2016, 6B_111/2015*

Faits

Le Tribunal pénal économique du canton de Fribourg condamne un prévenu pour blanchiment d’argent et faux dans les titres à une peine privative de liberté de 36 mois. La Cour d’appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois admet l’appel du prévenu et le condamne à une peine privative de liberté de 12 mois.

Le Ministère public fribourgeois, par l’entremise d’une procureure, forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt.

Le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir si la désignation des personnes habilitées à représenter l’accusateur public (art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF) relève de l’organisation judiciaire cantonale.

Droit

Pour trancher la question topique, le Tribunal fédéral met en oeuvre une procédure de coordination de la jurisprudence au sens de l’art. 23 al. 2 LTF.

L’ancienne loi fédérale sur la procédure pénale, abrogée avec l’entrée en vigueur du CPP, prévoyait que l’accusateur public du canton était compétent pour recourir au Tribunal fédéral. La jurisprudence rendue sous l’empire de cette loi considérait que, lorsqu’un ministère public était compétent pour tout le canton, qu’il avait le droit de recourir auprès de l’autorité de dernière instance cantonale et qu’il devait veiller à une application uniforme du droit fédéral dans son canton, un autre accusateur public compétent dans certains domaines ou pour une partie du territoire cantonal seulement ne pouvait pas recourir au Tribunal fédéral, et ce, même s’il était le seul à être intervenu en dernière instance cantonale.… Lire la suite

L’exploitabilité d’une preuve administrée par la police sur le territoire d’un autre canton

ATF 142 IV 23 |  TF, 18.01.2016, 6B_553/2015*

Faits

Une patrouille de la police de Saint-Gall suit un automobiliste depuis le territoire saint-gallois puis, alors qu’il se trouve en Appenzell, le soumet à un contrôle de la route. Une prise de sang révèle un taux d’alcoolémie de 0,8 à 1,25 pour mille. L’automobiliste est condamné par ordonnance pénale pour conduite sous l’influence de l’alcool (art. 91 LCR). Il est cependant libéré par le tribunal cantonal supérieur au motif que la prise de sang est inexploitable.

Saisi par le Ministère public, le Tribunal fédéral doit déterminer si la preuve est exploitable en dépit du fait que les policiers l’ont administrée dans un territoire sur lequel ils n’étaient pas compétents.

Droit

Les policiers ont effectué la prise de sang sur le territoire d’un autre canton. Ils n’étaient donc pas compétents territorialement (cpr. art. 31 CPP). L’instance précédente a jugé que la preuve était de ce fait inexploitable.

L’art. 141 al. 2 CPP interdit l’exploitation de preuves qui ont été administrées d’une manière illicite ou en violation de règles de validité, sauf dans les cas où leur exploitation est indispensable pour élucider des infractions graves. Les preuves administrées en violation de simples prescriptions d’ordre sont au contraire exploitables (art.Lire la suite

La qualité de l’héritier de se constituer demandeur au pénal (art. 121 al. 1 CPP)

ATF 142 IV 82 | TF, 01.02.2016, 6B_827/2014*

Faits

Un mari dépose une plainte pénale contre une personne pour diverses infractions perpétrées contre le patrimoine de sa femme défunte. Il soutient notamment que sa femme a été victime d’une escroquerie (art. 146 CP) et qu’après son décès, le produit de ce crime a fait l’objet d’un blanchiment d’argent (art. 305bis CP).

Le ministère public rend une ordonnance de non-entrée en matière, au motif que le mari n’a pas le statut de lésé au sens de l’art. 115 al. 1 CPP nécessaire pour se constituer demandeur au pénal (art. 118 al. 1 et 310 CPP). Le mari recourt contre cette ordonnance auprès du Tribunal cantonal, qui lui dénie la qualité pour recourir et n’entre ainsi pas en matière sur le recours (art. 382 al. 1 CPP).

Le mari forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral qui doit déterminer si le mari, en tant qu’héritier, dispose de la qualité pour se constituer demandeur au pénal (art. 118 al. 1 et 121 al. 1 CPP).

Droit

Au sens de l’art. 115 al. 1 CPP, une personne dispose du statut de lésé lorsque ses droits ont été touchés directement par une infraction.… Lire la suite