L’examen des mesures d’assainissement en cas de modification notable d’une installation
La modification notable d’une installation fixe sujette à assainissement impose à l’autorité d’examiner toutes les mesures envisageables permettant de procéder à l’assainissement.
Faits
Le projet CEVA consiste en la réalisation d’une infrastructure ferroviaire en région genevoise, dont l’une des stations est prévue à la halte Carouge-Bachet.
La Direction générale des transports (DGT) met à l’enquête un projet de réglementation locale du trafic prévoyant de nouvelles mesures de circulation liées au réaménagement du périmètre de la halte Carouge-Bachet. Sur la base d’un arrêté du Département des infrastructures, il est prévu la fermeture au trafic de plusieurs tronçons routiers aux alentours de la halte. Le trafic et les émissions sonores perceptibles en résultant sont ainsi reportés sur une route parallèle, laquelle génère déjà un bruit dépassant les valeurs limites applicables.
Le Département du territoire accorde l’autorisation de construire pour le réaménagement des tronçons routiers.
Deux riverains, qui vivent au bord de la route sur laquelle le trafic des voies est reporté, contestent sans succès l’autorisation de construire devant les autorités judiciaires cantonales. Ils forment alors un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se pencher sur l’obligation des autorités d’examiner les mesures d’assainissement possibles en cas de modification notable d’une installation fixe déjà sujette à assainissement.
Droit
Sur le plan de la recevabilité, le Tribunal fédéral constate que les recourants sont riverains de la route sur laquelle le trafic des voies fermées à la circulation est reporté. Ainsi, bien qu’ils ne soient pas directement riverains des routes visées par la décision de réaménagement du trafic, ils sont particulièrement atteints par celle-ci en raison de l’augmentation perceptible des nuisances sonores. Ils ont donc la qualité pour recourir selon l’art. 89 al. 1 LTF.
Sur le fond, le Tribunal fédéral commence par rappeler les dispositions topiques applicables en matière de protection contre le bruit (cf. art. 11 ss LPE), et en particulier les conditions auxquelles une installation peut être modifiée (cf. art. 8 OPB). Enfin, lorsqu’une installation existante est déjà sujette à assainissement, l’art. 18 LPE subordonne sa transformation à l’exécution simultanée de cet assainissement.
Le Tribunal fédéral constate alors que la route sur laquelle le trafic est reporté est une installation fixe existante générant déjà un bruit dépassant les valeurs limites. Ainsi, la décision qui modifie les règles de la circulation consiste en une modification notable d’une installation fixe sujette à assainissement, soit la route sur laquelle le trafic est reporté (cf. art. 8 OPB et 18 LPE).
Étant donné le dépassement préexistant des valeurs limites de bruit et l’augmentation prévisible et perceptible du bruit sur la route litigieuse, les dispositions topiques imposent que :
- le bruit soit limité dans la modification de l’installation fixe, et ce dans la mesure du réalisable sur le plan de la technique et de l’exploitation, et de l’économiquement supportable (art. 8 al. 1 OPB) ;
- des mesures de protection passive contre bruit soient adoptées sur les bâtiments touchés (art. 10 s. OPB) ; et
- la nécessité de procéder à un assainissement de l’installation dans le cadre de l’exécution de celle-ci soit réévalué (art. 18 LPE).
En l’espèce, le Tribunal fédéral constate qu’aucun examen des mesures envisageables n’a été entrepris par les autorités cantonales en ce sens, alors qu’il leur appartenait d’examiner les mesures d’assainissement possibles. Le Tribunal fédéral ajoute qu’on ne saurait, contrairement à ce que laissent entendre les autorités cantonales, exclure d’autres variantes du projet en raison de la seule existence d’un intérêt public à la réalisation des aménagements aux abords d’une gare ; la protection contre le bruit étant également un intérêt public majeur en jeu.
Enfin, le Tribunal fédéral rappelle que d’éventuels allègements accordés selon l’art. 17 LPE lors d’un examen antérieur d’un assainissement de l’installation litigieuse ne sont pas immuables. En effet, en cas de modification notable d’une installation, comme c’est le cas en l’espèce, la loi subordonne l’exécution à son assainissement (cf. art. 18 LPE). Ainsi, l’assainissement doit être réévalué.
Partant, le Tribunal fédéral admet le recours et retourne la cause à l’autorité inférieure en vue du prononcé d’éventuelles mesures d’assainissement.
Proposition de citation : Tobias Sievert, L’examen des mesures d’assainissement en cas de modification notable d’une installation, in: https://lawinside.ch/898/