L’indication d’un faux motif à l’appui d’un licenciement et l’art. 251 CP
Faute pour ces documents de revêtir une valeur probante accrue, indiquer des motifs erronés dans une lettre de licenciement ou de motivation d’un congé ne constitue pas un faux dans les titres au sens de l’art. 251 CP.
Faits
Une commune engage un employé en qualité d’agent de commerce du service « sécurité civile ». En février 2016, sur fond de conflits internes, la commune résilie le contrat de travail de l’employé avec effet au 30 avril 2016. La lettre de résiliation ne contient pas de motif de licenciement, mais indique que la décision a été prise en séance du conseil communal le 22 février 2016.
À la suite de l’opposition de l’employé, qui demande également à connaître le motif de son licenciement, la commune lui répond par courrier que son congé est dû à une réorganisation interne de l’administration ayant entraîné la suppression de son poste.
L’employé dépose plainte pénale contre les deux signataires des lettres, en particulier pour faux dans les titres. Il reproche aux prévenus d’avoir menti quant aux véritables motifs de son licenciement et quant à la date à laquelle la décision avait été prise.
Par la voie de l’ordonnance pénale, le Ministère public valaisan condamne les prévenus pour faux dans les titres à des peines pécuniaires avec sursis, ainsi qu’à des amendes. À la suite de l’opposition des intéressés, le Tribunal du district de l’Entremont les condamne également. Le Tribunal cantonal valaisan rejette leurs appels.
Ces derniers saisissent le Tribunal fédéral, qui doit déterminer si l’indication d’un faux motif de licenciement dans une lettre de résiliation ou de motivation constitue un faux dans les titres au sens de l’art. 251 CP.
Droit
Le Tribunal fédéral commence par joindre les deux procédures (cf. art. 71 LTF et art. 24 PCF). Il rappelle ensuite la teneur de l’art. 251 ch. 1 CP. Selon cette disposition, quiconque, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d’autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, crée un titre faux, falsifie un titre, abuse de la signature ou de la marque à la main réelle pour fabriquer un titre supposé, ou constate ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou, pour tromper autrui, fait usage d’un tel titre, est puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. L’art. 317 CP constitue le pendant de cette disposition s’agissant des fonctionnaires.
Selon l’art. 110 al. 4 CP, sont des titres tous les écrits destinés à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait.
L’art. 251 CP vise tant le faux matériel, lorsque l’auteur réel du document ne correspond pas à l’auteur apparent, que le faux intellectuel, lorsque le titre émane bien de son auteur apparent, mais que son contenu ne correspond pas à la réalité. Toutefois, un mensonge écrit ne constitue pas encore un faux dans les titres. Il faut en sus que son destinataire puisse s’y fier et lui accorder une crédibilité accrue.
Pour le Tribunal fédéral, une lettre de résiliation ou de motivation d’un congé ne constitue pas un titre. Elle ne peut donc pas être qualifiée de faux intellectuel lorsqu’elle contient des indications fausses. En effet, elle n’est pas revêtue d’une valeur probante accrue. En l’espèce, les deux lettres ne contenaient par ailleurs pas d’assurances objectives qui auraient garanti la véracité de leur contenu.
Il n’est donc pas possible de condamner les intéressés pour faux dans les titres, malgré les constatations de l’instance inférieure. Le Tribunal cantonal valaisan avait en effet retenu que la date de la prise de décision du licenciement remontait à novembre 2015, tandis que le motif indiqué à l’appui du congé était faux.
Partant, le Tribunal fédéral admet les recours.
Proposition de citation : Camille de Salis, L’indication d’un faux motif à l’appui d’un licenciement et l’art. 251 CP, in: https://lawinside.ch/1527/