La récusation des juges du TMC en cas de procédures connexes
ATF 143 IV 69 | TF, 03.01.2017, 1B_409/2016*
Faits
Dans le cadre d’une instruction pénale pour trafic de stupéfiants, deux juges du Tribunal des mesures de contrainte (ci-après le « TMC ») sont appelés à se prononcer à de multiples reprises sur des demandes d’autorisation de mesures de surveillance et d’investigation secrète, sur le placement en détention provisoire de divers coprévenus, ainsi que sur la prolongation de ces mesures.
Placé en détention provisoire, l’un des prévenus demande la récusation des deux juges. Sa requête est rejetée par l’autorité de recours cantonale.
Le prévenu forme recours auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si le fait que les juges du TMC aient déjà statué dans des procédures connexes constitue un motif de récusation.
Droit
A teneur de l’art. 56 let. b CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d’une autorité pénale est tenue de se récuser lorsqu’elle a agi à un autre titre dans la même cause, en particulier comme membre d’une autorité, conseil juridique d’une partie, expert ou témoin. La notion de « même cause » s’entend de manière formelle et vise une procédure identique impliquant les mêmes parties et portant sur les mêmes questions litigieuses. En outre, l’art. 56 let. b CPP ne s’applique que si le magistrat concerné intervient à un autre titre, soit dans des fonctions différentes. En l’espèce, les juges intimés ont généralement statué dans des procédures connexes, mais distinctes, impliquant d’autres prévenus, et sont toujours intervenus en la même qualité de juges du TMC. Le motif de récusation de l’art. 56 let. b CPP n’est ainsi pas réalisé.
Selon la clause générale de l’art. 56 let. f CPP, tout magistrat est tenu de se récuser lorsque des motifs autres que ceux énumérés aux lettres précédentes, notamment un rapport d’amitié étroit ou d’inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à le rendre suspect de prévention. En l’espèce, les juges intimés ont déjà tranché des questions similaires à celles se posant dans le cadre de la détention provisoire du recourant lors de procédures antérieures, par exemple s’agissant de l’existence de graves soupçons au sens de l’art. 260 al. 1 let. a CPP. Cela étant, en l’absence de griefs concrets, on ne peut en déduire que les magistrats concernés ne seraient pas à même de tenir compte de l’évolution de l’instruction et de la situation particulière du prévenu en cause. Si le simple fait d’avoir déjà rendu une décision sur un complexe de fait et de droit similaires constituait un motif de récusation, il faudrait désigner un juge différent pour chaque nouvelle procédure connexe, ce qui irait à l’encontre des principes d’économie de procédure et de célérité. Un motif de récusation ne résulte pas non plus en tant que tel de la libération obtenue par le prévenu sur recours. Partant, les juges du TMC n’étaient pas non plus tenus de se récuser en vertu de l’art. 56 let. f CPP.
Pour ces motifs, le Tribunal fédéral rejette le recours.
Note
Au stade de l’examen de la recevabilité, le Tribunal fédéral relève que le TMC doit être considéré comme une autorité judiciaire de première instance au sens de l’art. 59 al. 1 let. b CPP, ce pour quoi l’autorité cantonale de recours est compétente pour statuer en tant qu’instance cantonale unique sur les demandes de récusation de juges du TMC.
Proposition de citation : Emilie Jacot-Guillarmod, La récusation des juges du TMC en cas de procédures connexes, in: https://lawinside.ch/392/
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